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Suis Je Le Mieux Placé Pour Savoir Qui Je Suis ?

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Par   •  8 Janvier 2014  •  1 659 Mots (7 Pages)  •  1 190 Vues

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« Je te connais comme si je t’avais fait » dit-on parfois à un proche, pensant par là qu’on sait exactement qui il est. Voilà qui est bien paradoxal, car si on peut observer les actes, entendre les paroles, on ne peut découvrir l’intérieur d’un sujet. Or, la trahison, le mensonge ne montrent-ils pas que les autres nous sont celés ? Dès lors, je semble être le mieux placé pour savoir qui je suis.

Cependant, nous paraissons aussi nous illusionner sur nous-mêmes de sorte que par leur regard plus objectif, les autres voient bien mieux dans nos intentions ou dans nos désirs, comme ces amoureux qui n’osent se déclarer leur amour, d’abord à eux-mêmes et que leurs proches ont déjà découvert.

Je puis donc me demander si je suis le mieux placé pour dire qui je suis ou bien si ma proximité avec moi ne me donne aucun privilège particulier pour dire qui je suis. La conscience me permet d’affirmer que je suis le mieux placé pour dire qui je suis. Par contre, l’hypothèse de l’inconscient me déloge de cette place. Le moi enfin, ne demeure-t-il pas essentiellement un inconnu ?

S’interroger sur qui on est, implique d’être capable de se représenter soi-même. Or, tel est le propre de la conscience. Et que découvre cette conscience ? Qui suis-je, moi, qui, m’interroge sur moi-même ? Il faut d’abord convenir que je ne suis pas mon corps. Non seulement parce que je peux douter de lui mais non que je suis comme Descartes le soutient dans les Principes de la philosophie (première partie, article 8), mais il change et je demeure le même. « Vienne la nuit sonne l’heure / Les jours s’en vont je demeure » dit justement le refrain du poème Le Pont Mirabeau de Guillaume Apollinaire (1880-1918) repris dans Alcools (1913). Sans compter que c’est ce que je fais de mon corps qui me définit. C’est pourquoi le point de vue des autres sur mon corps, qui est plus complet, moi, qui n’en fais jamais le tour, ne leur donne aucun privilège sur moi. Bien au contraire, c’est moi qui sais ce que je fais de mon corps. Le médecin a besoin de ce que je lui dis pour découvrir mon mal et la maladie est d’abord éprouvée par le sujet comme Georges Canguilhem (1904-1995) le montre dans Le normal et la pathologique (1966).

Je ne suis pas non plus mon tempérament, c’est-à-dire ce qui semble être ma façon d’être naturelle, sanguin ou calme par exemple, ou mon caractère, c’est-à-dire la disposition morale qui est mienne comme d’être affable ou vindicatif comme une chose est bleue ou verte. C’est moi qui use de mon tempérament, qui me laisse aller en lui donnant le dessus ou qui forge mon caractère. Dès lors, c’est bien moi qui suis le mieux placé pour dire qui je suis. C’est qu’en effet, que ce soit mon corps ou mon tempérament ou mon caractère, c’est moi qui lui donne son sens. Disons donc avec Rousseau dans l’Émile (1762) suivi par Alain dans ses Définitions que la conscience ne trompe jamais. Pour cela il faut et il suffit de l’interroger.

Cependant, c’est un présupposé que la conscience soit l’essence du moi. Et c’est un présupposé d’autant plus contestable que nombre de nos pensées ou de nos actions nous demeurent obscures malgré notre effort pour les comprendre. Ce qu’éclaire la conscience est peut-être infime et son éclairage n’est-il pas finalement subjectif ? Dès lors, ne dois-je pas admettre en moi un inconscient et dès lors estimer que je ne suis pas le mieux placé pour dire qui je suis ?

Parce que les autres me voient agir, que mon corps en action se montre à eux pleinement, ils découvrent de moi et sur moi tout ce qui me trahit, voire tout ce qui de moi, m’est inconnu. Au début de son autobiographie, L’âge d’homme (1939), Michel Leiris (1901-1990) rapporte quelques une de ses habitudes en faisant remarquer que d’autres lui sont certainement inconnues. C’est que l’observation de notre propre corps n’est pas, loin s’en faut, un privilège de notre conscience. Or, ses gestes recèlent un sens. C’est ainsi que Freud a, avec raison, attiré l’attention sur les actes manqués. Rapportons un des plus surprenants qu’il relate brièvement dans le chapitre 3 de son Introduction à la psychanalyse, celle d’un chimiste qui oublie d’aller à son mariage et qui va au moment où il devait s’engager, à son laboratoire. Il est clair que le sens de l’action de son corps ne lui est pas connu au moment où il agit et qu’il est au contraire dans l’illusion sur le sens de son action.

Et dans certains cas, je puis moi-même me surprendre et ainsi comprendre que je suis inconnu à moi-même. C’est ce que montrent les actes révélateurs de mon tempérament. De même que les lapsus manifestent nos désirs inconscients selon Freud – par exemple ce lapsus du président d’une assemblée qui déclare la séance close à la place d’annoncer son ouverture, ce qui montre son désir d’en finir – de même nos actes

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