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Gouverner, c'est légiférer

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Par   •  1 Octobre 2017  •  Dissertation  •  4 465 Mots (18 Pages)  •  2 832 Vues

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« Gouverner, c’est légiférer ».

François Fillon, lorsqu’il était Premier Ministre, a affirmé, le 22 octobre 2008 à propos de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 : « Nous n’avons pas changé de République. Le Parlement doit être beaucoup plus associé en amont, mais, dans notre système politique, c’est encore le Gouvernement qui, sur les sujets essentiels, présente ses projets de loi et engage le débat avec le Parlement. » En effet, cette réforme constitutionnelle, intitulée « De modernisation des institutions de la Vème République », visait « à renforcer le rôle du Parlement, à rénover le mode d’exercice du pouvoir exécutif et à garantir aux citoyens des droits nouveaux », en d’autres termes, elle avait pour but de redonner ses lettres de noblesse au Parlement français. Le rôle de ce dernier semble s’être amoindri avec l’avènement du fait majoritaire et l’élection du Président de la République française au suffrage universel direct à partir de 1962. Il semble de bon ton d’affirmer que le Gouvernement français est celui qui, parmi tous les régimes parlementaires comparables à la Vème République, dispose du plus grand nombre d’armes lui permettant d’intervenir dans la procédure législative et donc d’empiéter sur le rôle du Parlement. Dès lors, l’adage « gouverner, c’est légiférer » semble être communément – et justement – admis.  

La Constitution de la Vème République est le fruit de deux traditions constitutionnelles : une tradition présidentialiste, issue du Consulat et de l’Empire, qui relie le peuple au chef de l’Etat par l’élection et la consultation, et une tradition libérale, celle théorisée par Montesquieu et Benjamin Constant, reposant sur une séparation et une collaboration des pouvoirs, le bicamérisme, la responsabilité du gouvernement devant le Parlement et la reconnaissance des droits et libertés fondamentaux. Selon la célèbre formule du Général De Gaulle, une Constitution est à la fois « un esprit, des institutions, une pratique ». L’esprit de la Constitution de 1958 est une synthèse de ces deux visions. L’objectif de la Vème République, construite sur les décombres de la IVème République, sacrifiée sur l’autel de l’instabilité ministérielle, était de bâtir un exécutif fort. Pour ce faire, le Gouvernement devait disposer des moyens institutionnels et politiques de mener à bien son programme. Il s’agissait par là-même de limiter les pouvoirs du Parlement dans le cadre d’un parlementarisme rationalisé. Ainsi, dans ce contexte et conformément à l’article 20 de la Constitution de 1958, « Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation ». Dans le cadre de ce même parlementarisme rationalisé, le Gouvernement est, conformément à l’article 20 de la Constitution, responsable devant le Parlement. Le titre V de la Constitution est consacré aux relations entre Gouvernement et Parlement. Ainsi, si le Gouvernement doit être assez puissant pour mener à bien ce pour quoi il a été élu, il doit travailler avec le Parlement, et chaque branche du pouvoir doit collaborer avec les autres, dans l’optique de servir la nation. En 1962, Charles de Gaulle fait adopter par voie de référendum l’élection du Président de la République au suffrage universel direct. D’aucuns y verront les débuts d’une démocratie césarienne dirigée par le Général de Gaulle, toujours est-il que l’on peut considérer 1962 comme l’année de l’avènement du fait majoritaire. La pratique constitutionnelle a en effet révélé la prééminence de l’exécutif sur le législatif, particulièrement dans le domaine de l’élaboration de la loi. L’analyse de la Constitution en droit mais aussi en pratique a souvent conduit à considérer que cette dernière instaurait un parlementarisme négatif, dans lequel le Parlement n’a qu’un rôle de contre-pouvoir par réaction à la politique gouvernementale. Le Parlement n’est donc pas l’unique institution disposant du pouvoir de légiférer, pouvoir qu’il partage avec le Gouvernement pour que ce dernier puisse faire voter les lois lui permettant de mener à bien son programme. Dès lors, il s’agira de se demander : en quoi le parlementarisme négatif de la Vème République confère-t-il au Gouvernement la primauté en matière législative et, dès lors, comment définir le rôle et l’importance du Parlement français dans le processus législatif ?

        La Constitution de la Vème République confère au Gouvernement des pouvoirs lui permettant d’interférer dans la procédure législative, et ce au détriment du Parlement. Néanmoins, on ne peut nier le rôle primordial du Parlement dans la formation de la loi, notamment par son rôle de contrôle du Gouvernement et par le renforcement de ses prérogatives par la réforme constitutionnelle de 2008.

  1. Des compétences gouvernementales qui interfèrent dans la procédure législative : une apparente séparation inégale des pouvoirs profitant à l’Exécutif entraînant un déclin du Parlement.

  1. Les armes du Gouvernement dans la procédure législative : une prééminence permise par l’alliance de la forme juridique et de la forme politique.

La Constitution de la Vème République, dans le cadre d’un régime de séparation souple des pouvoirs et de partage des compétences, confère au Gouvernement des pouvoirs lui permettant d’intervenir dans la procédure législative. Ces pouvoirs sont énoncés dans les articles du titre V de la Constitution. On distingue plusieurs étapes dans la procédure législative : l’initiative de la loi, la délibération, éventuellement la contestation juridictionnelle et enfin la promulgation. Les armes du Gouvernement en matière législative s’expriment d’abord au travers de l’initiative de la loi, qui est partagée. En effet, l’article 39 C. dispose : « L’initiative de la loi appartient concurremment au Premier Ministre et aux membres du Parlement ». Le domaine de la loi est énoncé dans l’article 34 C. de manière exhaustive. Les matières qui ne sont pas expressément mentionnées dans cet article changent de main et reviennent à l’exécutif qui, relativement à l’article 37 C., peut intervenir par voie de décrets « autonomes » qui ont une valeur réglementaire. Néanmoins, le Gouvernement ne se substitue pas ici au Parlement puisqu’il s’agit d’actes réglementaires qui sont de son ressort, et non d’actes législatifs.  S’agissant du domaine de la loi défini à l’article 34 C., Le Premier Ministre élabore des projets de loi. Ces derniers sont délibérés en Conseil des ministres après avis du Conseil d’Etat. Ils sont ensuite déposés sur le bureau de l’une des assemblées, puis au nom du Premier Ministre (qui met lui-même son pouvoir au service du Président de la République), un ministre soutient et défend le projet de loi devant le Parlement. Quant au Parlement, par l’intermédiaire du président de l’une des assemblées, il peut faire des propositions de loi. Si l’initiative de la loi semble donc partagée, la pratique révèle que 80% des lois adoptées sont au départ des projets de loi, donc initiées par le Gouvernement. Quelques lois emblématiques ont cependant été adoptées sur initiative du Parlement : la loi de 1967 relative à la contraception ou encore la loi de 1999 relative au PACS. On assiste à une raréfaction des lois adoptées à partir d’une proposition de loi pour des raisons à la fois politiques et juridiques. Tout d’abord, le fait majoritaire conduit à donner plus de pouvoir au Gouvernement, qui dispose de la fonction décisionnelle. De plus, le Gouvernement peut faire appel aux articles 40 C. et 41C. et considérer les propositions de loi du Parlement irrecevables. Ainsi, l’article 41 C. dispose que si une proposition ou un amendement n’est pas du domaine de la loi, le Gouvernement peut y opposer l’irrecevabilité. L’article 37 C. al. 2 permet au Conseil Constitutionnel de veiller au respect de la frontière dans le cas où le domaine de la loi empiéterait sur le domaine réglementaire et autorise le Gouvernement à modifier la disposition concernée par décret.

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