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Commentaire d'arrêt 12 janvier 2021

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Par   •  2 Février 2022  •  Commentaire d'arrêt  •  1 913 Mots (8 Pages)  •  470 Vues

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Commentaire d’arrêt Procédure pénale séance 2

     Le fait pour un officier de police judiciaire durant une garde à vue de demander le code de téléphone de la personne suspectée, sans la présence de son avocat, peut-il entraîner la nullité du procès-verbal de la communication du téléphone, de son exploitation et de l'audition en découlant ? C’est à cette question qu’a dû répondre la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 12 janvier 2021.

     Il ressort des faits de l’espèce qu’une information judiciaire a été ouverte à la suite d'infractions à la législation sur les stupéfiants mais également importation en contrebande de marchandises dangereuses pour la santé publique et association de malfaiteurs. En effet, des livraisons envoyées en Île-de-France contenaient des stupéfiants. Dans ce cadre, une personne a été placée en garde à vue. Cette dernière a sollicité la présence d’un avocat. Toutefois, lors de la garde à vue, un officier de police judiciaire a demandé à la gardée à vue, hors présence de son avocat, son code de déverrouillage de téléphone et l’a par la suite exploité. Suite à la mise en examen de la personne soupçonnée, son avocat a déposé une requête en nullité de la communication du téléphone, de son exploitation et de l'audition soutenant que les articles 63-3-1 et 64-4-2 du Code de procédure pénale relatifs à la présence de l’avocat durant l’audition auraient été violés.

     Le 23 juin 2020, la chambre de l'instruction a rejeté la demande d'annulation, et a jugé que le procès-verbal d'exploitation du téléphone n'avait pas le caractère d'une audition. En effet, elle justifie cela par le fait qu’aucune question sur les faits n’a été posée à la personne suspectée, et cette dernière n’a fait aucune déclaration. Dès lors, la mise en examen s’est pourvue en cassation. Bien qu’elle ait transmis son code de déverrouillage, il n’en demeure pas moins que son avocat était absent à ce moment-là. Elle s’est par conséquent pourvue au motif que la demande de code relevait du régime de l’audition et nécessitait la présence de l’avocat qui aurait garanti le libre consentement de sa cliente. Il en ressort que la chambre de l’instruction aurait violé ainsi les articles 63-4-2 et 63-3-1 du code de procédure pénale puisque l’avocat aurait dû nécessairement être présent pendant la remise du code.

Les juges de la Chambre criminelle rejettent le pourvoi et énoncent dans leur arrêt du 12 janvier 2021, publié au bulletin, que le procès-verbal d'exploitation du téléphone n'a pas le caractère d'une audition au sens de l’article 63-4-2 du CPP qui suppose des questions sur les faits, posées à la gardée à vue. Or en l’espèce, ce n’est pas le cas, la gardée à vue n’a par ailleurs effectué aucune déclaration. Dès lors, les juges assimilent ce procès-verbal à une perquisition. De surcroit, aucun texte légal ne prévoit la présence d’un avocat lors d’une exploitation de téléphone. Enfin, la Cour de cassation ajoute qu’aucune atteinte au droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination n’a été portée. En effet, ce droit « ne s’étend pas à l’usage de données que l’on peut obtenir de la personne en recourant à des pouvoirs coercitifs, mais qui existent indépendamment de la volonté du suspect. »

     Cette décision n’est pas étonnante, en ce qu’elle vient confirmer une jurisprudence préétablie. La chambre criminelle de la Cour de cassation a pu en effet affirmer dans une décision du 22 octobre 2013 que le fait de présenter un gardé à vue pour faire reconnaitre les objets saisis en sa présence lors d'une perquisition ne constituait pas une audition nécessitant la présence d’un avocat. En outre, l'article 434-15-2 du Code pénal prévoit que « le refus de transmission de la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie est puni de trois ans d'emprisonnement et de 270 000 euros d'amende ». La Cour de cassation en chambre criminelle a précisé le 8 octobre 2020 que le code de téléphone portable était concerné par cet article. Toutefois, il n’en reste pas moins que l’arrêt du 12 janvier 2021 a pu paraitre attentatoire aux droits de la défense, aux yeux de certains auteurs. C’est notamment le cas de l’avocat maitre Morgante qui affirme que cette décision « met à mal les droits de la défense ». L’avocat maitre Caprioli a par ailleurs démontré qu’il était difficile de concevoir que la demande de code de téléphone portable n’était pas assimilable à une audition.

     Il convient alors de se demander si à travers cette décision, les droits de la défense sont préservés.

     A la vue de ces éléments, la Chambre criminelle de la Cour de cassation affirme clairement l’assimilation d’un procès-verbal d’exploitation de téléphone à une perquisition (I). Toutefois, cette décision porte une atteinte incontestable aux droits de la défense (II).

  1. La claire assimilation du procès-verbal d’exploitation d’un téléphone à une perquisition

      En assimilant le procès-verbal d’exploitation d’un téléphone à une perquisition, les juges garantissent tout de même le droit de ne pas s’auto-incriminer (A). De surcroit, la chambre criminelle de la Cour de cassation rejette explicitement le régime de l’audition (B).

  1. La garantie conservée du droit de ne pas s’auto-incriminer

     Le paragraphe 3 de l’article 63-1 du Code de procédure pénale garantit à une personne gardée à vue, lors d’une audition, le droit de « répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ». Par conséquent, le gardé à vue dispose d’un droit de ne pas s’auto-incriminer. Toutefois, la Cour de cassation précise que ce droit ne s’étend pas à l’usage de données que l’on peut obtenir de la personne en recourant à des pouvoirs coercitifs, mais qui existent indépendamment de la volonté du suspect. Il en résulte que le droit au silence ne s’étend pas aux données de la personne gardée à vue. Dès lors, puisque ce droit ne peut s’étendre, aucune atteinte n’a été portée au doit de ne pas s’auto-incriminer. Il en résulte selon la chambre criminelle, que le fait pour un officier de police judiciaire de demander le code de déverrouillage d’un téléphone à un gardé à vue ne porte pas atteinte à son droit de ne pas s’auto-incriminer, et ce même si l’exploitation du téléphone permet de faire avancer l’enquête et retenir des charges contre le suspect. En effet, cela est justifié par le fait qu’il n’y ait pas d’extension du droit de silence aux données personnelles d’un individu.

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