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Sylvie Et Le Souvenir

Compte Rendu : Sylvie Et Le Souvenir. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  31 Mars 2014  •  2 259 Mots (10 Pages)  •  610 Vues

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Les Filles du feu de Gérard de Nerval est un recueil de huit nouvelles et d’une douzaine de sonnets paru en 1853.

I. Le jeu sur le réel par le souvenir.

A. Le souvenir chimérique.

Le passage étudié s' ouvre sur un travail analogique du narrateur qui prétend observer des ressemblances entre Adrienne, amour de jeunesse, et l'actrice qu'il observe chaque soir, Aurélie. C'est donc ici que le jeu nervalien sur le rêve va s'exprimer grâce à la résurrection irréelle d'Adrienne. Puis, de ce souvenir illusoire, nous passerons au souvenir concret, celui de Sylvie.

Nous savons que le narrateur n'a pas vu Adrienne depuis que cette dernière est partie au couvent. Elle est réalité, comme nous l'apprendrons par la suite, décédée. Nous assistons donc, ici, à sa renaissance par la figure de la comédienne : " Aimer une religieuse sous la forme d'une actrice!..." Les points de suspension semblent assimiler cette phrase à un songe vague et nébuleux, confortant l'idée d'un souvenir chimérique. La préposition "sous" nous indique bien le sens de cette renaissance imaginaire: Adrienne resurgit par le biais de l'actrice.

Ce sont d'ailleurs deux époques qui vont se rencontrer par cette souvenance irrationnelle : celle de la jeune vie du narrateur, des fêtes du Valois, et la vie plus actuelle, plus proche de ce dernier, celle des soirées passées admiratif au théâtre. Ainsi, quand Nerval écrit: " l'inconnu vous attire comme le feu follet fuyant sur les joncs d'une eau morte...", nous pouvons comprendre que "l'inconnu" se rattache à Aurélie, qu'il ne connaît pas alors n'ayant jamais osé engager une conversation avec elle. Quant à l' "eau morte", elle nous ramène aux terres d'enfance de Nerval, à Mortefontaine, proche géographiquement du lieu de rencontre avec Adrienne. A ce propos, ces premières lignes renforcent leur aspect confus et illusoire par la structure qui s'en dégage: nous avons à faire à un souvenir cantonné au simple rang d'une impression, c'est à dire qu'aucun détail en particulier ne surgit à ce moment-là. Ce souvenir étreint à son plus vague aspect s'exprime par le corps d'une actrice, c'est à dire d'une femme qui selon Nerval, est nécessairement porté vers la surréalité dont lieu même est le théâtre. Elle demeure ainsi coupée de l'environnement extérieur à ces yeux, ce qui vient conforté le sentiment que le souvenir imprécis d'Adrienne demeure une impression détachée de repères spatiaux explicites, clairs, et de même cette impression vole au-delà de l'ancrage plus ou moins profond d'un souvenir, elle est insaisissable. Nous notons la récurrence des points de suspension ("eau morte...") qui replace alors la narration dans la confusion du songe, un songe actif puisque son moteur demeure malgré tout le souvenir et ainsi le travail de mémoire en marche qu'il comprend, bien qu'il soit semi-rêvé. Le temps présent utilisé ("Il y a de quoi devenir fou" ; " 'c'est un entraînement fatal" ; "vous attire") appuie cette idée de mémoire et d'imaginaire en activité. Ainsi, Nerval pose définitivement l'empreinte de l'irréel sur ces quelques première par la phrase : " Reprenons pied sur le réel", qui annonce la fin de la renaissance d'Adrienne.

B. Le souvenir concret.

Le souvenir de Sylvie est donc annoncé comme étant concret, inscrit dans un récit de la réalité et non du fantasme comme l'est celui d'Adrienne par la figue d'Aurélie. (C'est en ce sens qu'il est introduit ainsi : " Reprenons pied sur le réel".) Il renforce ce sentiment de réalité en insistant de nouveau sur la véracité de Sylvie et donc de sa souvenance: "Elle existe, elle". La répétition du pronom personnel "elle", qui encadre le verbe d'état exister et qui est mis en valeur par le temps de pause marqué par la virgule, illustre pleinement l'importance que donne le narrateur à ce contraste entre les deux souvenirs, et donne du coup une place plus forte à son affection envers Sylvie. Sylvie, c'est à dire "elle", entoure le verbe exister conjugué ici au présent, comme pour montrer qu'il s'agit du centre, du coeur même de son approche du souvenir de cette femme: elle est dans la vie réelle.

Notons aussi que le souvenir de Sylvie va gagner en détails et se déclencher clairement après que le narrateur se doit demander pourquoi il l' avait omis durant un certain temps ("Pourquoi l'ai-je oubliée depuis trois ans?"), comme s'il devait partir de ce constat radical pour engager une nouveau travail de mémoire la concernant. On trouve ainsi une phrase interrogative qui ne demande pas de réponse mais qui,suivie d'une phrase exclamative ("C'était une bien jolie fille, et la plus belle de Loisy! "), marque l'engagement fort du narrateur dans cette évocation de la femme aimée. Le récit se déroule au passé quand il s'agit d'évoquer l'état du narrateur vis à vis de Sylvie sur la durée passée, ou bien lorsqu'il s' agit d'entrer dans des instants plus précis ou des instants que l'évocation de ce souvenir à fait rejaillir.("Et Sylvie que j'aimais tant" ; "c'était une bien jolie fille" ; " le bien modeste qu'il m'a laissé et qui pouvait suffire à ma vie"), mais il s'est aussi être actif comme le montre le temps du présent qui donne une matière vive à ce phénomène, et prouve que le narrateur se remémore la figure de cet amour ( "je revois" ; "j'entends"...) Toujours sur les temps, le conditionnel passé première forme ("j'aurais conservé" ; "qui l'aurait épousé") montre que Nerval donne une perspective à se souvenir, place les conséquences des choix du passé dans le présent du narrateur. C'est à dire qu'au contraire du souvenir d'Adrienne, celui de Sylvie pourrait encore avoir une actualité, l'envisager est en tout cas possible pour le narrateur qui suppose ce qu'un choix différent pourrait avoir fait de son existence. C'est un travail de mémoire très actif pour lui, qui le mène à une interrogation de son présent, à avoir des regrets ... Ce souvenir a donc bien les pieds dans la réalité et semble plus long, plus perdurant que l'impression

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