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Peut-on considérer la parole comme masque dans les deux comédies ?

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Par   •  28 Novembre 2021  •  Dissertation  •  3 053 Mots (13 Pages)  •  241 Vues

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                                 Question littéraire de littérature classique :

        

« Que ne peut l’artifice et le fard du langage » dit Alidor dans La Place royale, Pierre Corneille à travers ce personnage nous dévoile tout le coeur de sa comédie à savoir l’usage de la parole par les personnages pour tromper et arriver à leurs fins. Cette pièce écrite en 1635 met en scène deux amants, Angélique et Alidor ; ce dernier veut en finir avec cette liaison qu’il considère comme trop dangereuse à son libre arbitre. En se confiant à son ami Cléandre à ce sujet, celui-ci lui révèle que lui aime éperdument Angélique et qu’il aimerait la conquérir. Pour Alidor la solution est toute trouvée, il va faire en sorte de jeter Angélique dans les bras de son ami. Cependant les choses ne sont pas si simples, Phylis meilleure amie d’Angélique veut unir cette dernière à son frère Doraste, en effet lui aussi est épris d’Angélique. Le langage articulé est également utilisé dans la comédie- ballet de Molière, Monsieur de Pourceaugnac pour duper et parvenir à ce qui est souhaité. Cette pièce écrite en 1669, met en scène à Paris deux jeunes amants, Julie et Éraste qui entretiennent leur amour en secret. Un obstacle va s’interposer dans leur amour, Oronte le père de Julie prend la décision de donner sa fille à Monsieur de Pourceaugnac, un avocat de Limoges. Pour détruire ce projet, les amants vont faire appel à Nérine, une entremetteuse et Sbrigani un fourbe napolitain, pour mettre en place un plan pour cela ils vont user de la parole. Ainsi, ces deux comédies usent de la parole, on peut alors se demander dans quelle mesure ces pièces nous révèlent-elle que le langage peut être artifice et tromper autrui ? Autrement dit, la parole peut-elle être envisagée comme un masque pour atteindre ses fins? Dans un premier temps nous verrons que la parole utilisée comme un masque détient de nombreux pouvoirs et peut être une véritable arme pour les personnages. Dans un second temps nous verrons que la parole trompeuse a ses limites et ne ne suffit pas toujours à couronner. Enfin nous verrons que ces deux comédies du fait qu’elles présentent une métathéâtralité rend la parole comme masque nécessaire.

Dans ces deux comédies, fondées sur la parole comme arme mensongère et manipulatrice, Molière et Corneille installent dès le début certains personnages du coté des dupes et de l’autre des dupeurs. Les dupeurs vont multiplier les artifices afin d’arriver à leur but. En effet dans Monsieur de Pourceaugnac, pour l’empêcher d’épouser Julie et le faire fuir, Éraste avec l’aide de Nérine et Sbrigani vont mettre en place une série de ruses disproportionnées contre Pourceaugnac. Ces derniers vont aller jusqu’à faire passer Monsieur de Pourceaugnac pour un homme fou qui a besoin de traitements médicaux, une fourberie violente où les médecins lui imposent un discours alarmant sur sa santé. Par la suite les dupeurs multiplient les rôles, Pourceaugnac est trompé tout le long de la pièce et est victime de mensonges le faisant passer pour un homme pratiquant la polygamie qui est interdite mais aussi pour un homme endetté qui doit de l’argent à de nombreux marchands. La farce prend donc rapidement des grandes disproportions. Dans La place royale, c’est Angélique qui est victime de tromperie, celle-ci est tourmentée par Alidor qui s’associe avec Cléandre, celui-ci éprouve des passions pour Angélique. Tout deux manigancent une fausse promesse de mariage et un enlèvement afin que Angélique soit contrainte d’épouser Cléandre. Phylis amie d’Angélique et soeur de Doraste va également ruser et profiter de la rupture des amants pour ranger Angélique avec Doraste, ce dernier étant éperdument amoureux d’elle.

        Les ruses qui parsèment ces deux comédies ne pourraient avoir lieu et réussirent sans l’emploi d’un langage trompeur. En effet dans la pièce de Molière, le langage du désir est utilisé par Julie pour repousser Monsieur de Pourceaugnac ainsi que son père Oronte, Julie est tenue au courant des avancées de Sbrigani, elle sait que celui-ci a convaincu Monsieur de Pourceaugnac qu’elle n’est pas respectable et que l’épouser serait inconvenable pour lui. Julie est prête à passer à l’action, elle va donc pousser cette ruse plus loin et user d’un vocabulaire de séductrice, de tentatrice pour affirmer les propos de Sbrigani et repousser monsieur de Pourceaugnac Acte II scène 6 : « Que je suis aise de vous voir ! et que je brûle d’impatience… », Julie par ce langage simule parfaitement la galante et rend la rumeur concrète. Il en va de même lorsque Nérine et Lucette simulent d’être des épouses abandonnées de Monsieur de Pourceaugnac devant Oronte, elles utilisent le langage trompeur par des accents régionaux. En effet, Lucette interprète l’occitan et fait mine de s’être déplacée jusqu’ici pour prévenir et empêcher son traitre de mari de commettre un mariage criminel ; Nérine complice d’Éraste va également s’exprimer dans une langue régionale, le picard qu’elle va mélanger au français, pour les mêmes raisons que Lucette elle vient prévenir Oronte et empêcher ce mariage. Ces langues déguisées sont utilisées en abondance par Lucette et Nérine qui feignent de ne pas se connaitre et se disputent le statut d’épouse de Monsieur de Pourceaugnac, convainquant ainsi Oronte que Monsieur de Pourceaugnac est un homme aux nombreux crimes et qu’il ne va certainement pas lui donner sa fille. Le langage trompeur est aussi retrouvé dans La place royale, celui-ci est utilisé subtilement par l’écrit. Effectivement, Alidor pour rompre avec Angélique utilise le langage écrit ; par le biais de son domestique Polymas il va lui transmettre une fausse lettre. Angélique par ce qu’elle pense être de la bienveillance et de l’honnêteté par ce geste de Polymas en réalité tout à fait calculé, va découvrir une lettre d’amour d’Alidor destinée à une dénommée Clarine. Dans cette lettre, Alidor feint d’être repoussé par le physique d’Angélique « Ses yeux sont sans vigueur, sa bouche sans appas » allant jusqu’à la qualifier de « Idole mouvante », il la compare à cette maîtresse imaginaire, ce langage dupe complètement Angélique qui se trouve blessée et répugnée de son amant.

        Ces paroles trompeuses fonctionnent car elles sont utilisées par des experts de la tromperie. Dans Monsieur de Pourceaugnac, Éraste et Julie font appel à de véritables professionnels de la duperie pour se débarrasser de Pourceaugnac ; Sbrigani et Nérine manipulent avec brio Pourceaugnac, Oronte et parviennent subtilement à faire jouer des rôles à ceux dont il font appel pour piéger Pourceaugnac et ceci sans qu’ils le sachent. Les dupeurs deviennent donc duper par ces deux experts. Dès le début de la pièce, on prends connaissance de leur pouvoir de manipulation, en effet après la scène d’exposition on découvre à la scène 2 de l’acte I un éloge de Nérine sur la capacité à tromper de Sbrigani : « Madame, voilà un illustre […] et c’est le héros de notre siècle […] un homme qui vingt fois en sa vie pour servir ses amis […] ». Et inversement, Sbrigani la complimente : « lorsque avec tant d’honnêteté vous pipâtes au jeu […] lorsque avec tant de grandeur d’âme vous sûtes nier […] ». Tout au long de la pièce, Sbrigani se place en homme de confiance face à Pourceaugnac, qui se laisse duper et lui confie tout. Sbrigani manipule l’égo de Pourceaugnac en le complimentant dès qu’il est possible. Nérine, comme nous avons pu le voir parvient parfaitement à manipuler Oronte en incarnant la picarde. Ces deux personnages excellent en art de la tromperie et utilisent la parole comme pouvoir de manipulation. Dans la place royale, Alidor n’a pas d’expérience en la matière contrairement à Nérine et Sbrigani mais fait preuve de grande imagination pour manipuler Angélique, premièrement la fausse lettre est un succès car Angélique pensant qu’il l’a trompée se détache de lui comme il le souhaitait. Avec cette fausse lettre, Angélique le voit désormais comme un homme cruel et le déteste comme il l’espérait. Mais ce qui révèle réellement sa capacité à manipuler est l’acharnement dont il fait preuve pour la récupérer. En effet, après la fausse lettre, Phylis réussie à convaincre Angélique d’épouser Doraste, Alidor ne peut laisser faire car la seule option qu’il envisageait pour Angélique était d’épouser son fidèle ami Cléandre. Alidor se lance donc dans une fausse promesse de mariage, pour récupérer Angélique il feint la supplication, joue l’amant brisé qui demande pardon pour la convaincre de lui redonner une chance. Son talent de persuasion pousse en instant Angélique à retomber dans ses bras, Alidor la prends par les sentiments, par de belles paroles et une multiplication de mots affectueux à l’acte III, scène 6 : « Ma chère âme, mon tout ». Angélique devient même transparente en lui avouant qu’elle utilise Doraste pour se venger, Alidor réussi donc à inverser les rôles, Angélique en vient à s’excuser.

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