Nana

son époque. Pourtant le personnage de Nana semble dépasser ce projet, par la fascination qu'il exerce. Zola, en rédigeant Nana, s'étant donné comme fin de montrer la dépravation morale de la société française, guidée uniquement par ses appétits charnels. Or cette absence de morale conduit à une forme de corruption, dont Nana serait le vecteur. Les nouveaux quartiers de Paris, réservés aux fortunés, sont bâtis sur des fondations déjà corrompues. Ce milieu serait déjà corrompu avant l'arrivée de Nana. C'est peut-être ce qui explique la facilité de la jeune femme à passer de son milieu populaire à son nouveau statut. Le passsage de la pauvreté à la richesse semble immédiat et naturel comme le montre l'association de la périphrase péjorative « en fille du pavé de Paris », qui désigne l'ancien état de Nana et l'expression méliorative « ayant d 'instinct toutes les élégances ». Nana est donc un personnage exceptionnel et fascinant par sa capacité à s'affranchir de son origine sociale. Mais Zola dépasse le simple projet documentaire qu'il s'était fixé.

Zola n' est pas qu'un simple obsevrateur, il condamne moralement son héroïne. Le naturaliste est également un juge. Ses jugements dépréciatifs portent sur le mauvais goût de Nana. La comparaison « un air de palais » est péjorative car elle exprime l'artificialité de ce luxe factice. A cette critique est associée un jugement portant sur les mœurs de Nana et des hommes qui l'entretiennent, comme le prouvent les termes péjoratifs « rentière de la bêtise et de l'ordure des mâles ». Nana a réussi grâce à son vice mais surtout grâce à celui des hommes qui l'entretiennent et qu'elle peut manipuler. La condamnation morale ne concerne donc pas un seul individu mais le s hommes en général. Nana est un symptôme de la corruption morale qui atteint les plus hautes sphères de la société.

Pourtant Nana ne semble pas être un personnage uniquement négatif. Il s'agit d'une figure fascinante qui parvient à susciter une forme de sympathie à son égard. Cette ambivalence du personnage est rendue par l'oxymore « bêtise tendre » qui exprime la tendresse du narrateur pour Nana. Cette figure romanesque parvient en partie à échapper au déterminisme du milieu que voulait dénoncer l'auteur. Cette réussite est symbolisée par la reprise du motif de la vitrine : le s photographies de Nana « s'étalent aux vitrines », dans le premier paragraphe ; mais cela n'empêche pas la demi-mondaine de laisser des indices sur son origine sociale qui permettent de retrouver « l'ancienne fleuriste qui avait rêvé devant le s vitrines des passages ». Nana a donc réussi à changer de milieu mais ses goûts trahissent son passé. C'est elle qui influe sur le cadre dans lequel elle vit.

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