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Les Regrets, Sonnet 80

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Par   •  1 Décembre 2012  •  1 909 Mots (8 Pages)  •  2 366 Vues

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Ville pontificale, Rome est source de fascination pour les auteurs de la Pléiade, qui voient en elle le symbole de la grandeur antique et l'incarnation des débuts de ce qui sera appelé plus tard la Renaissance. Joachim Du Bellay, l'un des noyaux de ce courant poétique du XVIe siècle, se rend à la capitale italienne en 1553, pour y exercer le métier de secrétaire de son cousin ambassadeur, et en revenir en 1557, totalement désillusionné par la cité romaine. Ces quatre ans passés en Italie sont en effet source de désenchantement pour le poète ; celui-ci s'en inspire pour écrire quatre recueils de poèmes qu'il publie à son retour à Paris, parmi lesquels Les Regrets, dont nous allons étudier le sonnet 80. Le recueil est construit en trois parties : la première est élégiaque, la deuxième, satirique, et la troisième, élogieuse. Le sonnet qui nous intéresse ici se trouve dans le tiers à dominante satirique (des sonnets 57 à 136). Du Bellay nous annonce dans les sonnets 77 à 79 son intention de nous présenter la Rome moderne telle qu'il la perçoit, à savoir corrompue, et bien loin de la perfection antique. Le sonnet 80 est donc la description de cette Rome nouvelle.

Il s'agira donc d'étudier la façon dont Du Bellay dépeint la ville qu'il considère comme son lieu d'exil, tout d'abord en soulignant la place du poète et de sa déambulation, puis en analysant, sinon la satire, du moins la critique de la société romaine du XVIe siècle. Enfin, nous verrons comment la critique de la Rome nouvelle permet au poète d'évoquer avec regrets la Rome antique.

Tout au long des quatorze alexandrins qui composent le sonnet, le poète est omniprésent. On relève en effet la première personne du pronom personnel sujet deux fois par strophe, voire trois fois en ce qui concerne le premier tercet : la présence de l'auteur est à son apogée dans le distique, avec ces trois occurrences du « je ». La description qu'il fait de la ville de Rome est donc une description très personnelle, et se fonde même sur un ressenti sensoriel, comme le montrent le nom « bruit » (v.3), impliquant une dimension auditive à la perception qu'a le poète de la ville, et l'adjectif « rouges » (v.4), qui souligne l'importance de la vue dans cette même perception. De plus, accompagnant presque systématiquement le pronom « je », le verbe « trouve » est toujours placé de manière à être mis en valeur (à la césure au vers 6, en début de vers 10, et à la rime au vers 13). Il faut d'ailleurs souligner la transformation du verbe « trouver » au vers 13, qui devient « treuve » afin de rimer avec « neuve » ; cette transformation contribue d'autant plus à attirer l'attention sur la découverte du poète. Cette répétition verbale ne fait que corroborer l'idée d'une description personnelle, puisqu'elle laisse entendre que Du Bellay s'appuie sur sa propre expérience. Il se place ainsi en spectateur, en témoin des faits et événements de la ville, ce qui lui donne une crédibilité dans son tableau de Rome.

Sa manière d'appréhender la ville est d'une certaine façon géographique : on assiste en effet à une marche du poète. Celle-ci est marquée par la présence de verbes de mouvements (« je monte » v.1, « je descends » v.5, « je vais » v.9, « je passe » v.12, « entre » v.13), qui rythment le sonnet en introduisant chaque strophe. Les adverbes locatifs intensifiés « plus avant » et « plus outre » (v.9 et 12) ajoutent à cette impression de promenade, en lui donnant un caractère insistant, comme si Du Bellay, décidé, persistait à avancer. Cette marche s'apparenterait en fait plutôt à une longue déambulation, en quête de quelque chose. En effet, le sonnet n'est constitué que d'une seule et unique phrase, qui s'étire sur ses quatorze vers, avec des pauses marquées par les deux points concluant les trois première strophes, et une abondance de virgules, qui appuient sur la longueur, donnant une dimension lancinante à la marche. Le poète parcourt ainsi Rome, errant au gré de ce dont il est témoin. On retrouve donc bien ici l’aspect de carnet de voyage que veut donner Du Bellay à son recueil, ou, comme il le dit dans la pointe du premier sonnet, de « papiers journaux ou bien de commentaires ».

Le regard du poète est donc extrêmement présent dans sa description de Rome ; loin de pratiquer l'éloge, nous allons voir qu'il en fait une critique virulente.

Du Bellay construit son sonnet sur un système rhétorique marqué. En effet, chaque strophe repose sur une structure anaphorique, puisque chacune d'entre elles est introduite par la conjonction de subordination « si ». Au-delà de la simple anaphore, le sonnet est donc construit sur la récurrence d'un même modèle logique : « Si je […], je trouve [...] », c'est-à-dire des relations de subordination circonstancielle de condition. La description de la ville de Rome est ainsi cadencée par des propositions hypothétiques, qui, associées à l'idée de mouvement, donnent l'impression que le poète a beau parcourir les quatre coins de la ville (puisque quatre strophes), il n'y trouve que le mal. En effet, la déambulation de Du Bellay aboutit à une vision très négative de la ville italienne. Dans le premier quatrain par exemple, la proposition hypothétique est accompagnée par la locution restrictive « ne...que », qui revient dans le dernier tercet, mise en valeur par l'enjambement (« je ne treuve/Que »), et qui permet ainsi de conclure le sonnet en répondant au début. Cette formulation restrictive montre le mépris de l'auteur face à ses découvertes, d'autant plus que le premier quatrain repose sur une accumulation de compléments d'objets directs construite sur la répétition de « que » (« qu'orgueil,/Que vice déguisé, qu'une cérémonie,/Qu'un bruit de tambourins, qu'une étrange harmonie »). On retrouve également une accumulation de COD, cette fois-ci libérée de la locution restrictive, tout au long du deuxième quatrain. De cette façon, Du Bellay souligne fortement

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