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Le misanthrope

Commentaire de texte : Le misanthrope. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  28 Novembre 2021  •  Commentaire de texte  •  5 051 Mots (21 Pages)  •  231 Vues

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Le Misanthrope – Molière (commentaire composé)

        Le Misanthrope ou l’atrabilaire amoureux est une comédie de caractère en cinq actes et en alexandrins écrite par Molière durant l’année 1666. Elle met en scène une société ambitieuse, avide et cynique dans laquelle évoluent plusieurs personnages dont deux radicalement ambivalents : Alceste, qui déteste ses semblables et ne leur pardonne rien (« misanthrope » a une racine grecque : mis qui signifie haïr et anthropos, homme) ainsi que Philinte, son ami, qui lui est mesuré et sage, défini comme un « honnête homme ». Les personnages aux traits de caractères marqués sont récurrents chez  Molière, avec les exemples connus de Tartuffe ou d’Arnolphe. L’auteur met souvent en opposition un personnage qui incarne la sagesse, la réflexion et la mesure à un personnage davantage marginal dans sa personnalité. Lorsque Molière présente Le Misanthrope, il est dans une situation difficile sur plusieurs plans : familial, professionnel et de santé. Aussi, il ne parvient plus à supporter les gens autour de lui, que ce soit les médecins qu’il trouve incompétents, les courtisans qu’il considère fourbes et intéressés et les gens d’Eglise qu’il désigne comme des « faux dévots », directeurs de conscience. Le regard qu’il porte sur son siècle est âcre et désenchanté à l’image de la Bruyère ou Boileau. Dans cet extrait, Alceste fait état de sa haine pour le genre humain, caractérisé par la duplicité et les faux-semblants. Dès la scène d’exposition, le misanthrope conteste avec emportement face à son ami Philinte l’hypocrisie qui caractérise les rapports sociaux des courtisans. Au cours d’un long débat animé, le sage et réaliste Philinte plaide de son côté la modération. En quoi cette scène d’exposition donne-t-elle déjà l’occasion d’une critique acerbe sur la société du XVIIe siècle, contemporaine à l’auteur ? Nous dresserons dans un premier temps le portrait des deux personnages en question. Les éléments relatifs à l’exposition théâtrale feront l’objet d’une deuxième partie. Enfin, nous conclurons sur cette dénonciation farouche de l’hypocrisie qui gangrène la société de cette époque.

        I. Deux personnages, deux caractères, deux « humeurs »

        Dans la scène première de l’acte premier, Alceste se dispute avec son ami Philinte : il lui reproche d’être hypocrite et d’entretenir des relations uniquement par intérêt. Philinte se défend comme il le peut en évoquant l’étiquette et les concessions nécessaires à une bonne vie en société.

        A. Alceste l’atrabilaire

        La scène d’exposition débute par une question posée par Philinte : « Qu’est-ce donc ? Qu’avez-vous ? » Cette interrogation, qui pique d’emblée la curiosité du spectateur, laisse sous-entendre que l’action a déjà commencé avant que le rideau ne se lève. Deux personnages sont présents sur scène : Alceste et Philinte. Un évènement, que le spectateur ignore donc, s’est déroulé et amène Philinte à interroger Alceste. L’explication de la colère de ce dernier viendra plus loin. On comprend alors qu’il est témoin d’un comportement de Philinte qu’il réprouve : « Je vous vois accabler un homme de caresses […] A peine pouvez-vous dire comment il se nomme ». L’utilisation du verbe de perception « voir » permet à Alceste, par une mise en abyme du théâtre, de devenir lui-même spectateur, mais également de restituer au public l’évènement qu’il a manqué. Les évènements qui précèdent le début de la scène 1 sont ainsi relatés après-coup. Alceste désapprouve le comportement de Philinte qu’il condamne vivement : Philinte a fait preuve d’hypocrisie en traitant en ami un homme qu’il connait à peine. Cependant, le réquisitoire d’Alceste perd progressivement en légitimité : Alceste est emporté, excessif, colérique. Il s’énerve, il râle, il ne peut faire preuve de modération. Il se présente comme têtu, il ne démord pas de ce qu’il dit et il ne change jamais d’avis. Il est donneur de leçon et refuse les défauts des hommes à l’excès. Il est ridicule : il est toujours dans l’excès avec ses propos extrêmes. Il jure et a des gestes brusques. Le spectateur aurait presque pitié pour lui et Alceste se positionne dès lors comme un vrai personnage de comédie. Il tend même à cristalliser une forme de tragi-comédie : il dit des sottises qui le rendent comiques mais il peut également avoir raison alors qu’on se moque de lui. Enfin, Alceste a un caractère puéril, au sens propre : goût de provoquer les autres, de dire non à tout, de dire le contraire de tout le monde. Rappelons qu’une des spécificités du théâtre passe par le langage. C’est le lieu d’une peinture approfondie de la psychologie de l'âme, de l'intériorité des personnages. Toute parole au théâtre est intentionnelle, surtout les premières répliques. On remarque qu’Alceste parle à la première personne du singulier, un procédé suremployé (6 fois en 3 vers). Déjà, Alceste choque dans cette société où le « moi » est haïssable. Il utilise un discours injonctif : il est autoritaire, donne des ordres, des leçons : « laissez », « rayez ». On note une abondance des modes impératifs et subjonctifs. De plus, Alceste emploie l'hyperbole : « mourir de honte », « scandalisé », « accablé de caresses », « fureur de vos embrassements ». Il y a donc  surcharge dans le discours de ces métaphores excessives. Ce sont là des formes qui expriment l'authenticité du personnage, mais en décalage avec les valeurs classiques, qui sont la mesure et la retenue. Alceste est incapable d'euphémisme, de litote, pourtant forme idéale. Philinte dira à peine plus loin : « la parfaire raison fuit toutes extrémités ». Par ailleurs, le discours d’Alceste peut paraître affectif. Cet homme est un sensible, proche du baroque ou romantique, mais il n'est pas de son temps. Enfin, son vocabulaire restitue trop les anciennes valeurs : « tout hommes d’honneur », « abaisser son âme »… Alceste est un nostalgique des vertus antérieures de la chevalerie. Il tend lui-même à justifier le nom d’atrabilaire : « J’entre en une humeur noire, en un chagrin profond, / Quand je vois vivre les hommes comme ils font. » L’excès de la bile noire confère à Alceste ce tempérament hostile, cette aversion pour les autres. Ses réactions, ses propos sont sans cesse exagérés. Il y a bien dérèglement de l’humeur : « mourir de pure honte », « scandaliser », « une chose indigne, lâche, infâme, / De s'abaisser ainsi, jusqu'à trahir son âme » (à noter l’énumération, voire la gradation), « pendre tout à l’instant ». Philinte évoque d’ailleurs de « brusques chagrins » en évoquant son ami.

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