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Le Rapport Entre Therese Raquin Et Le déjeuner Sur L'herbe

Dissertation : Le Rapport Entre Therese Raquin Et Le déjeuner Sur L'herbe. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  17 Novembre 2014  •  1 042 Mots (5 Pages)  •  2 353 Vues

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La peinture de Manet a provoqué en son temps une fascination/répulsion comparable au tableau impudique des chairs en décomposition exposées à la Morgue. En 1863, le critique Paul de Saint-Victor reprenait une opinion assez unanimement partagée lorsqu'il écrivait dans le journal La Presse : « La foule se presse comme à la morgue devant l'Olympia de M. Manet. » Zola lui-même voyait dans Le Christ mort et les Anges « un cadavre peint en pleine lumière, avec franchise et vigueur ». Dans sa préface à la deuxième édition de Thérèse Raquin, il assimile explicitement le désaveu de son art à celui que subissait alors Manet : « Je me suis trouvé dans le cas de ces peintres qui copient des nudités, sans qu'un seul désir les effleure, et qui restent profondément surpris lorsqu'un critique se déclare scandalisé par les chairs vivantes de leur œuvre. » C'était le cas avec Louis Ulbach, qui avait expressément dénoncé dans son article sur « la littérature putride » une « éloquence du charnier » et établi le rapprochement entre Zola et l'auteur d'Olympia : « Il voit la femme comme M. Manet la peint, couleur de boue avec des maquillages roses. » Loin de s'indigner de cette fraternité dans l'opprobre, Zola semble l'avoir revendiquée hautement. Le romancier a manifestement conçu Thérèse Raquin comme un hommage au peintre. Henri Mitterand a déjà signalé que les descriptions du personnage féminin ont parfois des airs de ressemblance avec les tableaux du jeune maître de la peinture naturaliste. Au ch. I, le profil de Thérèse, « d'une blancheur mate, troué d'un œil noir largement ouvert » et ses lèvres comme « deux minces traits d'un rose pâle » rappellent Lola de Valence (1862). Le chat François, associé à sa maîtresse, était déjà perçu à l'époque comme un signe de ralliement à Olympia, comme un emblème provocant. Léon Laurent-Pichat écrivait par exemple le 18 juin 1868, à propos du chapitre sur la nuit de noces : « Cette chambre à coucher renferme toutes les horreurs, jusqu'au chat de M. Manet qui jusqu'à ce jour n'avait figuré que dans la peinture. » Mais la transposition militante ne s'arrête pas là. Le chapitre XIII du roman, consacré au spectacle de la Morgue, peut aussi être lu comme un hommage du romancier au peintre. Les scènes observées par le personnage principal, spectateur complaisant et peintre lui-même, ou celles qui sont évoquées par le narrateur omniscient, sont placées comme dans une galerie pour une exposition. Les (corps) nus apparaissent d'abord comme des « taches vertes et jaunes, blanches et rouges ». La « nudité du plâtre » qui recouvre le mur du fond du pavillon figure la toile sur laquelle ces taches composent le tableau. En 1866, dans le journal L'Événement, Zola a présenté la peinture de Manet comme une harmonie nouvelle et soutenue de taches de couleur. Selon lui, le peintre « s'est mis courageusement en face d'un sujet, il a vu ce sujet par larges taches, par oppositions vigoureuses, et il a peint chaque chose telle qu'il la voyait ». L'art de Manet est ainsi pour Zola un courageux réalisme. Manet peint « les objets et les êtres dans l'air où ils baignent, tels qu'ils se comportent, simples taches souvent que mange la lumière ». La Morgue est cette métaphore de l'ascèse artistique qu'exige

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