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Le Prince Machiavel

Commentaire de texte : Le Prince Machiavel. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  27 Janvier 2022  •  Commentaire de texte  •  2 270 Mots (10 Pages)  •  656 Vues

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Commentaire sur Le Prince, Machiavel Nicolas

En quoi, à travers une réflexion politique innovante, Machiavel pose la question de la justification des moyens par la fin ?

Introduction : une œuvre de précepteur

Composé pendant une époque particulière de la carrière de Nicolas Machiavel où celui-ci vient d’être démis de ses fonctions de secrétaire de la chancellerie de Florence, après la chute de cette république et, en 1512, la défaite des troupes qu’ils a contribué à lever pour reconquérir Pise, Le Prince a vite été reconnu comme l’œuvre initiatrice de la philosophie politique moderne, un siècle et demi avant son plus illustre fondateur, Thomas Hobbes. La critique universitaire actuelle les associe d’ailleurs, à l’instar de Pierre Manent, qui les caractérise ainsi : « Machiavel théoricien de l’action politique, Hobbes théoricien de l’institution », même si l’auteur de la célèbre maxime « l’homme est un loup pour l’homme » parait en avoir adouci les préceptes.

Cette œuvre apporte un enseignement. Elle est écrite par un auteur contraint par une régulation brutale mais temporaire : les chapitres du livre ne sont pas dédiés, sauf pour celui concernant la cour du Roi, dédiée à Laurent II de Médicis.

(C’est bien un enseignement d’une sorte de précepteur que constitue cette courte œuvre d’un diplomate contraint à une régulation brutale mais qui sera temporaire : de brefs chapitres articulés comme des leçons à un prince non désigné sauf dans la dédicace courtisane, classique pour l’époque, à Laurent II de Médicis.)

A partir d’une typologie des différents états, dans les premiers chapitres de l’ouvrage, pour l’essentiel des monarchies y compris des nouvelles (chapitre VI (6) et VII (7) ), des « civiles » (chapitre IX (9) ), insistant sur la nécessaire puissance de l’État (y compris pour la loyauté, chapitre XI (11) ), Machiavel s’interroge sur le rôle indispensable des armées dans l’établissement du pouvoir du prince (chapitre XII (12) à XIV (14) ), pour en condamner le choix du mode mercenaire et lui préférer celui de la conscription.

Mais ce sont les chapitres suivants que la philosophie et la critique universitaire ont consacrés sur les relations de prince avec ses sujets et alliés (Chapitre XV (15) à XIX (19) ), la réflexion finale sur les remèdes à la décadence de l’Italie étant précédée d’un chapitre XXV (25), brillant, sur les rapports entre le gouvernant et la fortune (fortuna). Ces derniers textes seront l’objet du présent commentaire.

I- Des préceptes fondateurs du « machiavélisme », ancrés sur l’implacable réalité

  1. La nouveauté de la réflexion machiavélienne (chapitre XV)

La grande nouveauté de l’enseignement de Machiavel, qui se veut « utile à qui l’écoute », réside essentiellement dans l’acceptation du réel et de la vérité des faits : rompant il rompt avec les traités classiques courtisans destinés à flatter le prince sur les qualités qu’on lui prête ou qu’on lui recommande d’adopter, Machiavel les expose dans le chapitre XV 15 : générosité, loyauté, courage, intégrité, miséricorde, sens de l’humain, chasteté même… Cependant la liste des vertus à pratiquer est si longue qu’avec ce même réalisme « nouveau » dans l’appréciation des faits, il reconnait qu’il est impossible de rassembler toutes ces qualités sur un même homme, « du fait de la condition humaine qui ne le permet pas ».

Si cet aveu permet aux précepteurs d’être mieux écoutés par le prince, au nom de ce que l’on nommerait aujourd’hui le « pragmatisme » des gouvernants, ce n’est pas en cette idée que le chapitre XV peut apparaitre novateur.

En effet, les dernières phrases de celui-ci ouvrent une toute nouvelle voie : s’il existe des vices dangereux pour le prince, l’exercice d’autres vices sont absolument indispensables pour lui permettre de « sauver son pouvoir », alors que la pratique de certaine vertu « sera sa chute ». Le dernier membre de la phrase finale du chapitre est éclairant : « on trouvera telle chose (…) qui semblera un vice et qui, à la pratiquer, lui procure sécurité et bonheur ». Sans l’exprimer plus clairement, Machiavel exonère ainsi le prince de toute condamnation morale afin de lui permettre de maintenir son pouvoir et sa réputation.

2. L’application aux vices « ordinaires » : parcimonie, cruauté (chapitre XVI et XVII)

Le cas de la « libéralité » (ou générosité) et de la parcimonie est ici aisément traité au chapitre XVI 16 : pratiquée « vertueusement », la générosité « n’est pas connue » du peuple et ne peut être attribué au prince comme qualité. En revanche, des dépenses somptuaires imposent au prince de taxer lourdement ses sujets, « ce qui le rendra odieux » à ceux-ci. Machiavel ajoute implicitement à ce raisonnement le fait que le peuple « estimera peu » son prince, « puisqu’il devient pauvre ». L’ex-secrétaire de Florence renforce son argument en citant l’exemple de Louis XII 12, qui « a fait de si nombreuses guerres sans imposer une taxe extraordinaire aux siens, parce qu’il a subvenu aux dépenses superflues par sa longue parcimonie ». Renforçant sa pensée, Machiavel ajoute : « un prince doit faire peu de cas d’encourir le nom de ladre, car c’est l’un des vices qui le fait régner. ». César en est un autre exemple.

Machiavel renforce encore son raisonnement en apportant une distinction importante entre « l’argent des autres », celui acquis par guerre et conquête, avec celui de ses sujets : dans ce second cas « il doit être économe, dans l’autre il ne doit négliger aucune libéralité », notamment, quand il s’agit de récompenser ses troupes.

Dans le second exemple, celui de la cruauté et de la pitié (au chapitre XVII 17), Machiavel impose l’idée que la cruauté a pu être facteur de paix et de confiance, à l’exemple de César Borgia pour la Romagne, et à l’exemple inverse de Florence qui « pour fuir le nom de cruel, laissa détruire Pistoia ».

S’attachant à la spécificité du cas du prince « nouveau », il l’exonère du reproche de cruauté et installe le primat absolu de l’ordre qui doit régir dans le pays, considérant que les rigueurs du prince ne doivent tomber que sur des particuliers. Sur cette question, le primat corollaire de celui de l’ordre du pays est celui de la sureté du prince, (« il est plus sûr d’être aimé que craint » note-il), détrompant ainsi les politologues classiques qui font croire au prince qu’il pourrait posséder indéfiniment l’autorité de son peuple.

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