La dernière Tempsor

La

Dernière

Tempsor

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Un « toc toc » sonore réveilla en sursaut Evelyn, Jordan et Christopher. Une femme au regard sombre ouvrit une vielle porte fissurée et entra dans la pièce. C’était une petite chambre miteuse avec pour seul mobilier un lit, une armoire et un bureau.

• Encore vous trois ? Si je vous vois encore une fois à trois dans la même chambre, je vous enfermerai dans vos chambres respectives, seuls, et je ne vous libèrerai qu’au moment où vous prendrez vos douches !
• Pourquoi êtes-vous venue ? demanda Evelyn, soucieuse de  changer de sujet.
• Parce qu’une gentille dame souhaite vous voir quand elle arrivera. Et elle ne devrait plus tarder maintenant.
• Une visite ? Pour nous ? demanda Jordan, étonné.

Ils n’avaient jamais eu une seule visite.

• Oui. Alors ? Qu’est-ce que vous attendez ? Allez vite vous préparer !
• Oh oui, bien sûr Madame !dit Evelyn, à présent toute excitée. Si vous voulez bien m’excuser, dit-elle en passant sous le bras de la gouvernante qui s’était appuyée sur le chambranle de la porte.

Evelyn, imitée par Chris, se précipita dans sa chambre pour se coiffer et s’habiller. Elle enfila rapidement son uniforme, coiffa ses longs cheveux bruns en une tresse de côté et y accrocha une barrette en forme de petit panda.  C’était à la base une toute petite peluche qui appartenait à son petit frère. Mais à présent lui non plus n’était pas à ses côtés. Lui comme ses parents étaient partis rejoindre les étoiles, et elle était toute seule. Elle ne s’en plaignait jamais, car elle avait les meilleurs amis du monde. Ils étaient très complices, et s’entendaient à merveille. Jordan et Chris étaient arrivés bien avant elle, mais elle les avait rapprochés et elle avait développé leur imagination. Depuis, toutes les nuits, ils avaient tous les trois des réunions secrètes pour inventer de nouvelles histoires. Elle mit ensuite le médaillon de sa mère, ses mitaines et prépara son sac, en cas d’une éventuelle adoption. Elle trouvait ça étrange qu’une seule et même personne veuille les voir tous les trois, mais elle n’avait plus le temps de réfléchir. La gouvernante les appela depuis le rez-de-chaussée. Evelyn et ses amis descendirent les escaliers moisis, excités et tendus, joyeux et terrifiés. La femme qui allait peut-être changer leurs vies était tellement près d’eux !

• Laissez-moi vous présenter Marta Jopker. C’est elle qui souhaitait vous voir. Dites poliment bonjour s’il vous plaît.
• Bonjour Mme Jopker ! dirent les enfants en chœur.
• Bonjour les enfants ! répondit-elle d’un sourire hypocrite.

Evelyn l’observa plus en détail ; elle était vieille, petite et replète. Elle avait tout d’une gentille mamie, mais Evelyn trouvait qu’elle avait une lueur folle dans ses yeux sombres. La gouvernante les présenta à leur interlocutrice.

• Bien, Mme Jopker, je vous présente Christopher. Il a quatorze ans, et il est arrivé ici à l’âge de quatre ans. Ses parents sont morts dans un accident de voiture. Et voici Jordan. Il a le même âge que Chris et il est ici car sa mère est morte à sa naissance, et son père est mort d’un cancer trois ans plus tard. Il est arrivé ici quand il avait trois ans. Et enfin, voilà Evelyn. Elle a treize ans. Ses parents et son petit frère sont morts dans un incendie. Elle est arrivée ici à neuf ans.
• Ravie de vous rencontrer les enfants ! dit Marta. Vous formez un charmant trio.
• Remontez tous les trois, dit sèchement la gouvernante. Je vais discuter avec Marta.

Les enfants remontèrent les escaliers en silence, déçus et angoissés. Ils allèrent s’installer dans la chambre de Chris et parlèrent de Mme Jopker.

• Dites. Qu’est-ce que vous en pensez de cette Marta ? demanda Evelyn en chuchotant.

Ils ne voulaient pas prendre le risque de se faire entendre par la gouvernante et Marta.

• Je ne sais pas vous, mais je trouve qu’elle a l’air un peu… bizarre, dit Chris.
• Je trouve aussi, dit Jordan. D’ailleurs, je n’ai toujours pas compris pourquoi elle nous a voulu nous voir « tous les trois ».
• Peut-être qu’elle a de bonnes raisons… Peut-être que la gouvernante lui a dit que nous étions inséparables ? suggéra Evelyn sans vraiment croire à ce qu’elle disait.

Chris haussa les épaules.

• Tu connais la gouvernante autant que nous ! Elle ne ferait jamais une chose pareille pour nous…

Leur discussion s’arrêta là. Un cri de la fameuse gouvernante les coupa et ils durent descendre une fois encore les escaliers.

• Bien. Les enfants, j’ai une fabuleuse nouvelle pour vous ! Mme Jopker est apte à vous adopter tous les trois ! les informa la gouvernante, visiblement ravie de voir ces orphelins s’en aller. Je vais régler les dernières formalités avec Marta, et pendant ce temps, vous irez préparer vos sacs. Un mot pour Mme Jopker et vous remontez.
• Je serais enchanté de venir vivre avec vous Mme Jopker, dit Chris avant de monter dans sa chambre.
• J’ai hâte de faire plus ample connaissance avec vous, Mme Jopker, dit Jordan avant d’imiter Chris.
• J’espère que vous serez heureuse de savoir à quel point nous vous apprécions déjà Mme Jopker, dit Evelyn.
• Oh, comme c’est gentils les enfants ! Moi aussi j’ai hâte de vous connaître un peu plus. Bon allez, je vous attends dans la voiture, dit-elle.

Evelyn alla chercher sa valise, qui était très légère. Elle dévala les escaliers pour aller mettre son sac dans le coffre de la luxueuse voiture de Marta, puis elle alla aider ses amis à rassembler leurs affaires. Elle en profita aussi pour aller dire au revoir à la petite Noémie, une petite fille de l’orphelinat qui adorait ses histoires. Ils se rejoignirent devant le coffre, dans lequel ils rangèrent leurs valises.

• Je vous présente Albert, mon chauffeur, dit fièrement Marta. Vous pouvez monter à l’arrière les enfants.

Les trois adolescents s’assirent sur d’agréables sièges en cuir couleur crème. Une fois qu’ils furent tous installés, Albert démarra la voiture et le long trajet commença. Le décor restait le même, et le voyage se déroulait en silence. Les arbres, les maisons, les poteaux se succédaient, sans qu’il n’y ait de réels changements. Pour passer le temps, Evelyn se mit à écrire la suite de son histoire sur un petit carnet qu’elle gardait toujours dans sa poche. Mais les deux garçons s’ennuyaient beaucoup.

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