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La Bruyère, Les caractères, "Cliton"

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Par   •  29 Avril 2017  •  Commentaire de texte  •  3 341 Mots (14 Pages)  •  17 175 Vues

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Cours d’agrégation du mercredi 28 septembre 2016.

Littérature française : explication hors programme.

Les Caractères, La Bruyère, « Cliton ».

Introduction.

Entrée en matière.

        « Il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger ». Cette expression attribuée à Socrate signifie qu’il ne faut pas se laisser aller à la gloutonnerie. Elle sera reprise plus tard par Molière dans L’Avare (III, 1), et s’apparentera davantage à une diatribe dirigée contre l’avarice et sera prise dans un sens ironique.

        Période où la contestation politique doit savoir se dissimuler sous des écrits acerbes (La Rochefoucauld, Bossuet, etc.) et où la théologie devient inquiétante (Pascal, jansénisme), le XVIIe siècle inspire aux auteurs moralistes la sombre délectation avec laquelle ils ont sondé « les petitesses de la comédie humaine ».

        Ainsi des Caractères ou les mœurs de ce siècle de Jean de La Bruyère qui peint des personnages sous couvert de noms fantaisistes, comme « Cliton » au chapitre XI « De l’homme », qui a la particularité d’être un des chapitres regroupant les portraits. LECTURE.

Caractérisation.

Sujet.

        Ainsi, le thème des Caractères de Jean de La Bruyère s’inscrit dans cette perspective de blâme à travers l’écriture de portrait qui permet de réfléchir à la question de l’homme au XVIIe siècle. Le titre du chapitre XI, « De l’homme », se place dans ce contexte. Notre extrait s’intéresse à un personnage dénommé Cliton, auquel le narrateur reproche sa gourmandise, un des sept péchés capitaux : il donne en quelques lignes l’image de la vie de ce personnage fictif.

Forme.

        Le texte est une description en prose, un portrait : la disposition typographique souligne l’unité du passage. Le texte est structuré en deux phrases : la première, liée par juxtapositions successives (points virgules), fait le portrait en lui-même (> le rythme ample et lourd des propositions participent à créer le ton ironique) ; la seconde est une forme de conclusion qui vient mettre un jugement final sur le portrait brossé (> fin abrupte). En outre, il est délimité par deux termes entre lesquels s’établit une relation d’équivalence au cours du texte : « Cliton » (nom propre < grec clitos, penchant) et « manger » (verbe à l’infinitif).

        Mais surtout le texte relève du sous-genre du caractère, particulièrement répandu aux XVIIe et XVIIIe siècles : la scène des portraits dans Le Misanthrope de Molière (II, 4) le montre : « Timante, encor, Madame, est un bon caractère » (v. 585, p. 838) => il s’apparente donc davantage à un blâme qu’à un éloge, comme le sens étymologique de marque distinctive le rappelle.

        Au point de vue formel, on peut également interroger la brièveté de ce caractère qui s’apparente davantage à un fragment, c’est-à-dire à une unité autonome et un élément s’inscrivant dans un recueil, dans une galerie de portrait plus large et un ensemble de maximes.

Tonalité.

        Ironique. La caricature s’exprime en un style spontanément baroque. Rien n’est jamais attendu : pas plus la dissonance que l’accord et la variation du burlesque au tragique. Plaire et instruire, telle est la devise du moraliste.

        L’intention satirique de l’extrait se traduit dans le texte par des effets d’ambiguïté (facilement repérables).

Problématique et mouvement.

        Comment le portrait d’un personnage monomaniaque aboutit-elle par sa dimension satirique et hyperbolique à une réflexion morale sur l’Homme ?

Développement.

Premier mouvement : un portrait comique (l. 1 – l. 14).

Premier temps : un repas rabelaisien (l. 1 – l. 8).

Lignes 1 – 2.

        « Cliton » : rappel de l’étymologie grecque < penchant. Le prénom n’est cité qu’une seule fois, en position liminaire et d’attaque : c’est l’anaphore pronominale « il » (24 occurrences) qui assure la cohérence transphrastique.

        Négation restrictive + valeur péremptoire + passé composé + expression figée « toute sa vie » ➔ une forme de bilan qui annonce déjà en creux la mort du personnage dans les dernières lignes.

        Proposition subordonnée relative : coordination qui exprime une redondance entre « dîner le matin » et « souper le soi » (NB : dîner renvoie au premier repas pris dans la journée) ➔ contradiction avec les « deux affaires » qui se ressemblent fortement. L’emploi du verbe être au singulier « est » (au lieu du pluriel « sont » avec l’antécédent syntagme nominal au pluriel « deux affaires ») montre que ces deux activités absorbent tellement le personnage qu’elles ne font plus qu’une.

        Le commentaire qui suit est faussement modalisateur : il faut entendre « il est certain ». Le nom de « digestion » est mis en avant par sa position en fin de période (précédant le point-virgule) et s’inscrit dans l’isotopie de la nourriture qui sature (déjà) le texte (dîner, souper, digestion) en renvoyant à l’activité orale par le biais des fonctions physiologiques qui lui sont rattachées.

Lignes 2 – 4.

        « il n’a de même qu’un entretien » : le terme entretien désigne ici les sujets de conversation ➔ la négation restrictive en ne…que souligne l’obsession du personnage pour la nourriture.

        Les deux propositions poursuivent la logique anaphorique par la reprise du syntagme verbal « il dit », dans une forme de discours narrativisé. S’en suit une longue énumération qui rend compte du côté gargantuesque de Cliton.

        « il dit les entrées qui ont été servies au dernier repas où il s’est trouvé » : pluriel + adjectif relationnel dernier suggère le nombre important de ces repas (+ référence biblique > accepter cette hypothèse renforce le comique burlesque du passage en retirant tout côté solennel au dernier repas du Christ) + PSR où il s’est trouvé ajoute une dimension de hasard et coïncidence à la présence de Cliton à ce repas.

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