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La Bruyère, Caractères

Dissertation : La Bruyère, Caractères. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  11 Janvier 2018  •  Dissertation  •  1 657 Mots (7 Pages)  •  1 360 Vues

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On concevrait mal une littérature dans laquelle l’homme serait absent au moins comme héros ou personnage. Mais les moralistes font un pas de plus : pour eux c’est un objet d’étude : ils s’interrogent sur sa nature, ses motivations, son comportement, sa façon d’être en somme. Ils décèlent éventuellement chez lui des contradictions et les analysent. Ce fut le cas dès l’Antiquité, avec des fabulistes comme Esope, des philosophes comme Sénèque ou Théophraste, qui a lui-même écrit des Caractères où il dénonce les défauts des hommes. On retrouve cette tendance dès le 16ème siècle et le 17ème avec Montaigne, Pascal ou encore La Fontaine.

A la même époque, La Bruyère, dans ses Caractères se penche aussi sur la question de l’homme : « Ne nous emportons point contre les hommes en voyant leur dureté, leur ingratitude, leur injustice, leur fierté, l’amour d’eux-mêmes, et l’oubli des autres : ils sont ainsi faits, c’est leur nature, c’est ne pouvoir supporter que la pierre tombe ou que le feu s’élève ».

A travers ces paroles, La Bruyère nous demande de pardonner à l’homme cet égoïsme naturel qui l’étreint face à des puissances trompeuses, représentées par les images de la pierre qui tombe, ou du feu qui s’élève. Il semble expliquer et excuser les défauts de l’homme par sa faiblesse. La Bruyère semble s’accorder sur la pensée de ses homologues, quant aux faiblesses et aux erreurs humaines. Nous pouvons donc naturellement penser que son jugement peut enrichir nos lectures traitant de la question de l’homme.

Mais La Bruyère résume-t-il pour autant, en ce seul extrait, toutes les problématiques liées aux œuvres qui traient ce sujet ?

Dans un premier temps, nous prolongerons la réflexion de La Bruyère concernant les défauts de l’homme, puis nous verrons si l’indulgence qu’il affiche est partagée par d’autres moralistes. Finalement, nous nous demanderons si cette vision de l’homme, rendu mauvais par son incompréhension de forces qui l’écrasent, est forcément judicieuse et complète.

  1. La Bruyère dénonce les défauts de l’homme

La Bruyère dénonce des défauts de l’homme, mais lesquels ? Et sont-ce les seuls ?

A travers son jugement, La Bruyère dénonce l’égoïsme des hommes. Il les qualifie de « fiers » et montre qu’ils cultivent « l’amour d’eux-mêmes ». Il met cette attitude personnelle d’auto satisfaction en opposition avec ses conséquences extérieures sur les gens et la société, ce qui se traduit par « l’ingratitude », « l’injustice », et « l’oublie des autres » dont ils font preuve. Il fait presque preuve de fatalisme disant que les hommes « sont ainsi faits » et que « c’est dans leur nature ». Ils n’y peuvent rien, et doivent faire avec.

Cet extrait des Caractères rejoint d’autres moralistes. En effet, on retrouve la même dénonciation de défauts ponctuels chez La Fontaine. Par exemple, dans la fable « L’enfant et le maître d’école », il décrit un homme imbu de lui-même, dont l’égoïsme se traduit par le fait qu’il préfère se gargariser de mots plutôt que d’aller à l’essentiel en tirant l’enfant hors de l’eau. La Fontaine dénonce donc l’égoïsme, le pédantisme, mais ne va pas plus loin. Comme bien des fabulistes de l’antiquité, il dénonce des défauts ponctuels, comme le goût pour la flatterie dans Le corbeau et le renard, ou l’injustice « la raison du plus fort est toujours la meilleure ». On peut remarquer que la comédie chez Molière par exemple joue un rôle analogue : la dénonciation des femmes savantes ou de l’avare.

Selon Pascal, depuis la chute, et la disparition de Dieu au regard des hommes, ces derniers ont retourné tout l’amour qu’ils avaient pour lui, envers leur propre personne. L’homme est devenu vaniteux, victime de son impuissance face à toutes ces puissances inconstantes et trompeuses, telles que l’imagination ou la coutume, qu’il ne peut et ne pourra jamais maîtriser. Il dénonce aussi le fait que les hommes sont prisonniers de leurs humeurs personnelles ; l’amour, le matérialisme, le jeu et le plaisir, ou encore l’apitoiement sur soi. La futilité des hommes les mène à des contradictions, et au mensonge sur soi ; en effet, chez pascal, nous observons un homme constamment faux chez qui tout n’est que déguisement. On peut rapprocher son constat de celui de la Bruyère quand il nous montre la faiblesse des hommes (« que », « incapable », « incapables de vrai et de bien »).  Pascal, comme La Bruyère parle des hommes en général et relie leur vanité et ses conséquences (« effets effroyables », mensonges, contradictions) aux insuffisances de l’homme à qui la science, le vrai et le bien sont inaccessibles. On peut remarquer que les termes qui désignent les hommes sont uniquement négatifs, qu’il s’agisse de leur comportement ou de leur ignorance. Même l’humilité ou le doute sont suspects. Le lecteur peut être perdu devant un tel pessimisme. Tout comme chez La Bruyère, quand il dit que « c’est dans leur nature », et que les hommes « sont ainsi faits », on aboutit à une aporie, il semble n’y avoir aucune solution.

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