Jean Cocteau, La Machine Infernale, Acte 2 Scène2

Jean Cocteau est un écrivain, poète, dramaturge et réalisateur français du XXème siècle. Le suicide de son père, puis son échec au baccalauréat, le poussent vers la voie de l’écriture d’où naîtront ses premiers poèmes. Par la suite, les différentes rencontres qu’il fait avec des personnages importants de son époque (Picasso, Raymond Radiguet, Apollinaire, etc.) l’amènent à exercer ses talents dans d’autres arts, tels que le roman, le dessin, le cinéma, ou encore le théâtre. De plus, la mythologie exerça sur Cocteau une fascination fondamentale, au point de faire de lui l’artiste du XXème siècle pour lequel les mythes ont été la principale source d’inspiration. Une majorité de ses œuvres reflète cette inspiration, comme la pièce de théâtre La Machine infernale, jouée pour la première fois en 1934.

Cette pièce, inspirée d’Oedipe roi de Sophocle, se déroule en quatre actes, et relate le mythe d’Oedipe. En effet, selon l’oracle, Oedipe devait tuer son père et épouser sa mère. Celui-ci résout donc l’énigme du Sphinx, et n’échappe pas à l’oracle, faisant exploser la machine infernale des dieux.

L’extrait étudié, qui constitue la scène 2 de l’acte II intitulé « La rencontre d’Oedipe et du Sphinx », présente l’entrevue entre la Matrone, citoyenne, et le Sphinx, sous l’apparence d’une jeune fille.

Quelle autre vision du mythe, Jean Cocteau nous propose-t-il dans cet extrait ?

Dans un premier temps, nous nous intéresserons à l’écart fait par rapport mythe, puis nous étudierons le personnage de la Matrone, symbole du peuple.

Cocteau réalise donc dans cette scène un écart avec le mythe d’Oedipe et établit une vision différente des deux personnages : le Sphinx et la Matrone.

En effet, dans cette scène, le Sphinx quitte son apparence de monstre de la mythologie grecque et apparait sous les traits d’une jeune fille. Loin du mythe, celle-ci fait preuve d’une grande sensibilité à l’égard de l’autre personnage, avec qui elle discute, la Matrone. On peut d’ailleurs remarquer que toutes ses répliques sont des phrases interrogatives, ce qui lui confère un caractère curieux et ouvert. D’autre part, le fait que ce ne soit pas elle qui conduise le dialogue est en contradiction avec son comportement lorsqu’elle apparaît sous la forme du « monstre » mythologique. Ainsi, le personnage du Sphinx s’écarte du mythe dans cette scène.

De même, le personnage de la Matrone parait lui aussi être démythifié. Les personnages appartenant jusque là à la mythologie, sont remplacés ici par une simple citoyenne. Elle apparaît mère de trois enfants (quatre auparavant), au caractère ouvert : elle pousse la conversation « (fausse sortie) Eh… dites… » (l.1). De plus, la Matrone s’indigne ici contre le comportement de ses fils et représente donc une mère de famille en détresse : « impossible de s’entendre » (l.47-48), « la maison est devenue inhabitable » (l.45). Ainsi, la présence du personnage de la Matrone offre une vision différente et novatrice du mythe d’origine.

En outre, cette scène démythifiée représente également le peuple, incarné par le personnage de la Matrone.

Le matrone représente en effet les craintes et les angoisses du peuple envers le Sphinx. Dès le début de l’extrait, le champ lexical

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