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Commentaire De Texte: La Machine Infernal (pièce de théâtre) Acte 1 de Jean Cocteau

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Par   •  11 Janvier 2015  •  1 445 Mots (6 Pages)  •  3 339 Vues

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Introduction

Au xxe siècle, les écrivains « revisitent » les mythes antiques, en donnent une lecture inspirée par les préoccupations contemporaines et l’évolution des mentalités. Ainsi, Cocteau puise dans les tragédies de la Grèce antique le sujet de plusieurs de ses œuvres, notamment La Machine infernale (1934) dans laquelle il réécrit l’histoire d’Œdipe.

L’acte I, intitulé « Le fantôme », se déroule « sur les remparts de Thèbes », dans une atmosphère sinistre. Deux soldats témoins des apparitions du fantôme du roi Laïus assassiné par Œdipe rendent compte à leur « chef » de ce qu’ils ont vu. La scène évoquée par les soldats est une réécriture à la fois de l’Œdipe Roi de Sophocle et de la scène d’exposition d’Hamlet de Shakespeare.

Nous allons commencer par traiter un récit théâtral et pathétique, puis l’évocation d’une scène tragique, et nous finirons par

I. Un récit théâtral et pathétique

La scène racontée s’inspire de l’exposition d’Hamlet : le roi Laïus, assassiné comme le père d’Hamlet, réapparaît sous la forme d’un revenant. Mais Cocteau rend le récit des soldats particulièrement théâtral et pathétique.

1. Des circonstances et des effets propres à créer l’angoisse

• Le récit d’une scène nocturne (« L’autre nuit »), propice au mystère.

• Un lieu de surveillance qui suggère un danger ou un événement insolite.

• Un effet d’attente intensifié par le fait que ce n’est pas la première apparition (« comme les premières nuits ») : la répétition (« l’habitude ») crée l’attente (« Viendra/Viendra pas… » ; « on guettait/on se crevait les yeux »).

2. La mise en scène pathétique du spectre

• Les gardes soulignent la souffrance du personnage par leurs commentaires apitoyés sur ce « si brave fantôme », « le pauvre roi Laïus », le « pauvre fantôme » « perdu ». Ce sont aussi les propres paroles du spectre rapportées au style direct et dramatisées qui traduisent son désarroi, par leur modalité exclamative, leur syntaxe heurtée, leurs répétitions angoissées (« Je mourrai/ma dernière mort », « fini, fini », « Messieurs ! Messieurs ! », « Allez ! Allez ! »).

• Enfin, la souffrance morale du spectre est d’autant plus poignante qu’elle marque un renversement inédit et cruel des rôles : alors que les soldats, qui devraient être terrifiés, « n’[ont] plus peur du tout », c’est le fantôme qui paradoxalement semble « devenir fou » et « crève de peur ».

Notez bien

La théâtralité, ce sont les éléments qui permettent de mettre en scène. Demandez-vous toujours : que donnerait cet extrait sur scène ?

• Le jeu sur la vie (le revenant parle et a un comportement de vivant) et la mort (Laïus a bien été assassiné), dont on ne discerne pas la frontière, la succession des apparitions et des disparitions contribuent à la théâtralité du récit (« il ne sait plus disparaître », « suspendu entre la vie et la mort » jusqu’à ce que « la tache » finisse par « s’éteindre »).

II. L’évocation d’une scène tragique

[Transition] Mais le récit dépasse le simple pathétique ; il rappelle la tragédie grecque.

1. Le monde et la condition impitoyables des morts

• Un monde sans liberté. Des lois rigoureuses : « il peut aller » ; des interdits omniprésents : abondance de négations : « il ne peut pas, il ne devait pas » (deux fois), « il ne pourrait plus jamais » ; vocabulaire de l’interdit : « défendrait ». Complexité des lois rendue par la syntaxe embarrassée (« Il parlait […] apparaître »). Les morts sont comme des prisonniers.

• Un monde gouverné par un ordonnateur sans identité et mystérieux : pronom « on » sujet des verbes d’action (« allait, « défendrait »).

• Les notions de faute (soulignée par le passé composé « il s’est rendu là où il ne devait pas » et par la métaphore « il a quitté son poste ») et de punition (« punir ») au cœur du désarroi du spectre.

• L’existence du spectre (mort) est fragile, marquée par la brièveté, l’instabilité.

2. Une menace sans visage, une situation d’urgence

• Le sentiment du tragique naît aussi de l’évocation d’une menace certaine, d’autant plus pleine de mystère qu’elle est indéfinie : la répétition en groupe ternaire lyrique de l’expression vague « une chose », associée à des mots terrifiants (« atroce », « de la mort ») ou à une négation (« qu’il ne peut pas expliquer ») intensifie l’angoisse, parce que cette « chose », image de la fatalité, n’a pas de visage.

• Le discours du spectre est marqué par la même imprécision oppressante : la phrase « Prévenez la reine ! » tourne court : il y manque un complément d’objet indirect qui préciserait la teneur de la nouvelle à annoncer. Le spectateur ne sait pas non plus pourquoi il faut « cherche[r] Tirésias », le devin, peut-être capable d’élucider la menace, ni en quoi consiste le « secret ».

• L’urgence de la situation intensifie la tension tragique : à plusieurs reprises, Laïus souligne que le temps presse, soit explicitement (« Il n’y a pas une minute à perdre »), soit implicitement par le rythme heurté, la brièveté de ses

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