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Heureux qui comme Ulysse - commentaire

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Par   •  18 Janvier 2018  •  Commentaire de texte  •  1 694 Mots (7 Pages)  •  712 Vues

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Du Bellay, Les Regrets, Sonnet XXXI, « Heureux qui comme Ulysse… », 1558.

        Popularisé par le succès de la poésie de Pétrarque, le sonnet est devenu, au XVIème siècle, et notamment chez les poètes de la Pléiade, la forme fixe la plus fréquemment employée. Du Bellay privilégie cette forme, aussi bien dans L’Olive – recueil de cinquante sonnets dans lequel le poète chante une maîtresse idéale – que dans Les Regrets – recueil de 191 sonnets publié en 1558 dont l’inspiration est un voyage à Rome entrepris par le poète en 1553. Dans le sonnet XXXI des Regrets, le poète va exprimer sa nostalgie, le regret de sa terre natale. En quoi ce sonnet est-il un poème de l’exil ? Pour répondre à cette question, nous étudierons dans d’abord l’expression de la souffrance du poète, puis l’évocation d’un lien intime avec la terre natale avant de nous pencher sur l’opposition entre Rome et l’Anjou.  

I – La souffrance de l’éloignement

1 - La dimension élégiaque du sonnet

Du Bellay écrit un sonnet empreint de nostalgie douloureuse, il va dire dans ce poème le regret de sa terre natale et la souffrance qu’il entraine.

  • La dimension élégiaque du poème transparaît à travers les marques de première personne du singulier : « je » v.6 et v.7, possessifs : « ma » v.8, « mon » v.11 ; mais aussi au vers cinq avec l’emploi, à la césure à l’hémistiche, de l’exclamation « hélas ! », maître-mot de l’élégie.
  • La détresse du poète est causée par le caractère incertain du retour sur la terre natale, comme le montrent les deux mots interrogatifs à valeur temporelle : « quand ? » v.5 et « en quelle saison ? » v.6 et l’emploi du futur : « reverrai-je » x2 v.5 et v.6.

→ aspiration du poète à un bonheur qui semble hors de portée.

  • L’expression « heureux qui » qui ouvre le poème est une exclamation à la manière antique : « felix qui », cela rapproche le poème de l’élégie latine. (cf. Ovide, Tristes, V, 1 : « Felix qui patitur… »).

2 - L’aspiration au calme de la terre natale

Le poète semble aspirer au calme représenté par la terre natale et rejeter au contraire l’agitation liée au voyage.

  • De son Anjou natal, le poète fait une description méliorative : le poème s’achève sur l’évocation de la « douceur angevine » qui semble convoquer des images de nature tranquille, d’atmosphère douce et éthérée – ce qui est accentué par la rime féminine. Le vers est construit sur une antithèse : « la douceur angevine » s’opposant à « l’air marin », qui non symbolise seulement le voyage, mais évoque également le sel dont la qualité abrasive s’oppose à la « douceur » de la terre du poète.  
  • Le poème s’ouvre sur l’évocation de deux voyageurs qui, contrairement au poète, sont rentrés chez eux : Ulysse (vers Ithaque après la guerre de Troie) et Jason (après la quête de la toison d’or) : emprunts à la mythologie/littérature antique. L’exclamation fait entendre la jalousie du poète.
  • Les deux premiers vers semblent initier un récit épique : il est question de « beau voyage » et de conquête avec l’emploi d’une périphrase qui permet de désigner le héros par son exploit : « cestui-là qui conquit la toison » v.2. Mais le vers 3 crée un effet de rupture, voire de surprise avec un changement de ton : si les deux premiers vers semblent préparer le lecteur à un récit épique, les deux suivants évoquent le calme des dernières années des deux héros : « vivre entre ses parents le reste de son âge » v.4 : l’allitération [r] semble faire entendre le calme retrouvé.

→ Le premier quatrain met présence deux aspirations contradictoires : l’ambition, l’aspiration à la gloire – symbolisée par le voyage et les exploits des deux héros antiques – et l’aspiration au repos – liée au retour sur une terre natale caractérisée par sa quiétude.

  • Le voyage est source d’apprentissage, puisque le héros revient « plein d’usage et raison », il a donc acquis de l’expérience, mûri, possède à présent une certaine sagesse ; c’est cette sagesse qui le ramène chez lui, le pousse à ne plus se perdre en ambitions et à trouver son bonheur dans la simplicité du foyer et de la vie de famille : « entre ses parents » v.4.

II – L’évocation d’un lien intime avec la terre natale

        1 : Le regard subjectif du poète

Le poète est dominé par un sentiment de nostalgie, comme l’atteste la construction binaire des deux tercets : il est pris entre l’ici et l’ailleurs, le présent et le passé. Ce n’est donc pas un regard objectif qu’il va poser l’Anjou auquel il rêve depuis l’Italie.

  • L’attachement affectif du poète à sa terre natale est marqué par l’emploi des multiples adjectifs possessifs faisant référence à des éléments du paysage angevin : « mon Loire » v.12 – au contraire, on note l’emploi de l’article défini dans le second hémistiche : « le Tibre » - « mon village » v.5, « ma maison » v.7, « mon Liré » v.13.
  • Le décalage entre la vision du poète et la réalité est rendu par la dimension hyperbolique du vers 8 : l’image de la « province » - à prendre ici au sens de « royaume » - qui est encore accentuée par l’expression « beaucoup davantage » s’oppose au lexique de la modestie qui est présent dans les vers précédents : « petit » v.4, « pauvre » v.6. Le pronom personnel de première personne « qui m’est une… » affirme la subjectivité du regard : c’est pour lui, à ses yeux que le village natal est un royaume. C’est donc l’attachement personnel du poète au lieu qui modifie sa perception.

2 : Le sentiment d’appartenance

L’Anjou n’est donc pas seulement un lieu agréable où vivre, c’est un lieu auquel le poète est intimement lié. Ce lien apparaît notamment comme un lien familial puisque. L’Anjou est le lieu où le poète peut « vivre entre ses parents » v.3.

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