Est-il pertinent de nous intéresser à des personnages de fiction ?

Initiation à la dissertation

Sujet : Est-il pertinent de s’intéresser à des personnages de fiction ?

La fiction prend une part importante dans les arts. Elle représente d’abord la liberté de l’artiste, qui utilise son imagination comme moyen de s’exprimer. De plus, elle symbolise notre capacité à évoluer et à progresser : nous améliorons notre condition en n’ayant aucunes limites. Cependant, est-il pertinent de nous intéresser à des personnages de fiction? Pour répondre à cette question, nous verrons en quoi les personnages fictifs permettent d’offrir un divertissement, mais aussi de nous forger une identité, et enfin de nous pousser à la réflexion.

        Le terme divertissement provient du latin “divertere” : ce qui nous emmène ailleurs et détourne notre esprit. Pour cela, la fiction en est le parfait outil. Par la richesse de l’intrigue, et des caractères de ses personnages, elle est une grande source de plaisir. Comparée aux histoires réelles, la fiction est le meilleur moyen de répondre à nos besoins, c’est à dire oublier nos problèmes pour un instant et trouver un échappatoire à la réalité. Pour se divertir, nous cherchons un personnage plongé dans une intrigue captivante et rythmée. Tel est le cas de Marcus Goldman, issu de La Vérité sur l’affaire Harry Quebert (Joël Dicker) : nous ne pouvons qu’accrocher à la succession d’évènements, qui cadencent sa course effrénée à résoudre une affaire policière. Nous sommes ici aspirés par ce roman jusqu’à la dernière page, pour découvrir l’élément de résolution. Outre la possibilité d’offrir une intrigue qui répond à nos attentes, la fiction permet également de rendre concevable l’inimaginable. Par exemple, la saga Star Wars repousse les limites du réel, en utilisant un cadre spatio-temporel irrationnel. Nous sommes alors pris d'admiration pour les personnages qui évoluent dans ce décor, tel que le célèbre Luke SkyWalker. La nouveauté est ici source de plaisir. De cette manière, la fiction est un moyen incontournable de divertissement, de par son intrigue et de son renouvellement incessant.

Au-delà d’une simple visée ludique, la fiction trouve également une capacité à s’emparer de nos émotions. Dans Un Coeur Simple, de Gustave Flaubert, le lecteur est touché par la simplicité et la pureté de Félicité, une femme dévouée à son travail. Il en est de même pour Albert Cohen, auteur du Livre de ma mère, dans lequel le narrateur-personnage nous dévoile d’une façon poignante sa relation avec celle qui l’a mise au monde, en peignant un tableau très intime. Ainsi, les personnages fictifs sont aussi présents pour faire surgir en nous des émotions, ce qui est divertissant. Toutes nos charges émotives contenues et accumulées au fil de notre vie quotidienne ressortent : la fiction remplit alors le rôle de catharsis, un sujet que nous développerons ultérieurement.

Cependant, les personnages fictifs ne se limitent pas au simple but de nous divertir. Ils ont aussi pour fonction de nous forger une personnalité, et de conduire nos actes.

        Intéressons-nous dans une seconde partie à la visée identitaire que propose la fiction. Chaque personnage a la plupart du temps un caractère fort,  un idéal qui le pousse à mener des actions, admirables ou déplorables. En effet, nous pouvons tous nous projeter dans les agissements d’un protagoniste et nous y identifier. En suivant les décisions et le comportement d’un personnage pourtant fictif, le lecteur les adapte à sa propre vie. En d’autres termes, il s’agit pour lui de tirer des conclusions de certaines situations, et de fuir certains exemples. Commençons par étudier le cas où les personnages sont pour nous un modèle. Prenons l’exemple du roman de Maupassant: Bel-Ami, dans lequel Georges Duroy est la figure même de l'ascension sociale. Malgré le caractère excessif et infidèle duquel on pourrait le blâmer, il demeure le symbole même de la réussite. Sa position sociale suscite donc de l’admiration. D’autre part, Edmond Dantès, personnage inventé par George Dumas dans Le Comte de Monte-Cristo, représente lui aussi cette réussite. Il nous montre que l’homme qui a subi des injustices reprend toujours son droit et finit par triompher, même après des épreuves difficiles (ici la prison par exemple). Dans ces deux cas, il s’agit pour nous de comprendre qu’il faut persévérer dans nos projets, et de croire en nos rêves, qu’importent les obstacles que nous rencontrons. De ce fait, les personnages fictifs peuvent être des modèles à suivre. Ils sont une source d’énergie et une motivation pour mener à bien nos actions.

Dans le cas contraire, l’artiste peut définir ses personnages comme nocifs et blâmables. Prenons le cas de Julien Sorel, personnage issu de l’imagination de Stendhal, dans Le Rouge et le Noir. Malgré le côté héroïque et fascinant que son caractère fort dégage, il peut aussi faire montre d’excès. C’est ailleurs cette démesure qui le conduit à sa perte, si bien qu’il finit condamné à mort. Julien Sorel fait alors figure de personnage tragique. Le lecteur comprend à travers cet exemple que l’excès et les passions lui seront nocifs et qu’il faut adopter une conduite modérée. De même, le personnage de Cyrano de Bergerac (dans la pièce du même nom publiée par Edmond Rostand), nous délivre un enseignement. L’homme n’a pas eu le temps d’annoncer son amour à sa bien-aimée, Roxanne, car c’est seulement en mourant que cette dernière l’apprend. En prenant du recul, le spectateur, qui peut être déçu par un amour en quelque sorte gâché, se fait la réflexion de ne jamais tarder à prendre des décisions, et d’oser faire des choix. Chaque individu peut et doit dévoiler sa personnalité car l’apparence physique ne prime pas sur l’âme : Roxanne aime la splendeur des mots de Cyrano, et non pas la beauté physique de Christian, dont elle croyait être à l’origine des lettres d’amour.

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