Cours sur la tragédie et le théâtre

Cours sur la tragédie et le théâtre

1. Introduction

Les Grecs ont inventé la tragédie il y a 25 siècles (fin du Vie siècle). On en écrit encore aujourd’hui partout dans le monde. Le rayonnement de la tragédie tient à l’ampleur de sa signification et à la richesse de sa pensée car elle présentait, dans le langage accessible de l’émotion, une réflexion sur l’homme.

Des origines religieuses, nationales et littéraires

La tragédie grecque a une origine religieuse : elle est liée au culte de Dionysos. D’après Aristote, la tragédie serait née d’improvisations, elle serait issue de formes lyriques (qui se chantent sur la lyre), comme le dithyrambe qui était un chant choral en l’honneur de Dionysos.

Pour une recherche approfondie sur Dionysos, consulter le lien suivant et cliquer sur tous les onglets :

http ://www.cndp.fr/archive-musagora/dionysos/dionysosfr/intro.htm

On ne jouait de tragédies qu’aux fêtes de ce dieu :

• La fête des Dionysies urbaines (printemps)
• La fête des Lénéennes (décembre)

Chaque fête comportait un concours qui durait trois jours. Chaque jour, un auteur sélectionné longtemps à l’avance, faisait représenter à la suite trois tragédies. La représentation était prévue et organisée par l’Etat (de hauts magistrats choisissaient les poètes et les citoyens riches chargés de financer tous les frais). Le jour de la représentation, tout le peuple était invité à venir au spectacle, et les citoyens pauvres pouvaient même toucher une petite allocation à cet effet. Les auteurs s’adressaient donc toujours à un très large public : ils écrivaient en citoyens s’adressant à des citoyens. Le spectacle prenait donc aussi un caractère national.

Les auteurs tragiques puisent le sujet de leurs œuvres dans les grands mythes fondateurs déjà développés dans l’épopée (long poème ou vaste récit en prose au style soutenu qui exalte un grand sentiment collectif souvent à travers les exploits d’un héros historique ou légendaire, notamment chez Homère). Les légendes étaient connues, les enfants d’Athènes les avaient apprises, le public en connaissait les éléments. L’originalité des auteurs se situait donc dans leur interprétation personnelle lorsqu’ils mettaient en lumière une émotion, une explication, une interprétation nouvelle.

Mais, à la différence de l’épopée qui raconte, la tragédie montre. Dans la tragédie tout est là, sous les yeux, réel, proche, immédiat. On y croit, on a peur.

Structure de la tragédie et lieux de représentation

Le théâtre grec se joue en plein air, dans un endroit choisi pour ses qualités acoustiques. Les gradins sont creusés à flanc de colline : c’est le théatron proprement dit, c’est-à-dire le lieu d’où l’on voit. Le spectacle a lieu dans deux endroits distincts : l’orchestra de forme ronde où évolue le chœur (chants et danses) et le proskénion (proscenium) où jouent les acteurs, devant la skénè qui est le mur de scène (loge des acteurs) sur lequel sont accrochés les décors et derrière lequel se trouvent les coulisses.[pic 1]

[pic 2]

Jouée sans rideau, une tragédie grecque n’a pas d’actes. En revanche, l’action y est distinguée en un certain nombre de parties, appelées épisodes, que séparent des morceaux lyriques exécutés par le chœur dans l’orchestre.

La structure habituelle de la tragédie comporte :

• Un prologue (précède l’entrée du chœur)
• L’entrée du chœur ou parodos (souvent écrite en un rythme de marche)
• Les épisodes coupés par les chants du chœur (ou stasima) dont le nombre peut varier de 2 à 5
• La sortie du chœur ou exodox.

2. Le chœur

Il est à l’origine l’élément le plus important de la tragédie. Il avait une part prépondérante dans le cours de la tragédie. Il représentait des personnes étroitement intéressées à l’action en cours ; c’est lui qu’elle concerne le plus, c’est pour lui et par lui qu’elle peut toucher le spectateur. Il intervient, supplie, espère et ses émotions scandent d’un bout à l’autre les diverses étapes de l’action. Cependant, il est incapable d’y jouer un rôle. Il est, par définition, impuissant. Aussi, il est le plus souvent formé de femmes ou de vieillards, ne pouvant se défendre. Leurs chants occupaient un nombre de vers considérables. Au fil du temps, lorsque l’action de la tragédie se développera la place accordée au chœur ira en diminuant.

3. Les personnages

A l’origine, avant Eschyle, il semble qu’il n’y ait eu en face du chœur qu’un narrateur (en fait, l’auteur lui-même). Lorsque le narrateur s’intégra à la fiction poétique, il devint un personnage. Mais un personnage ne suffit pas pour constituer une action. Aristote écrit : « « Eschyle le premier porta de un à deux le nombre des acteurs, diminua l’importance du chœur et donna le premier rôle au dialogue ; Sophocle porta le nombre des acteurs à trois et fit peindre la scène. »

Peu à peu l’importance du chœur va en diminuant et les personnages et leurs actions prendront une part prépondérante dans la tragédie. Avec Sophocle et Euripide une importance nouvelle est donnée aux personnages qui se traduit par l’enrichissement de l’analyse psychologique. Avec Sophocle et Euripide on voit les personnages qui commencent à s’expliquer, à se justifier, voire à monologuer sur ce qu’ils pensent et ressentent. La tragédie, de plus en plus, s’attache à faire vivre ses personnages. La multiplication des scènes d’agôn est révélatrice de l’exposition des idées, pensées, sentiments des personnages (confrontation entre Médée et Jason, monologues de Médée). Cependant le théâtre grec n’a jamais été un théâtre principalement psychologique : une grande part est accordée à l’action.

4. L’action

Aristote écrit : « La péripétie est le revirement de l’action dans le sens contraire, suivant ce qui a été dit, et cela, encore une fois, selon la vraisemblance ou la nécessité. »

Euripide a inventé ce que l’on pourrait appeler l’intrigue. Son théâtre est rempli de ruses, de surprises, de confusions, de reconnaissances. Il a multiplié les épisodes et les personnages afin de varier cette intrigue et de la rendre plus émouvante.

Le travail sur l’élaboration des péripéties a permis aux auteurs de développer et exacerber le pathétique. La tragédie découvrit l’art de présenter des situations pathétiques notamment aussi par deux procédés qui devaient être considérés comme des procédés constitutifs de la tragédie grecque :

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