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Compte rendu du livre Le libraire de Gérard Bessette

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Par   •  12 Décembre 2020  •  Compte rendu  •  1 069 Mots (5 Pages)  •  1 015 Vues

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Publié en 1960, Le Libraire de Gérard Bessette s’inscrit comme une œuvre phare de la transition entre la Grande noirceur sous le règne de Maurice Duplessis et le début de la Révolution tranquille au Québec. Critique de la censure imposée par l’Église catholique, Bessette utilise son roman pour, entre autres, exposer le déchirement de la population québécoise vis-à-vis de son désir de s’émanciper de l’Église et de la nécessité de s’y conformer pour ne pas être mis à l’écart de la société. Son roman, que l’on pourrait considérer comme très avant-gardiste par rapport à la littérature québécoise de l’époque, à d’ailleurs été publié en France dans un premier temps et au Québec par la suite, car la teneur de ses propos aurait probablement scandalisé le lecteur québécois de l’époque. Les lignes qui suivront feront donc le compte-rendu des propos tenus par Bessette dans Le Libraire, que ce soit au travers de la construction de ses différents personnages, du temps et des lieux qu’il a choisis, mais aussi de la structure même de son roman et du courant littéraire auquel il s’identifie.

Le Libraire, c’est avant tout l’histoire d’Hervé Jodoin, un ancien chargé de cours (répétiteur) maintenant devenu chômeur, qui se retrouve en quelque sorte obligé d’accepter un emploi qui l’emmènera de Montréal jusqu’à Saint-Joachin pour occuper un poste de libraire dans ce petit village. Le protagoniste est la définition même de l’indifférence et de la paresse : on remarque rapidement que son discours est constamment ponctué de « peu importe » et de « c’est sans importance » et il affirme de prime abord qu’il « déteste les déplacements » et qu’il est « trop las pour marcher loin ». Par cet immobilisme métaphorique, l’auteur souligne la résignation du personnage principal quant aux efforts à faire et aux obstacles à surmonter pour effectuer la transition entre les us et coutumes de la Grande noirceur et les valeurs réellement chéries par les Québécois, valeurs qui poseront un peu plus tard les bases de la Révolution tranquille. Ce thème majeur de l’ouvrage s’établit comme une attaque directe au jansénisme de la société québécoise des années 1950, date du déroulement de l’histoire, mais aussi de l’écriture du roman. Dans sa résignation indifférente, Hervé Jodoin maintient tout de même un certain système de valeurs et il rencontrera un allié idéologique, bien malgré lui, dans la personne de Léon Chicoine, le propriétaire de la librairie. En effet, bien que fondamentalement très différents, les deux personnages défendront avec ferveur la liberté de pensée et d’action tout au long du récit, mais toujours d’une façon qui leur est bien unique :

Monsieur Chicoine, je travaille chez vous depuis six semaines et vous n’avez jamais essayé de restreindre ma liberté. Le soir, tous les soirs, je vais à la taverne et je bois jusqu’à la fermeture. Vous n’avez jamais fait de remarques à ce sujet. […] C’est une liberté que j’apprécie à sa juste valeur. (p.44)

Ainsi, ils s’allieront afin de mener une croisade révolutionnaire timide contre la censure en vendant « aux lecteurs sérieux », à partir de l’arrière-boutique (le capharnaüm), des ouvrages considérés comme amoraux par l’Église catholique. Évidemment, l’affaire s’ébruitera rapidement et nos deux personnages subiront les foudres du curé du village, M. Galarneau, quand il découvrira qu’Hervé Jodoin a vendu un exemplaire de L’Essai sur les mœurs de Voltaire à un des collégiens. Ce contrôle bien réel exercé par l’Église sur la population du village est d’ailleurs bien exprimé par le père Manseau, le collègue de beuverie silencieuse du protagoniste à la taverne Chez Trefflé, à l’endroit de ce dernier : « Eh ben, c’est pas bon pour la santé icitte de contrer les curés. Les ficelles, c’est eux-autres qui les ont, vous comprenez… » (p.104). Et il aura bien raison, ce vieil ivrogne, puisqu’au final, Chicoine et Jodoin, déchirés entre leurs désirs profonds et l’obligation de se conformer à la doctrine du jansénisme, se soumettront au clergé par peur de représailles. Léon Chicoine rejettera ultimement la responsabilité sur Hervé Jodoin afin de maintenir son statut dans le petit village et ce dernier sera dans l’obligation de s’excommunier dans un village plus grand où le commérage voyage plus lentement, c’est-à-dire à Montréal.

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