Commentaire "quand vous serez bien vieille" de Ronsard

RONSARD

        Ronsard, poète du XVI ème siècle et figure majeur de la poésie écrit en 1578 un sonnet, c'est-à-dire un poème constitué de deux quatrains et deux tercets dont quatre strophes. Ce sonnet porte le nom de « Quand vous serez bien vieille » et est destiné à Hélène de Surgères, la protégée de Catherine de Médicis. La protégée de cette femme puissante de la Renaissance attire l'attention du poète et devient ainsi sa muse.

Elle devient l'objet d'un recueil qui se nomme « Sonnets pour Hélène ». Dans ce poème précisément, Ronsard s'efforce de séduire Hélène en lui dépeignant ce que serait sa vie sans lui ; une vie triste et monotone tout en se décrivant comme indispensable à son bonheur

Comment Ronsard exprime-t-il ses sentiments envers Hélène et poursuit-il la tradition de la poésie lyrique ?

Il serait alors intéressant, pour répondre à cette question, d'analyser le tableau réaliste de la vieillesse que fait Ronsard. Puis, pour poursuivre cette analyse, nous pouvons observer comment il utilise à ses propres fins la leçon « Carpe Diem ». Enfin, cela nous conduira à comprendre la présence et la fonction du poète dans « Quand vous serez bien vieille » mais aussi au XVIème siècle.

Il est courant, en poésie, que les femmes soient une source d'inspiration car elles représentent un idéal de la beauté; elles sont même qualifiées de « muse ».  Or, Ronsard semble trouver son inspiration chez les femmes mais d'après le titre de son œuvre « Quand vous serez bien vieille », il veut séduire sa muse par un autre procédé que celui de l'éloge. En effet, il diminue sa muse en lui montrant ce que serez sa vie sans lui et se projette dans le futur d'Hélène et plus précisément dans sa vieillesse.

Le temps semble, en effet, être au cœur du poéme et, de fait, Ronsard emploi des verbes au futur tels que « vous serez » ( à trois reprises), « vous n'aurez » ou encore « je serais » et fait donc écho à un futur possible. Ronsard fait donc une tentative singulière de séduction car il ne fait pas l'éloge de sa beauté présente mais parle de ses regrets futurs et décrit sa vieillesse, son triste avenir. Dès le premier vers, Ronsard, la présente comme « vieille» et utilise un adverbe (« bien ») pour accentuer son état. Nous observons une succession d'adjectifs péjoratifs envers Hélène comme « Une vieille accroupie » qui montre qu'elle sera seule et délaissée sans lui. De plus, il oppose clairement ce sentiment de regret ( « regrettant mon amour », « du temps que j'étais belle ») à des adjectifs mélioratifs tels que « émerveillant », « bénissant », « belle » pour conduire à une reconsidération pour Hélène de la proposition amoureuse de Ronsard . Le poéte veut ainsi dire que sa beauté est éphèmere et qu'elle ne sera pas éternellement belle. Il fait culpabiliser Hélène en la dépeignant comme seule et triste tout en utilisant le temps futur; « vous serez au foyer une vieille accroupie». Ronsard parvient à manipuler Hélène par un tableau domestique peu attrayant; il la décrit comme occupée par des activités sans intérêts par des termes tels que « dévidant» et « filant», mais aussi par une extrême solitude ( seule une servante semble l'accompagner) ainsi que vivant dans une atmosphère sombre ( « au soir », « à la chandelle », « assise auprès du feu »).

Hélène, sous la plume de Ronsard, semble malheureuse et passive; elle ne retrouve que peu de joie lorsqu'elle pense à son passé (« Ronsard me célébrait du temps que j'étais belle ») ce qui a pour but de la convaincre. Si elle n'accepte pas son amour, elle sera seule, vieille et délaissée. C'est donc par ce moyen qu'il parvient à persuader son interlocuteur.

         Cependant, son propos consiste avant tout à lui dire d'accepter ses avances pour profiter de l'instant présent, de suivre la leçon « Carpe Diem ».

        « Carpe Diem » veut littéralement dire « profiter de la vie » mais s'étend à une manière de vivre le temps présent sans se soucier de ce qui adviendra dans le futur. Dans le poème écrit par Ronsard, il  est digne d’intérêt de constater que dès le premier vers, le poète emploi le temps futur avec « vous serez » tandis que lors du dernier vers, il utilise le présent de l’indicatif ( « cueillez dès aujourd’hui… »). Il est donc étonnant que contrairement à la vie, Ronsard débute avec le temps futur, continue avec le temps passé ( « du temps que Ronsard me célébrait »)et conclut avec le présent. La leçon de « Carpe Diem » dit qu’il faut vivre au temps présent or Ronsard évoque majoritairement le temps futur ce qui est contraire à ses derniers vers exprimant le Carpe Diem.

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