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Commentaire méthodique sur le poème Le Bateau Ivre d'Arthur Rimbaud

Note de Recherches : Commentaire méthodique sur le poème Le Bateau Ivre d'Arthur Rimbaud. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  10 Juin 2014  •  3 230 Mots (13 Pages)  •  3 306 Vues

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LECTURE ANALYTIQUE METHODIQUE (= non linéaire)

De « Le Bateau Ivre » (1871), d’Arthur Rimbaud (né en 1854, mort en 1891)

Eléments d’introduction

Rimbaud écrit « Le Bateau Ivre » à Charleville à la fin de l’été 1871 (à l’âge de 17 ans), alors qu’il s’apprête à gagner Paris. Il veut impressionner favorablement les poètes parisiens. Le poème « Le Bateau Ivre » est donc destiné à frapper un grand coup : Rimbaud veut être reconnu comme poète !

[Petit rappel : Baudelaire a publié Les Fleurs du Mal en 1857, donc 14 ans avant l’écriture de « Le Bateau Ivre » par Rimbaud, ce dernier étant alors nécessairement influencé par la poésie baudelairienne et son sens de la provocation esthétique.]

Ce poème, « Le Bateau Ivre », est d’une flamboyante violence : il évoque la dérive libératrice d’un bateau – qui n’est autre que le poète lui-même – jusqu’à l’océan.

Certains critiques littéraires ont vu dans ce poème la lucidité de Rimbaud prophétisant son départ, ses voyages (Rimbaud a voyagé ensuite en Afrique, comme commerçant) et son retour « vers l’Europe aux anciens parapets » (quatrain 21, v.4) ; d’autres critiques admirent une extraordinaire marine [= peinture dont le sujet est la mer] chez celui qui n’a encore vu que la Meuse [= fleuve d’Europe, qui prend sa source en France, en Haute-Marne] ; d’autres critiques encore font la liste des auteurs qui ont nourri le poème de Rimbaud, ou bien encore rappellent telle barque près du vieux moulin où Rimbaud et son frère se laissaient balloter !

Mais tous ces critiques oublient la dérive du « Resolute », ce bateau parti à la recherche de Franklin, pris dans les glaces arctiques puis libéré par la banquise et qui dériva seul de longs mois. Récupéré le long des côtes américaines, il fut restitué à l’Angleterre en 1850 et son errance peut avoir inspiré bien des « vaisseaux fantômes », dont l’idée du « bateau ivre » dans l’imaginaire de Rimbaud.

La luxuriance des images, la densité du vers font du poème « Le Bateau Ivre » un feu d’artifice inégalé. Le sujet, en revanche, n’est pas nouveau : de nombreux poètes ont employé cette image d’un bateau à la dérive ; il s’agit donc bien d’un topos [= lieu commun, « cliché » poétique] courant à l’époque.

Proposons trois axes pour notre lecture méthodique :

1. De l’ivresse à l’impuissance, le récit d’une désillusion

2. Audace et défi

3. Une parabole [= récit symbolique] de l’inspiration et de la trajectoire du poète

Développement du plan :

I) De l’ivresse à l’impuissance, le récit d’une désillusion (structure globale du texte, place du sujet du discours, repères anaphoriques)

Le sujet de l’énonciation

• C’est « je » qui parle = « je » d’un bateau personnifié (=personnification)

• Longue prosopopée [= figure de rhétorique par laquelle l'orateur ou l'écrivain fait parler et agir un être inanimé, un animal, une personne absente ou morte].

• Ce « je » est le sujet fictif du discours, mais il masque une allégorie du poète. Le lexique rappelle de temps en temps le statut allégorique du « je » : « ma quille » (v.92), « Or moi, bateau perdu… jeté… » (v.69-70)

• Le récit de l’aventure se fait à l’imparfait (actions-cadre) et au passé simple (événements ponctuels qui se détachent sur le fond des actions-cadre).

• Le « je » est le sujet de procès moteurs : courir, descendre, danser… qui sont tous employés métaphoriquement… puisqu’il s’agit d’un bateau !

• Ainsi, le poète semble devenu un objet : un bateau, qui parle et se meut, ressent… comme une personne  la réification [= fait de devenir une chose, ou de faire devenir chose une personne ou un être animé] est suivi d’une personnification (en effet : le poète devient d’abord un bateau… et ensuite ce bateau se met à parler, se mouvoir, ressentir).

• Le « je » est aussi sujet de procès liés à l’intériorité : voir, savoir, rêver, se souvenir…

[Précision de vocabulaire : ici « procès » veut dire « processus », lesquels peuvent être des actions concrètes, ou bien des mouvements de l’esprit, des pensées, des sensations, des perceptions.]

Le mouvement du texte

• Le récit conduit à l’affranchissement du bateau, débarrassé dans l’euphorie de toute contrainte (« les haleurs »).

• Chaque strophe se recentre autour d’un verbe : « Moi… Je courus ! », « j’ai dansé sur les flots », « L’eau verte pénétra ma coque…/ Et…/ Me lava…/ Et dès lors, je me suis baigné », soit 7 strophes.

• A partir de la strophe 8 vient l’heure des bilans au présent ou au passé composé : « Je sais… / Et j’ai vu… / J’ai vu… / J’ai rêvé… / J’ai suivi… / J’ai heurté… / J’ai vu fermenter… », soit de nouveau 7 strophes.

• Viennent ensuite les regrets : « J’aurais voulu montrer aux enfants… / Parfois, martyr lassé… / Et je restais… / Et je voguais… »

• A partir de « Or moi », on assiste à un résumé des grands moments de liberté heureuse (« Or moi, bateau… Moi dont… Moi qui trouais… Qui courais… Moi qui tremblais… »), soit 7 strophes où Rimbaud récapitule les courses folles, les souvenirs d’ivresse, et qui butent sur le constant amer : « Je regrette l’Europe aux anciens parapets ! »

• Les 4 dernières strophes développent ce constat d’échec par l’aveu d’impuissance, le retour au réel marqué par la réduction de l’univers aux dimensions d’une coquille de noix dans une flaque : « J’ai vu… / Mais, vrai, j’ai trop pleuré… / Si je désir une eau… / Je ne puis plus… Enlever… / Ni traverser… / Ni nager… »

De l’ivresse à l’anéantissement

• La présence du « je » (du moi), relancent le récit et assurent sa continuité à travers les métamorphoses et les dégradations du bateau-poète.

• Les adjectif positifs (« léger », « triomphants », « douce », etc.) se regroupent au début du texte (précision : « niais » et « blême » ne

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