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« Crépuscule du soir », Le Spleen de Paris, Baudelaire

Commentaire de texte : « Crépuscule du soir », Le Spleen de Paris, Baudelaire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  14 Janvier 2024  •  Commentaire de texte  •  1 288 Mots (6 Pages)  •  98 Vues

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« Crépuscule du soir », Le Spleen de Paris, Baudelaire

Intro :

Charles Baudelaire est un poète du XIXe siècle dont l’œuvre principale est un recueil en vers appelé Les Fleurs du mal, qui parait en 1857 mais qui est aussitôt censuré par un procès pour « outrage à la morale publique ». Il finira par le republier en 1861, les poèmes les plus « immoraux » en moins. Ce n’est qu’après sa mort, en 1869, qu’est édité Le Spleen de Paris (également connu sous le nom de Petits Poèmes en prose). Ce recueil de poèmes en prose est une nouvelle illustration du mal-être du poète et de son état de prédilection : le spleen, une mélancolie sans cause apparente caractérisée par le dégoût de tout.

Dans le poème « Le Crépuscule du soir », Baudelaire montre parfaitement l’ambiguïté de son existence de poète à travers la dualité de ses propos et s’inscrit dans la continuité de son œuvre en s’opposant à la vision collective du monde et en transformant la laideur en beauté.

Ce poème semble se découper en trois mouvements : de la ligne 1 à 12, Baudelaire évoque le passage du jour à la nuit et la transformation que cela induit, puis de la ligne 13 à 27, il aborde la folie à laquelle peut conduire cet état, et il montre enfin de la ligne 28 jusqu’à la fin du poème le bonheur qu’il éprouve au crépuscule quand le reste du monde semble désespéré.

En quoi le crépuscule symbolise-t-il un point de bascule ambivalent caractéristique de l’esthétique Baudelairienne ?

Tout d’abord, nous nous attacherons à montrer le paradoxe que semble créer cet instant crépusculaire, puis nous verrons que celui-ci peut être à la fois terrifiant pour certains et merveilleux pour d’autres, enfin, nous mettrons en évidence la faible nuance qui sépare folie et imagination selon le poète.

  1. L’ambivalence du crépuscule…
  • « Cependant » (l. 4) : connecteur logique d’opposition qui montre la dualité et la multiplicité de point de vue
  • Nombreux oxymores (« lugubre harmonie » (l.6), « harmonies de l’enfer » (l.12), « rafraîchissantes ténèbres (l.28)) qui tendent à prouver le côté paradoxal de la situation décrite
  • Le passage du jour à la nuit semble être apocalyptique « agonie du jour » (l. 33) et « deuil profond de la Nuit » (l.40) : Baudelaire utilise des images sombres ce qui ajoute une dimension contradictoire au repos que semble logiquement induire ce moment : c’est la fin de la journée et le poète le dit lui-même à la ligne 1 : « un grand apaisement se fait dans les pauvres esprits fatigués du labeur de la journée ».
  • La dimension de l’étrange et du bizarre dans ce poème est très présente à travers la synesthésie péjorative de la description du paysage : à travers l’ouï : « hurlement » (l.5), « cris discordants » (l.5), « sinistre ululation » (l.8), « bercer (…) imitation des harmonies de l’enfer » (l.11) ; la vue : « noir hospice » (l.8), « hérissée de maisons » (l.10), « taches d’un rouge opaque » (l.34), les images qui induisent des émotions, des sensations : « solitude des plaines » et « labyrinthes pierreux d’une capitale » (l.29)…

Logique chez Baudelaire qui considère que « le Beau est bizarre ».

Mais également la synesthésie des éléments mélioratifs de cet instant de bascule : par le biais de la vue : les couleurs, d’abord « tendres et indécises » (l.1) puis « lueurs roses » (l.33), les éléments du paysage : « scintillement des étoiles », « explosion des lanternes » (l.30), « étoiles vacillantes d’or et d’agent » (l.39), « entrevoir » et « éclatante » (l.38), le toucher : « doux et tendre » (l.32), etc.

  • Baudelaire montre lui-même le contraste entre ces deux points de vue…
  1. …terrifiant pour beaucoup mais merveilleux pour quelques-uns…
  • Le poète admet la dichotomie entre l’impression d’horreur étrange pour la plupart des hommes et son impression personnelle de renaissance : « ma pensée étonnée » (l.11) et « La nuit, qui mettait ses ténèbres dans leur esprit, fait la lumière dans le mien ; et bien qu’il ne soit pas rare de voir la même cause engendrer deux effets contraires, j’en suis toujours comme intrigué et alarmé » (l.25) : Baudelaire reconnaît sa contradiction avec ce qui semble être les effets du crépuscule sur la majorité des gens
  • Baudelaire se place en opposition avec le reste de la société puisqu’il passe d’une description à la troisième personne du singulier à des confidences à la première personne du singulier (« mon balcon » l.4)
  • Insertion d’un double récit, d’une anecdote (et même de deux) dont le poète se sert à titre d’exemple pour prouver que « le crépuscule excite les fous » (l.13) et que ce qui, pour lui, annonce un moment de liberté et de bonheur, est pour les autres une épreuve.
  • Le crépuscule semble opérer une transformation physique et psychologique sur les hommes : « le crépuscule (les) rendait tout malades » (l.14), « comme un sauvage » (l.15), « indulgeant et sociable encore pendant la journée, il était impitoyable le soir » (l.19) : fait penser à la transformation du loup garou à l’apparition de la pleine lune + l.20 : « manie crépusculeuse » : association de deux mots (crépuscule et scrupuleux) pour en former un nouveau (mot-valise) + utilisation du mot « sabbat » (l.8) qui désigne les assemblées nocturnes des sorcières au Moyen-Âge : montre le côté fantastique du crépuscule
  • Rythme ternaire l.18 qui permet d’accentuer la transformation étrange et anormale due au crépuscule
  • Enfin, Baudelaire aborde les conséquences terribles de ces transformations mais montre aussi que ce moment incarne l’ouverture sur un monde nouveau, seulement accessible la nuit
  1. …qui tend à prouver la mince limite entre imagination et folie.
  • Si le crépuscule amène des individus à la folie (l.13), cela n’est pas le cas des poètes car il signe le passage du jour à la nuit, de la vie à la mort d’une part mais surtout du bruit au silence et de l’effervescence à la tranquillité. La nuit semble donc être un moment inspirant pour Baudelaire : « une fête intérieure », « la délivrance d’une angoisse » (l.28 et 29)
  • Le poète se place en observateur qui, du haut de son « balcon » (l.4) observe la société endormie et au repos pour s’en inspirer : quand il parle à la ligne 35 des « lourdes draperies qui imitent tous les sentiments compliqués qui luttent dans le cœur de l’homme aux heures solennelles de la vie », peut-être fait il la description du rôle du poète qui écrit sur les autres hommes mais aussi sur ses propres sentiments et qui puise son inspiration dans l’influence de la nuit.
  • Baudelaire voue un culte à la nuit, il en fait l’éloge : il l’apostrophe avec deux « Ô » (l.28) qui traduisent des sentiments exaltés pour les sensations que lui procurent l’obscurité : la nuit lui permet de développer son imagination, bien plus que dans la journée : « feu d’artifice de la déesse Liberté ! » (l.30), « feux de la fantaisie qui ne s’allument bien que sous le deuil profond de la Nuit » (l.40) => allégorie de la nuit (avec la majuscule)
  • Cependant, Baudelaire montre la fine nuance entre folie et imagination lorsqu’il emploie le terme de « distinctions imaginaires » (l.25) pour caractériser la folie de son ami : il prouve ainsi que le poète n’est pas loin du reste des hommes et qu’il partage avec les fous la même imagination. Seulement, la sienne s’apparente à de l’art quand elle devient pour d’autres une maladie.

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