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La norme jurisprudentielle et la sécurité juridique

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Par   •  17 Novembre 2023  •  Dissertation  •  1 699 Mots (7 Pages)  •  54 Vues

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La norme jurisprudentielle et la sécurité juridique

Pour commencer, il convient de définir précisément les termes du sujet ; d’abord, une norme est une règle à caractère général et obligatoire. Les différentes normes sont classées par un système hiérarchique, on parle de la « hiérarchie des normes » qui range les différentes normes selon diverses catégories de règles en fonction de leur rang de valeur. Par extension, on pourrait définir la norme jurisprudentielle comme la norme qui trouve son origine dans la jurisprudence, soit l’ensemble de décisions de justice dont se dégage une position qui peut être fiable ou divisée. Sur les points non réglés par la loi, la jurisprudence vient suppléer l’obscur législatif en constituant un droit positif sur lequel s’appuie la communauté juridique.  

Dans la conception traditionnelle, le juge n’est pas créateur de normes, l’article 5 du Code Civil dispose qu’ «il est défendu aux juges de se prononcer par voie de dispositions générales et réglementaires sur les causes qui lui sont soumises ». Néanmoins, il peut arriver que la loi ne soit pas complète et que le juge se retrouve face à une situation qui n’est pas expressément prévue par la loi. Dans ce cas, le juge est contraint d’exercer son pouvoir d’interprétation sans quoi il pourrait être poursuivi pour « déni de justice » comme l’entend l’article 4 du Code Civil. Par son pouvoir d’interprétation, le juge va avoir la possibilité de jouer un rôle dans la création de normes afin de pallier à la complétude de la loi. En principe, lorsque le juge dégage une nouvelle règle jurisprudentielle au cours d’un litige, il l’applique aux faits de l’espèce, antérieurs à la création à la règle nouvelle. En ce sens, la norme jurisprudentielle a une portée rétroactive et c’est la question de cette portée qui va poser problème puisqu’elle vient heurter d’autres principes juridiques comme le principe de sécurité juridique.

Selon le dictionnaire juridique Dalloz édition 2022, le principe de sécurité juridique est un objectif général qui rechercherait une stabilité et une clarté du droit positif suffisantes pour que les sujets de droit puissent adapter leurs actes et comportements en conséquence sans risquer d’être surpris par un changement ultérieur. Ce principe de sécurité juridique entre inéluctablement en conflit avec le caractère évolutif des règles légales ou jurisprudentielles. Dans la branche du droit administratif, ce principe est consacré dans le droit interne par la jurisprudence du Conseil d’Etat en 2006 qui l’élève au rang du principe général du droit.

La portée rétroactive de la norme jurisprudentielle semble être en totale contradiction avec le principe de sécurité juridique qui exige une certaine stabilité, incompatible avec l’idée d’une jurisprudence inconstante qui peut être en proie à des revirements. Toutefois, la jurisprudence peut très bien être constante ce qui ne semblerait pas poser de problèmes au principe de sécurité juridique. Toute la question suscitée par le sujet est donc de comprend la nature de la relation entre ces deux notions qui paraissent opposées.

Tout l’intérêt du sujet est donc de comprendre comment un principe émanant de la jurisprudence pourrait se retrouver en conflit avec la norme jurisprudentielle ?

Pour répondre le plus précisément au sujet, nous nous concentrerons sur la norme jurisprudentielle administrative. Ce qui nous intéresse ici est la relation entre ces deux notions, or, il s’avère que le principe de sécurité juridique trouve son origine de la jurisprudence administrative. Il paraît donc plus logique de se concentrer sur la jurisprudence administrative.

Nous traiterons de la formation prétorienne du principe de sécurité juridique et de sa conciliation implicite avec la norme jurisprudentielle(I), puis de la conflictualité actuelle entre ces deux notions (II)

  1. De la formation prétorienne du principe de sécurité juridique…

Malgré l’opposition entre le principe de sécurité juridique et la norme jurisprudentielle, il ne faut pas oublier que ce principe trouve son origine dans les sources internationales (A) qui ont incité la jurisprudence administrative à transposer ce principe dans son ordre juridique interne. (B)

  1. Les sources internationales

Tout d’abord, au niveau européen, la Cour de justice de l’union européenne a consacré le principe de sécurité juridique par l’arrêt Bosch de 1962 (CJUE, 6 avril 1962, Bosch). Elle fait de ce principe un principe général de l’Union Européenne ce qui implique que les règles de droits doivent être formulées de manière non-équivoque pour que chacun puisse connaître ses droits et obligations de manière précise.

Cette consécration a pour objectif de renforcer la sécurité des justiciables vis-à-vis de la multiplication des normes applicables dans l’ordre juridique. Ce principe va être mis en valeur par la Cour Européenne des Droits de l’Homme quelques années plus tard en 1979 par l’arrêt Marckx (CEDH, 13 juin 1979, Marckx). Dans cet arrêt, la CourEDH affirme que le principe de sécurité juridique est « nécessairement inhérent au droit de la Convention comme au droit communautaire ». Cette décision renforce encore plus l’importance européenne accordée à ce principe et prévoit les conditions d’un potentiel recours en cas de violation de ce principe. Les dispositions législatives doivent être précises, prévisibles et non rétroactives.

En somme, ce principe résulte d’une construction prétorienne qui l’a mis en valeur sur la scène internationale et qui avait pour objectif d’améliorer les possibilités d’action des justiciables face au droit. En outre, cette mise en exergue par les jurisprudences européennes a conduit les états membres de l’Union Européenne à transposer ce principe dans le droit interne.

  1. La transposition jurisprudentielle dans le droit interne

La transposition de ce principe dans le droit interne français s’est faite tardivement. En effet, ce n’est qu’en 2006 que le Conseil d’état par l’arrêt KPMG (CE ass., 24 mars 2006, KPMG) élève au rang de principe général du droit le principe de sécurité juridique. Cette décision permet d’améliorer la protection de l’ordre juridique et en particulier la stabilité des règles juridiques.

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