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Montaigne, Essais 1

Dissertation : Montaigne, Essais 1. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Mars 2020  •  Dissertation  •  1 834 Mots (8 Pages)  •  448 Vues

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Introduction

Au début de ses Essais, Montaigne nous prévient qu'il parlera essentiellement de lui dans cet ouvrage destiné à ses proches. Il invite même son lecteur à passer son chemin : « il n'est pas raisonnable que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole et si vain. Adieu donc ». Nous prenons pourtant plaisir à partir à la rencontre de ce « je » qui, tout en s'appuyant sur ses lectures et son expérience, évoque en définitive toutes sortes de sujets. Mais la littérature est-elle toujours propice à de telles rencontres ? Il s'agit en somme ici de mesurer la valeur des liens que peuvent tisser les mots d'un auteur. Certes, comme nous le montrerons pour commencer, la littérature n'est pas toujours l'occasion de rencontres apaisées. Reste que certains écrivains tentent d'éclairer les Hommes pour mieux les rapprocher. Le livre peut même devenir, comme nous le noterons finalement, un espace d'échanges.

Des rencontres agitées

L'écho de souffrances

• L'écrivain se fait souvent l'écho de souffrances en mettant en lumière des situations révoltantes. Dans ses Essais, Montaigne réhabilite ainsi ces « sauvages » qui sont souvent méprisés. Il écrit notamment dans « Des cannibales » : « Je trouve […] qu'il n'y a rien de barbare et de sauvage dans cette nation, d'après ce que l'on m'en a dit, sinon que chacun appelle barbarie ce qui n'est pas dans ses coutumes ». Il dénonce aussi les tortures dont sont victimes ces peuples écrasés par des conquérants avides de pouvoir et d'argent. Il s'attarde en outre sur ces massacres durant lesquels les Européens ont par exemple fait « brûler d'un seul coup, dans un même feu, quatre cent soixante hommes bien vivants ».

• Bien d'autres auteurs tenteront après lui de s'élever contre la violence et l'injustice. C'est notamment le cas de Voltaire, qui a pris la défense de Jean Calas dans son Traité sur la tolérance. Dans son Dictionnaire philosophique, il dénonce aussi les juges qui condamnèrent le chevalier de La Barre, « jeune homme de beaucoup d'esprit et d'une grande espérance » et « ordonnèrent […] qu'on lui arrachât la langue, qu'on lui coupât la main, et qu'on brûlât son corps à petit feu ». De même Victor Hugo s'est fait le porte-parole des Misérables qu'il évoque dans l'un de ses plus célèbres romans et dans de nombreux discours.

Le lieu de conflits

La littérature n'est alors plus un espace de concorde, d'autant que les écrivains s'attaquent parfois directement aux responsables de ces souffrances. Montaigne condamne ainsi un mauvais usage de la religion. Dans « Des coches », il rappelle qu'elle est la cause de bien des massacres et qu'elle divise au lieu de rassembler. Non seulement les hommes se livrent à des actions honteuses, mais « ils s'en vantent et les publient. Serait-ce à titre de témoignage de leur justice ou de leur zèle envers la religion ? Assurément ce sont des méthodes trop contraires à une si sainte fin », rappelle-t-il ainsi.

Dans « Des cannibales », il fait en outre référence aux guerres civiles qui ont ensanglanté le xvie siècle « sous prétexte de piété et de religion ». Le texte peut alors lui-même être agité par la colère et la violence. C'est le cas de certains poèmes des Tragiques d'Agrippa d'Aubigné. Au xxe siècle, même des écrivains pacifistes ont fini par transformer leurs textes en armes.

C'est notamment le cas de Robert Desnos qui décrit cette évolution dans l'un de ses poèmes : Ce cœur qui haïssait la guerre,

Voilà qu'il bat pour le combat et la bataille !

Ce cœur qui ne battait qu'au rythme des marées, à celui des saisons,

À celui des heures du jour et de la nuit,

Voilà qu'il se gonfle et qu'il envoie dans les veines

Un sang brûlant de salpêtre et de haine.

Le texte propage alors cette haine contre ses ennemis et, en ce sens, il semble lui-même opposer et diviser. Mais il permet aussi d'agréger ces colères pour rassembler ceux qui défendent la liberté et la justice. Si l'écrivain joue un rôle dans différents conflits, ce n'est donc pas seulement pour entretenir la flamme de la discorde. C'est aussi pour éclairer son lecteur. La raison peut se révéler, dans ce combat, aussi précieuse que la colère ou la haine.

Un espace de connaissances

Des traces du passé

• Si le « je » est très présent dans Les Essais, on y trouve également de nombreuses voix. Montaigne s'appuie volontiers sur des références antiques et son œuvre, loin d'être un monologue ininterrompu, devient un carrefour de langues et de cultures. Dans « Des cannibales » et « Des coches », il se nourrit ainsi des auteurs grecs ou latins pour éclairer les découvertes du xvie siècle. Le présent ne le conduit jamais à oublier les leçons du passé. Il y a ici une forme d'humilité chez cet auteur qui confie également dans « Des cannibales » : « je voudrais que chacun écrivît ce qu'il sait, et autant qu'il en sait […] car tel peut avoir quelque connaissance ou expérience particulière de la nature d'une rivière ou d'une source et ne savoir, quant au reste, que ce que chacun sait ».

• Mais ces liens sont aussi précieux parce qu'ils nous permettent d'aller à la rencontre de nouveaux auteurs. La littérature ne cesse alors d'ouvrir des portes menant vers de nouvelles œuvres, de nouvelles pensées et de nouveaux styles. Elle fait revivre des voix

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