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Les Regrets

Commentaire de texte : Les Regrets. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Mai 2014  •  Commentaire de texte  •  1 059 Mots (5 Pages)  •  692 Vues

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La critique s’est déjà longuement penchée sur Les Regrets1 pour faire remarquer combien ce recueil complexe et polymorphe, contient de marques d’épistolarité2. Je n’y reviendrai donc pas de façon centrale, car je voudrais surtout mettre l’accent sur la discussion générique que fait naître cette fiction d’épistolarité.

2Il faut cependant rappeler ces diverses marques d’épistolarité et relever le lien qu’elles tissent avec des genres antérieurs. On sait que Du Bellay, en intitulant son recueil « Les Regrets » traduit ainsi le titre des Tristia d’Ovide, qui servent à la fois de modèle et de repoussoir au recueil. Ovide, courtisan puni pour une obscure faute, se retrouve exilé de Rome sur les bords du Pont-Euxin, dans l’actuelle Roumanie. Il ne sait pas qu’il ne reverra jamais sa patrie et envoie à Rome ces lettres fictives, dans lesquelles il chante les malheurs de l’exil loin de Rome et tente de ne pas être oublié par son Prince. Du Bellay évoque lui aussi les malheurs de l’exil, en s’adressant à de nombreux destinataires qui sont nommés en apostrophe dans le recueil. Mais son imitation est ironique car pour lui, l’exil est à Rome, loin d’une patrie qui est en même temps une concurrente de l’Italie, la France bien aimée, et l’incarnation d’un autre pôle littéraire, qui se détournerait quelque peu de l’Italie et de l’Antiquité. Cette double signification de l’exil en Italie oriente déjà le recueil dans la voie d’une discussion sur la nature de la poésie française.

3Mais l’épître en vers fait déjà partie, à Rome d’une tradition, et Ovide, outre ses Tristia, offrait pour modèle les Pontiques, elles aussi écrites, comme leur nom l’indique, durant son exil. Plus tôt dans sa carrière, il avait déjà écrit les Héroïdes, lettres fictives rattachées à des personnages de la mythologie. On ne doit pas oublier non plus qu’Horace, qui, avec son Art poétique, constitue, pour les humanistes le plus important théoricien des genres, a pratiqué les épîtres en vers. C’est donc ce genre de l’épître en vers plutôt que celui de la simple lettre humaniste que pratique ici Du Bellay, en s’adressant à des interlocuteurs connus ou moins connus mais qui font partie de son cercle de connaissances. Dans le recueil, il va sans cesse jouer avec le concept d’imitation. Dans La Deffence et illustration de la langue française, Du Bellay évoquait déjà le genre de l’épître :

Quand aux Epistres, ce n’est un Poëme, qui puisse grandement enrichir notre vulgaire : pource qu’elles sont volontiers de choses familieres, & domestiques, si tu ne les voulois faire à l’imitation d’Elegies, comme Ovide : ou sentencieuses & graves, comme Horace3.

4Au moment où il écrivait cette Deffence, Du Bellay songeait surtout à l’enrichissement de la langue française, et il émettait donc des doutes à l’égard de ce genre humble qu’est l’épître, qui traite de « choses familieres et domestiques ». Selon lui, c’était seulement en mêlant au genre de l’épître celui de l’élégie, ce qu’il fait justement dans Les Regrets, qu’on pouvait faire acquérir quelque lustre à l’épître. On notera aussi que, dans ce même chapitre de La Deffence, aussitôt après l’épître, Du Bellay évoque la satire, qui sera l’autre grand modèle générique des Regrets, en exprimant les mêmes réserves. « Autant te dy-je des Satyres… »,

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