LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Le sens des institutions juridictionnelles

Note de Recherches : Le sens des institutions juridictionnelles. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  2 Novembre 2013  •  4 693 Mots (19 Pages)  •  857 Vues

Page 1 sur 19

Introduction

Comme il n’existe pas de société sans droit (ubi societas ibi jus disaient les Romains), il n’existe pas de société sans juge. Dans une assez large part, le droit ne saurait être d’application spontanée, – s’exécuter par lui-même (du latin spontaneus : par soi-même) –, nécessitant alors l’intervention d’un tiers indépendant et impartial pour se réaliser.

NB : cause principale de ce besoin : les règles juridiques sont générales, abstraites et obligatoires, c’est-à-dire qu’elles s’appliquent et qu’elles s’imposent à tous. Par conséquent, il faut les rendre concrètes en les appliquant à une situation concrète.

Mais parfois, l’application spontanée du droit s’avère impossible, la règle prévoyant expressément la nécessité de l’intervention d’une autorité étatique qui, seule, permet de la rendre effective. Par exemple, l’adoption d’un enfant ou encore un divorce par consentement mutuel.

D’autres fois, hélas bien plus fréquentes, l’application spontanée du droit échoue, ce qui donne naissance à une contestation. Ce « litige », va alors être tranché par un juge qui, de la sorte, va dire le droit (jurisdictio, univerbation de juris et dictio) et réveiller sa sanction.

Au final, lorsque l’application du droit n’est pas ou ne peut être spontanée, il faut l’intervention d’un juge, autrement appelé une « institution juridictionnelle », d’où l’intitulé du cours.

§ I. Le sens des institutions juridictionnelles

Pour en revenir à ce qui nous intéresse, « institution » n’est pas « contrat » et « juridictionnel » n’est synonyme ni de « juridique » ni de « judiciaire ».

Une institution est ce qui est institué par les hommes. Elle est une organisation, une construction humaine. Elle a donc ontologiquement une fonction, un but, puisqu’on ne se donne pas la peine d’organiser quelque chose pour rien.

Le but est déterminé par l’adjectif « juridictionnelles » !

« Juridictionnel » et « judiciaire » ont pour racine commune jus, qui signifie « justice ». Le but des institutions juridictionnelles ou judiciaires est donc de rendre la justice.

Différents types de justice : justice civile, administrative et pénale. Au sein de ces différentes justices, il faut encore faire des distinctions entre plusieurs juridictions (de droit commun et spécialisées). En il existe aussi des degrés de juridiction, toute personne succombant lors d’un procès ayant, en principe, le droit d’exercer un recours devant un autre type de juridiction : les cours d’appel.

Par ailleurs, la justice nécessite l’intervention d’un certain nombre d’acteurs, qui sont autant d’institutions indispensables à son fonctionnement.

Dès lors, on comprend la tentation de ne plus raisonner en termes de « juridiction », de « juridictionnel », mais, plus largement peut-être, de « justice », de « judiciaire ». En effet, la justice paraît dépasser le cadre des juridictions stricto sensu, les murs des tribunaux, les avocats participant, par exemple, à sa mise en oeuvre.

Pour autant, outre que le point central du système judiciaire demeure la juridiction, lieu où l’on dit le droit, l’adjectif « juridictionnel » a précisément pour intérêt de mettre en avant l’importance du caractère institutionnel de la discipline : la juridiction, autrement dit le juge, est la première des institutions qui concourent à la justice.

Les institutions juridictionnelles sont l’ensemble des mécanismes, des fonctions et des organes dont le but est, par interaction, de concourir à rendre la justice par la mise en œuvre des règles de droit et selon des principes préalablement déterminés.

§ II. L’histoire et l’évolution des institutions juridictionnelles

Il ne s’agit aujourd’hui de s’intéresser qu’à l’histoire des institutions qui fondent actuellement l’ordonnancement judiciaire français, bref à l’histoire des institutions juridictionnelles modernes.

Mais cette histoire est importante, car elle révèle les caractères politique et stratégique de ces institutions. Comme le souligne le professeur Roger Perrot, « selon la conception libérale, démocratique ou autoritaire d’un régime, le recrutement des juges change, leur statut n’est pas le même, les pouvoirs dont il dispose sont différents et l’organisation des professions judiciaires n’est pas identique ». Qu’en est-il en France ?

Cette histoire des institutions juridictionnelles est faite de couches successives, chacune correspondant à un changement politique majeur. Il faut donc distinguer :

A. La période révolutionnaire

Les cahiers de doléances rédigés au printemps 1789, à la suite de la convocation à Versailles des Etats généraux par Louis XVI, contenaient de façon quasi unanime le souhait d’une réforme de la justice d’Ancien Régime. Celle-ci constituait, en effet, l’un des principaux vecteurs d’une société profondément inégalitaire :

- la noblesse et le clergé bénéficiaient par exemple d’un privilège de juridiction, c’est-à-dire que, en raison de leur classe sociale, les nobles et les clercs étaient jugés par des juridictions qui leur étaient propres : tribunal du point d’honneur (mettre fin aux duels) et chambres de la tournelle (magistrats qui siégeaient à tour de rôle) pour les nobles ; officialités pour les clercs ;

- la vénalité des charges de judicature obligeait chaque plaideur à payer son juge, ce dernier n’étant pas rémunéré par l’Etat. Plus exactement, c’est celui qui gagnait le procès qui faisait présent à son juge d’une somme d’argent appelée « épices » (car, au départ, il s’agissait de présents en nature, et non d’argent).

- en matière pénale, les Parlements (nom des cours d’appel d’Ancien Régime) étaient réputés pour rendre des décisions en équité, ce qui avait pour avantage une certaine souplesse, mais pour inconvénient de produire une justice arbitraire : « Dieu nous garde de l’équité des Parlements » disait-on alors. Les nobles n’encouraient de toute façon pas les mêmes peines que les roturiers.

Pas d’égalité, pas de gratuité, pas de sécurité (même si ce constat serait, dans une certaine mesure, à relativiser : quelques garde-fous quand même). Il n’est donc pas étonnant que l’une des premières réactions révolutionnaires fut d’abolir, lors de la nuit du 4 août 1789, les juridictions seigneuriales, la plupart des privilèges de juridiction, ainsi que la vénalité des charges. Les

...

Télécharger au format  txt (30.7 Kb)   pdf (261.5 Kb)   docx (20.1 Kb)  
Voir 18 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com