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L'équilibre Contractuel

Mémoire : L'équilibre Contractuel. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Septembre 2013  •  3 291 Mots (14 Pages)  •  3 275 Vues

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L’équilibre contractuel

 

Le terme d’équilibre est porteur d’un double sens dont la combinaison est riche de significations. L’équilibre, c’est tout d’abord l’égalité, puisqu’il nécessite une juste répartition des charges autour d’un centre de gravité ; et c’est ensuite la stabilité, puisque l’ensemble ainsi conçu est propre à demeurer dans sa position, sans mouvements imprévisibles – et s’il est bien assuré, même une force extérieure ne peut facilement le rompre.

 

On voit dès lors combien cette notion peut intéresser la matière contractuelle ; le droit recherche précisément la stabilité et la justice des situations juridiques. Cependant, le contrat est le fruit de la volonté humaine, ou plutôt du fruit de la rencontre de plusieurs volontés, parfois tendues vers un but unique ou des buts complémentaires, parfois aussi poursuivant des buts antagonistes. Dès lors, l’équilibre contractuel pose question - comment assurer la justice de l’échange, permettre sa stabilité, atteindre le point idéal ?

 

Historiquement, la réponse a varié en fonction des conceptions politiques, économiques mais aussi philosophiques et morales des différentes époques. Le Code civil de 1810 était imprégné de l’héritage du XVIIIème siècle, qui prenait la forme de l’expression célèbre d’« autonomie de la volonté ». Ainsi, consacra-t-il une conception subjective de l’équilibre contractuel, fondé sur l’idée de libre engagement : « ce qui est contractuel est juste ». L’influence était en réalité triple : celle des Lumières et de Kant, privilégiant la capacité du sujet raisonnable à s’obliger de lui-même et pour lui-même ; celle du libéralisme économique d’Adam Smith, affirmant que la poursuite par chacun de son intérêt particulier devait aboutir au plus grand bien de tous ; enfin, plus discrète peut-être, celle du droit canon, mettant en avant le respect de la parole donnée et la loyauté morale. Ainsi, l’homme, en confrontant sa volonté à celle de l’autre, ne pouvait qu’agir pour son profit et pour le bien commun, ce qui assurait l’équilibre. D’où l’alinéa 1er de l’article 1134 du Code : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

C’est cependant sur ce même texte, et en particulier sur les mots « légalement formées » que les tenants des théories objectives des années 1930 devaient se fonder pour contester l’autonomie de la volonté. D’abord, celle-ci n’est pas autonome, puisqu’elle ne tire son pouvoir final que de la loi. Ensuite et surtout, elle ne suffit pas à assurer l’équilibre contractuel. Il est illusoire de penser que chacun est libre de contracter selon sa volonté, et capable de trouver le juste équilibre dans la confrontation avec autrui ; car les situations de contrats « obligés » sont nombreuses, et les disparités de puissance très importantes. C’est sur cette base que se développe, dans le contexte difficile de l’époque, un véritable ordre public contractuel et économique (dont l’exemple type peut être la fixation de fourchettes de prix par l’Etat, qui ne disparaîtront qu’en 1986).

De cet héritage historique, notre époque retire deux conceptions de l’équilibre contractuel. L’une, dite « néo-libérale », critique les excès d’un ordre public rigide et souhaite qu’une plus grande part soit laissée au pouvoir de la volonté individuelle, l’intervention étatique devant se situer « a priori », en assurant l’égalité des armes.C’est l’idée qui soutend le droit de la consommation et le « petit » droit de la concurrence. L’autre, dite « solidariste », se fonde sur la « redécouverte » de l’alinéa 3 de l’article 1134 : « [les conventions] doivent être exécutées de bonne foi » ; le contrat est vu comme une « mini-société » dont l’équilibre est assuré par le contrôle du juge.

Mais ces deux conceptions doctrinales, si elles exercent toutes deux une certaine influence sur l’idée d’équilibre contractuel, ne suffisent pas à expliciter la réelle problèmatique de la notion. Deux nouvelles idées, entremêlées, doivent se greffer sur la réflexion : l’opposition entre équilibre originel et équilibre dynamique ; opposition entre pouvoir souverain de la volonté des parties, et pouvoir du juge : l’équilibre contractuel doit-il s’entendre d’un équilibre de puissance des volontés souveraines, contrôlé a priori, ou d’un équilibre de contenu, et d’effets, contrôlé a posteriori par le juge ? L’enjeu est la sanction : soit le contrat ne pourra être qu’annulé, son existence étant niée dès l’origine du fait du déséquilibre des volontés ; soit il pourra être sauvé et modifié, son équilibre étant rétabli au mépris des dispositions originelles.

 

Bien qu’on ait constaté au cours du XXe siècle une évolution allant vers l’augmentation du pouvoir du juge, force est aujourd’hui de constater l’existence d’un cumul des protections, chacune possédant un dynamisme propre. Le contrôle opéré a priori, portant sur les conditions de conclusion du contrat (I), limité dans son domaine et radical dans ses effets, demeure ; le contrôle du contenu et du résultat du contrat, permettant un rééquilibrage, gagne en vigueur (II) ; mais il peine à s’affirmer, si bien qu’il emprunte parfois l’habit de l’autre.

 

I – L’équilibre assuré par le contrôle des conditions de conclusion du contrat

 

C’est là la conception de l’équilibre contractuel héritée du libéralisme et corrigée par les droits catégoriels. Classiquement, c’est l’intégrité du consentement qui est assurée, comme condition de l’équilibre (A). Appréciée strictement, elle a pour corollaire l’intangibilité de principe de la situation acquise, celle-ci étant présumée équilibrée (B).

 

A) - L’intégrité du consentement

La conception classique du Code civil s’intéresse aux facteurs susceptibles de vicier le consentement (1). Mais le droit contemporain va plus loin en exigeant un consentement éclairé (2).

1) La théorie classique : les vices du consentement

La problématique est la suivante : au moment de la conclusion du contrat, un vice affecte la volonté du contractant qui s’engage dans une relation déséquilibrée. Le Code civil distingue trois vices : erreur, dol, violence. S’agissant du contrôle

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