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L'ouvrage public

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Par   •  5 Avril 2016  •  Dissertation  •  2 089 Mots (9 Pages)  •  2 158 Vues

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Sujet: L’ouvrage public

Commentaire d’arrêt : CE, 9 déc.2011, n° 333756, Lahition

Les ouvrages publics sont des « biens immeubles résultant d’un aménagement, qui sont directement affectés à un service public » (Avis « Béligaud »), ou plus largement à l’utilité publique. Toutefois dans le cadre des transformations du statut des grandes entreprises publiques en société de droit privé, se pose la question de savoir si ses biens immobiliers conservent ou non leur caractère d’ouvrage public. La société EDF, par exemple,  est devenue depuis la loi du 9 août 2004, une société de droit privé. C’est dans ce contexte que s’inscrit la décision, soumise à notre étude, du Conseil d’Etat le 7 novembre 2011.

En l’espèce, la propriété de Mme B. supportait des ouvrages de distribution électrique irrégulièrement implantés apparentant à la société anonyme de droit privé EDF. Mme B. saisit dans un premier temps le juge civil qui a déclaré être incompétent en la matière. La requérante saisi ensuite le tribunal administratif puis la cour administrative d'appel de Bordeaux afin de faire constater une emprise irrégulière.

Par un arrêt en date du 12 juin 2003, la CAA de Bordeaux a admis la recevabilité du  recours Mme B. Constatant que la société EDF ne possédait  ni droit ni titre délivré par Mme B. quant aux ouvrages situés sur sa propriété, les juges du fonds reconnaissent l’emprise irrégulière. Toutefois, la Cour rejette  les conclusions présentées aux fins de suppression des ouvrages au motif que les poteaux auraient été spontanément supprimés par EDF.

Or en réalité, les ouvrages d’EDF étaient constitués d’un socle de béton supportant le transformateur et six poteaux électriques dont quatre en service. C’est pourquoi, face au refus de la CAA, Mme. B  a engagé une nouvelle procédure tendant à ce qu'il soit enjoint à EDF de supprimer ses ouvrages.

Le 2 janvier 2008, le tribunal administratif de Bordeaux a considéré que les conclusions à fins d'injonction étaient présentées à titre principal et étaient par conséquent irrecevables. Mme B fait alors appel à la décision.                                                                                        Le 1er septembre 2009, la CAA de Bordeaux a confirmé le rejet également la demande de la requérante au motif que cette dernière n'avait pas présenté des conclusions à fins d'injonction sur le fondement de l'article L. 911-1 du Code de justice administrative. Mme B saisit alors le Conseil d’Etat.

Les ouvrages de distribution électrique litigieux peuvent-ils perdre leur qualité dès lors qu’ils ne sont plus utilisés ? Est-il possible de procéder à leur démolition, à l’encontre du principe d’intangibilité qui les protège ?

Le 9 décembre 2011, le Conseil d'État annule l’arrêt d’appel et fait droit à la demande de l'intéressée.  La Haute juridiction administrative reconnait  la qualité d’ouvrage public au dispositif  de distribution électrique, ainsi qu’aux deux poteaux non utilisés. Dès lors, l’absence d'utilisation étant sans incidence sur leur qualité, la juridiction administrative, munie de son pouvoir d’injonction, a procédé à la démolition de l’ouvrage litigieux.

                     

  1. Le caractère d’ouvrage public maintenu malgré l’absence d’utilité.

Pendant longtemps a prévalu  l’adage selon «  l’ouvrage public mal planté ne se détruit pas », même s’il est construit à la suite d’une emprise irrégulière. Dans notre cas d’espèce, la requérante souhaite la démolition de l’ouvrage litigieux, ce qui porte à réfléchir dans un premier temps sur le principe d’intangibilité  de l’ouvrage public.

A/ L’abandon d’une conception stricte de l’intangibilité de l’ouvrage public.

Depuis la première moitié du XIXe siècle, l’ouvrage bénéficiait d’une immunité  interdisant au juge d’adresser des injonctions à l’administration. De même, alors que le plus souvent l’implantation irrégulière et forcée de l’ouvrage public se fait sur la propriété privée et constitue une véritable voie de fait, le juge judiciaire, est privé de son pouvoir de faire cesser la voie fait en prescrivant en urgence les mesures de remise en état.                                                                      Ainsi, l’application stricte de ce principe  privait le particulier de sa propriété sans avoir à recourir à la procédure d’expropriation. En contrepartie, le juge judiciaire constatant le transfert, à l’administration d’indemniser le propriétaire du terrain envahi. En réalité, le droit à l’indemnisation n’est pas équitable puisque le propriétaire de l’ouvrage litigieux y trouve son avantage en devenant propriétaire de l’emplacement occupé irrégulièrement alors que le veritable proprietaire ne peut que se soumettre à cette fatalité. Certains auteurs ont tenté de justifier la rigidité de ce principe, expliquant qu’il sert à la fois l’intérêt général et l’intérêt financier, ces deux intérêts étant, par ailleurs, liés. Aussi, la démolition d’un ouvrage dont la finalité générale est incontestable entrainerait des frais pour l’administration, laquelle serait surement obligeait de reconstruire, ailleurs, l’ouvrage présumé nécessaire à l’intérêt général.                                                                             Néanmoins, cette théorie de l’expropriation indirecte a rapidement été anéantie par l’arrêt « Baudon de Mony » (cass.Ass.plén, 6 janvier 1994). Dans cet arrêt, la Cour de cassation s’est prononcé à l’égard de l’édification par EDF d’un barrage sur des terrains privés. La Haute juridiction a affirmé que le transfert de propriété n’ayant pas été sollicité par les propriétaires, EDF ne pouvait « intervenir qu’à la suite d’une procédure régulière d’expropriation ».

Pour autant le principe d’intangibilité subsiste mais il est désormais privé de ses effets brutaux. Ainsi, qu’advient-il des biens immobiliers des entreprises publiques transformée  en société civiles, perdant leur utilité publique ?

B/ L’absence de répercussion de la  perte d’affectation sur la qualification d’ouvrage public.

L’affectation de l’ouvrage immobilier à l’utilité générale est indispensable à sa qualification d’ouvrage public. Dès lors, suite à la transformation d’EDF en une personne de droit privé, le Tribunal des conflits en avril 2010 « Soc. ERDF ») à estimé qu’un transformateur électrique devenu propriété d’une personne privée reste ouvrage public car « directement affecté au service public de distribution électrique ». La Haute juridiction développe ensuite dans un avis que, la transformation  du statut « ne permet aucune remise en cause des biens d’EDF ».  Par la suite, dans un avis du 29 avril 210 « Beligaud », le CE affirme qu’étant directement affectés au service public de l’approvisionnement et soumis aux contraintes de l’intérêt général, les ouvrages d’EDF  conservent leur qualité d’ouvrage public.

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