Analyse linéaire Juste la fin du monde, partie 1 scène 8

Jean-Luc LAGARCE, Juste la fin du monde (1990), Partie 1 scène 8: L’oracle de La Mère

Introduction :

Juste la fin du monde est une pièce de théâtre écrite par Jean-Luc Lagarce en 1990. Elle interroge l’impossibilité de communiquer et de dire adieu. Elle met en scène Louis, jeune écrivain retournant dans la petite ville dont il est originaire pour annoncer à sa famille, qu’il n’a pas vue pendant douze ans, qu’il va mourir d’un mal incurable. Les personnages se révèlent cependant incapables de se communiquer ce qu’ils éprouvent et de se comprendre, dans une tragédie contemporaine à la fois individuelle et familiale. Dans cet extrait de la scène 8 partie 1, la Mère dialogue seule avec Louis. Dans une longue tirade, elle anticipe le scénario qui pourrait se jouer lors de la confrontation entre ce dernier et ses frère et sœur. Nous nous demanderons ainsi comment la Mère anticipe cet évènement ? / En quoi les portraits qu’elle fait de ses enfants permettent à la mère d’annoncer la tragédie à venir / de montrer ses inquiétudes

LECTURE...

On peut distinguer 2 parties dans cet extrait. Dans une première partie, de la ligne 1 à la ligne 21, la mère anticipe le comportement de ses plus jeunes enfants : Antoine et Suzanne lorsqu’ils parleront à leur grand frère Louis. Ensuite, dans une deuxième partie, de la ligne 22 jusqu’à la fin de l’extrait, elle anticipe la réaction qu’aura ce dernier.

I. Anticipation du comportement de ses plus jeunes enfants

La mère commence l’extrait par annoncer la volonté de ses plus jeunes enfants Antoine et Suzanne. Le futur « Ils voudront t’expliquer » nous montre que ces derniers veulent parler à Louis et le confronter par rapport à son absence. La mère anticipe cependant que ces derniers le feront « maladroitement » et cela « car ils auront peur du peu de temps que Louis leur donne ». Elle semble avoir elle aussi du mal à parler à Louis, elle a également peur du peu de temps qu’il lui accordera. Nous pouvons le voir à travers sa façon de parler, elle utilise beaucoup les conjonctions de coordination « et » (et « ou ») : « et il est probable » ; « et maladroitement » ; « et cela sera » ; « et brutalement » (« ou je ne suis » ; « ou tu souriras »). En effet on dirait que cette dernière ne prend pas le temps ou n’as le temps de construire ces idées dans sa tête et les oralise pendant qu’elle y réfléchi. Nous pouvons voir qu’elle en a conscience vu qu’elle prend la peine de reformuler ses idées « ce que je veux dire » (et utilise également à plusieurs reprises l’épanorthose). Cette hypothèse est ensuite confirmée : « moi aussi je me doute que tu ne vas pas traîner très longtemps auprès de nous ». Elle continue son discours par affirmer que Louis a aussi peur, mais de la réaction de sa famille « tu étais à peine arrivé tu pensais déjà que tu avais commis une erreur et tu aurais voulu aussitôt repartir ». La mère est sûre de son propos, en effet elle utilise l’impératif : « ne me dit rien, ne me dit pas le contraire ». Elle reprend ensuite ses propos concernant ses plus jeunes enfants. Elle réaffirme encore une fois que ces derniers auront peur « du peu de temps » et qu’ils s’exprimeront « maladroitement ». Elle renchérit sur leur façon de s’exprimer on la qualifiant d’adjectifs péjoratifs : « cela sera mal dit ou dit trop vite ». Elle justifie cette maladresse par le caractère de ces derniers. En effet ils sont « ils sont brutaux, l’ont toujours été et ne cessent de le devenir » : cette expression nous montre également que leur façon de s’exprimer ne changera pas de sitôt. Elle insiste sur cette idée en utilisant des polyptotes : « brutalement », « brutaux » et l’expression « c’est leur manière ».

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