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Étude de la pièce de théâtre Fin de partie de Beckett

Dissertation : Étude de la pièce de théâtre Fin de partie de Beckett. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  13 Décembre 2012  •  8 438 Mots (34 Pages)  •  2 739 Vues

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FIN DE PARTIE

 Samuel Beckett. Publié en 1957

Contexte : années 50 = désillusions : ravages de la bombe atomique, découverte de l’horreur des camps d’extermination nazis, mouvements d’indépendance dans les colonies, ségrégation raciale et maccarthysme aux USA, révèlent que toute nation, même démocratique, a sa part d’ombre. Tandis que l’URSS s’enferme dans le stalinisme, la guerre froide =climat de suspicion. En France, l’hiver 54 montre les inégalités sociales et contraste avec la société de consommation la recherche du confort. Guerres : Corée dès 1950, guerre d’Algérie à partir de 1954 etc.

→ temps de crise → sentiment de vide

→ « utiliser la théâtralité* pour mieux dénoncer celle de la condition humaine »

∟ prise de conscience de la solitude humaine, horreur des gestes mécaniques qui font ressortir le non-sens de la vie. L’action dramatique, avec les péripéties attendues, disparaît : celle-ci, menant au dénouement, n’est en effet qu’un mensonge dans la mesure où la vie n’est jamais vécue dans le but d’une fin. FdP ne présente donc que des personnages qui attendent un dénouement qui ne vient pas : rien ne se passe, les événements ne consistent que dans la chute d’un objet ou une promenade en rond qui soulignent le dérisoire de toute action humaine. Le temps se perd dans la répétition et use les repères spatiaux. Les dialogues et la fréquence des silences ne donnent à entendre que l’inconsistance et le caractère mécanique de toute communication, l’absurdité et l’incohérence des échanges. Tous ces procédés visent moins à révolutionner les formes théâtrales qu’à créer chez le spectateur un sentiment d’angoisse, qu’il devienne lucide sur les limites de la condition humaine. Empêcher toute identification.

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Scène d’exposition → déroutante. Semble moins destinée à expliquer qu’à forcer le spectateur à mettre en question la possibilité même de signifier. Le dictionnaire Robert définit le mot fin comme le « point d'arrêt ou arrêt d'un phénomène dans le temps ». Et le mot partie comme : a) élément d'un tout (portion, fraction) ; b) celui qui plaide contre quelqu'un, adversaire ; c) un projet, un divertissement, un jeu et, par extension, une lutte ou un combat. Le titre Fin de partie suggère une phrase finale où des personnages sont engagés dans un rapport particulier, placée sous la tutelle du temps et rattachée à l'univers du jeu. Beckett aurait déclaré à un comédien qui interprétait Hamm : « Hamm est un roi dans cette partie d'échecs perdue dès le début ». Tel un roi sur un échiquier, Hamm trône en effet dans son fauteuil comme la pièce maîtresse du jeu qui commande aux autres pièces et notamment à Clov qu'il envoie faire ses quatre volontés d'un bout à l'autre de l'échiquier, à l'image de la dame capable de se déplacer dans toutes les directions. Les mouvements de Hamm, eux, sont très limités, comme ceux du roi sur un échiquier, qui ne peut se déplacer que d'une seule case à la fois. Mais plus généralement, on peut lire la pièce comme une méditation sur la fin et le jeu qu'elle induit. Dès sa première réplique, Clov dit : « Fini, c'est fini, ça va finir, ça va peut-être finir ». La fin, d'abord annoncée comme révolue, est finalement posée comme une hypothèse à l'intérieur de laquelle le jeu devient possible : la fin de la partie, à la fois attendue et sans cesse remise à plus tard, donne matière à théâtre. Qu'est-ce qui va peut être finir dans Fin de partie : la relation de servitude-dépendance de Hamm et de Clov, qui n'en finit pas de ne pas finir ; le « roman » de Hamm, qu'un « effort créateur prolongé » empêche de finir ; les objets qui disparaissent un à un ; l'humanité qui s'éteint ; la parole qui se raréfie ? Clov annonce inlassablement ce qu'il souhaite être la fin (dans le double sens de « but » et de « terme ») des choses, de l'histoire, de la pièce. Mais la fin, comme celle de la sonnerie du réveil, est « inouïe ». Parce qu'elle ne dépend pas des personnages, réduits à la jouer. En effet, ils savent qu'ils sont une partie d'un tout qui les dépasse, d'un ça indéfini, qui « avance », « suit son cours », loin de sa fin. Ce qui est appelé à finir, ce n'est que le jeu, leur partie, qui ouvre sur un au-delà dont on ne sait pas s'il serait la répétition du même ou l'avènement du nouveau. 2

 Structure, composition de l’œuvre.

A première vue, Fin de partie peut donner l'impression de n'être qu'une accumulation hasardeuse de micro-séquences sans liens les unes avec les autres, et n'obéissant à aucun principe de composition. Pourtant, à y regarder de plus près, on comprend pourquoi Beckett a pu écrire à propos de sa pièce : « Il n'y a aucun hasard dans Fin de partie : tout est construit sur des analogies et des répétitions. »

1) La déconstruction de la composition traditionnelle

Dans Fin de partie, les scènes et les actes ont disparu ; les quatre personnages sont sur scène dès le début de la pièce et y restent jusqu'à la fin : seuls Nagg et Nell disparaissent dans des poubelles qui matérialisent la constance de leur présence. Contrairement au théâtre classique divisé en actes et en scènes définis par les entrées et les sorties des personnages, et qui modifient le cours de l'action, les va et vient de Clov ne découpent pas de scènes, et ne font pas progresser l'intrigue.

« Qu'est-ce qui se passe ? » se demande Hamm qui, pas plus que le spectateur, n'est capable de répondre à cette question. L'intrigue se réduit à l'attente d'une fin hypothétique : « ça va peut-être finir », annonce Clov. Mais les personnages sont incapables d'agir : « Tout s'est fait sans moi », dit Hamm, tandis qu'ils constatent que « quelque chose suit son cours ». Cette chose qui suit son cours et qui pourrait ressembler à une intrigue reste impalpable, indéfinie et abstraite.

Comme à la fin d'une partie d'échecs dont Beckett dit s'être inspiré des mouvements pour écrire Fin de partie, les combinaisons sont limitées, le jeu n'a plus d'ampleur, et on a du mal à finir. « Pourvu que ça ne rebondisse pas », dit Hamm quand Clov aperçoit par la fenêtre quelque chose qui pourrait donner lieu à une

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