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Commentaire de l'acte V, scène 5 de Britannicus

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Par   •  25 Novembre 2017  •  Commentaire de texte  •  1 341 Mots (6 Pages)  •  11 107 Vues

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Commentaire de Acte V, scène 5 de Britannicus de Jean Racine

Introduction : Racine raconte dans Britannicus pièce représentée en 1699, « la tragédie d’un monstre naissant », Néron. A l’acte V scène 5 on vient d’apprendre la mort attendue depuis le début de la pièce de Britannicus et l’on va savoir de la bouche de Burrhus comment cela est advenu. Il s’agit là d’une scène paradoxale puisque le récit sera très violent quoique l’on ne montre rien au spectateur. On peut alors s’interroger sur la question suivante : Comment Racine, malgré les contraintes de la tragédie classique, parvient-il dans ce récit de Burrhus à susciter l’émotion du spectateur ? On verra tout d’abord l’art du récit théatralisé de Racine, puis la dimension violente de la scène et enfin en quoi consiste sa dimension symbolique.

L’art du récit de Racine est visible d’abord par son sens du pittoresque. Bien entendu on n’est pas ici dans un drame romantique à la Victor Hugo et les éléments pittoresques de la scène demeurent relativement discret. Ils n’en sont pas moins présents. Il s’agit pour Racine d’évoquer un banquet officiel tel qu’il s’en déroulait dans l’Antiquité. Et c’est bien à cela qu’assiste le spectateur avec « le lit » de table sur lequel Britannicus tombe « sans chaleur et sans vie »  v 1632, mais aussi prononcée par Néron au début de la scène vers 1623 à 1626 : « Pour achever ce jour sous de meilleurs auspices/ Ma main de cette coupe épanche les prémices », prière accompagnée d’une libation, sacrifice propitiatoire traditionnel. Dans cette scène l’attention du spectateur est attirée sur « la coupe » fatale, véritable arme du crime qui circule du vers 1622 ou Néron s’en est emparé, pour servir ensuite à la libation vers 1623 à 1626, enfin vers 1628 : « La coupe dans ses mains par Narcisse est remplie ». Racine sait également construire un récit et l’on en suit bien les étapes dans la tirade de Burrhus : d’abord la pseudo scène de réconciliation des vers 1620 à 1627 ou les marques du temps « A peine » vers 1620, « soudain » vers 1621 et de nouveau « à peine » vers 1629, comme la série des verbes juxtaposés « Il se lève, il l’embrasse, on se tait » vers 1621 soulignent la rapidité de l’action. En effet l’empoisonnement, deuxième étape du récit n’occupe que quelques vers : 1628 à 1632. Enfin les réactions des différents participants du banquets se succèdent rapidement dans les derniers vers : d’abord les courtisans, puis Néron et Narcisse et enfin Burrhus. Outre le travail de la structure et la rapidité de la scène, ce qui renforce son efficacité, c’est son aspect théâtral ou de « théâtre dans le théâtre ». En effet, on a l’impression d’assister là à une véritable scène de théâtre au sein du récit de Burrhus avec les répliques des personnages, comme celles de Néron reproduites à deux reprises au style direct, nous donnant ainsi à entendre sa voix, ex : vers 1639 à 1640 : « Ce mal dont vous craignez, dit-il, la violence/A souvent sans péril attaquer son enfance ». On a également des didascalies avec les gestes d’effusion et l’embrassade du début de la scène puis avec la circulation de la coupe de poison vue plus haut et enfin les attitudes de Néron vers 1637-1638 : « Cependant sur son lit il demeure penché/D’aucun étonnement il ne paraît touché. ». Enfin on retrouve les spectateurs de cette sinistre comédie en la personne des courtisans qui vers 1634-1635 réagissent diversement : « La moitié s’épouvante et sort avec des cris/Mais ceux qui de la cour ont un plus long usage/Sur les yeux de César composent leurs visages ». On vient donc de voir en quoi consiste l’efficacité de Racine dans son récit. On va voir à présent comment s’exprime ici la violence et comment elle suscite l’émotion des spectateurs.

La violence de cette scène est en effet très forte. Elle s’explique par plusieurs raisons. La première d’entre elles tient au contraste frappant entre l’occasion choisie par Néron pour commettre son meurtre et celui-ci. En effet, et en cela Racine suit son modèle antique, l’historien Tacite, Néron profite d’une cérémonie officielle de réconciliation qui se déroule sous la protection des dieux pour accomplir son geste cf vers 1625 : « Dieux que j’appelle à cette effusion », comme si finalement il les rendait complices de son crime. En outre l’extrême rapidité soulignée précédemment contribue encore à cette violence. Elle est exprimée notamment par le recours au présent de narration cf le vers 1621 vu plus haut, qui actualise et accentue la brutalité de la scène, mais aussi par la comparaison employée vers 1630 pour décrire l’effet fulgurant du poison sur Britannicus : « Le fer ne produit pas de si puissants efforts ». Le rejet de « Madame » au début du vers suivants, qui est comme un appel adressé à Agrippine, hache encore le rythme du vers. Mais la violence est également psychologique. Elle vient d’abord des courtisans eux-mêmes : ils sont d’abord spectateurs de la scène, comme on l’a vu précédemment, puis acteurs puisqu’une partie d’entre eux choisit non pas de fuir mais de « composer leur visage » en fonction de « César ». Ils sont donc tout aussi monstrueux que leur maître et, l’émotion passée, ne songent plus qu’à rester bien en cour, même si c’est celle d’un Empereur assassin. Enfin bien sûr la violence suprême provient de l’attitude de Néron lui-même puisque « D’aucun étonnement il ne paraît touché ». Ici il faut bien donner au mot « étonnement » son sens étymologique de « frappé par le tonnerre ». Le plus affreux est en définitive l’indifférence du monstre froid, Néron. Narcisse qui « veut en vain affecter quelque ennui » vers 1641, parce qu’il ne sait pas comme son maître l’art de feindre, de porter un masque mondain, est moins inhumain que l’empereur. On vient donc de voir comment Racine parvient sans montrer la scène de l’empoisonnement de Britannicus, à susciter pourtant chez le spectateur terreur et pitié devant la violence du récit de Burrhus. On va voir enfin en quoi consiste toute l’horreur de cette scène en abordant sa dimension symbolique.

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