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Les Nuer de Evans-Pritchard

Fiche de lecture : Les Nuer de Evans-Pritchard. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Mai 2023  •  Fiche de lecture  •  2 992 Mots (12 Pages)  •  331 Vues

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Fiche de lecture

Les Nuer. Description des modes de vie et des institutions politiques d'un peuple nilote

de Edward Evan Evans-Pritchard, rééd° Gallimard, coll° Tel, 1994

traduit de l'anglais par Louis Evrard

Préface de Louis Dumond

L'auteur – contexte de son travail

Edward Evan Evans-Pritchard (1902-1973) était professeur de sociologie au Caire1 lorsque le gouvernement anglo-égyptien lui commandite cette étude des Nuer, peuples nomades ou semi-nomades du Sud-Soudan sur les rives en amont du Nil et de ses affluents.

« Les Nuer » est donc une étude ethnographique portant sur ces populations d'environ 100 000 individus qui vivent au Sud-Soudan, et font partie des tribus nilotes, dont leurs voisins les Dinka, qui peuplent l'amont du Nil. Cette enquête de terrain s'est déroulée en deux périodes: la première de 1930 à 1931, la seconde de 1932 à 1933, cumulant ainsi douze mois consécutifs sur le terrain.

Edward Evan Evans-Pritchard fut un élève de Alfred R. Radcliffe-Brown, il lui succédera à la chaire d'anthropologie d' Oxford en 1950. « Les Nuer » est devenu un classique de l'anthropologie, au même titre que « Les Argonautes du Pacifique »3 de B. Malinowski, tous deux se réclament du fonctionnalisme, et mènent leurs enquêtes sur le terrain. Dans son approche, E.P apporte des nuances au fonctionnalisme en introduisant l'idée de structures qui organisent les sociétés et pré-existent, Claude Levis Strauss le qualifie de précurseur du structuralisme. E.P est tout le moins l'un des précurseurs de l'anthropologie sociale et politique, quand bien même, comme il est d'usage en anthropologie, ses théories et son approche ont pu être critiquées et remise en cause. Il n'en demeure pas moins un auteur de référence.

L'auteur, Edward Evan Evans-Pritchard, ou E.P comme l'appelaient ses élèves, ne nous dit rien des conditions dans laquelle lui est passée cette commande. On pourrait alors s'interroger sur l'objectivité réelle de son propos. En outre, dans son introduction, E.P (p 16 à 21*) nous rapporte dans quelles circonstances difficiles se déroulent ses travaux, tant par le dénuement et l'inconfort de ses moyens matériels que par l'hostilité des tribus qui « l'accueillent ». Les Nuer ont de bonnes raisons de ne pas vouloir collaborer avec l'anthropologue anglais...

Dans les premières pages (p 16 à 33), EP, après avoir localisé les principales tribus Nuer et les tribus voisines qu'elles sont amenées à côtoyer – de manière pas toujours pacifiques -, nous décrit dans quelles conditions il est accueilli par celles-ci. Il ne peut adopter comme B. Malinowski une position qui semble quelque peu surplombante, presque sur un piédestal, attirant la curiosité des villageois et de ses élites qui se plient volontiers aux interrogatoires du chercheur. E.P est accueilli avec hostilité et méfiance, nous dit celui-ci. Au mieux on le laisse s'implanter aux abords immédiats d'un village, ou au sein d'un campement en feignant l'ignorer, tout en épiant ses faits et gestes. Le temps passant, des contacts se créent malgré tout, les villageois, et les enfants en premier, en deviennent envahissants, surgissant dans la tente de l'auteur à tout moment de la journée, à un point tel qu'il éprouve mille difficultés à s'isoler et pouvoir ainsi rédiger ses notes. Pour autant la collaboration n'en est pourtant pas acquise; illustrant ses difficultés, E.P rapporte ce fameux dialogue de sourds (p 27-28) devenu mondialement connu.

Le livre – apports et thématiques abordés

Dans les premiers chapitres (p 33 à 116), Evans-Pritchard décrit l'environnement et le contexte agropastoral dans lequel évoluent les tribus Nuer, et l'importance qu'ont pour eux tant les conditions écologiques et que la conduite de leur troupeau (bovins essentiellement) ; ces deux facteurs conditionnent littéralement leur existence. On comprend toute l'importance vitale que revêt l'élevage chez les Nuer, et combien il focalise leur attention et préoccupations. Il souligne l'attachement de ces tribus à l'élevage bovin sur lequel toute leur vie et de larges pans de leur organisation sociale sont modelés. De l'importance de leur troupeau et de l'état de leur bétail, les Nuer tirent une grande fierté.

Dans cette partie où EP décrit l'environnement et les conditions auxquels sont soumis les Nuer, et dont ils dépendent entièrement pour leur survie, le fonctionnement social de leur tribu et l'organisation politique sans institution centralisée qui en découle sont mis évidence. Ce serait comme si c'était les conditions agroclimatologiques qui dirigeaient et organisaient en grande partie leur existence, leur imposant implicitement certaines règles indiscutables, les transhumances et l'implantation de camp en dépendent notoirement. Chaque tribu, ou segment de tribu, selon sa proximité avec un point d'eau, la valeur herbagère et les caractéristiques phytotechniques des terres sur lesquelles elles sont amenées à transhumer, suit un rythme dicté par l'exigence des saisons et de leur succession :  « Par cette alternance essentielle, sont réglées les allées et venues des villages vers le camp, (…) et ensuite des camps vers les villages (...) » (p117). Confirmant l'impératif que constitue le contexte agroclimatique, E.P. Écrit encore que « les besoins du bétail et les variations en ravitaillement [qui] font passer le rythme écologique de l'année dans le rythme social » (p119). En dehors de toutes institutions ou pouvoir centralisé, existent des lois non écrites imposées par les conditions du milieu. Ces transhumances de saison donnent lieu à toute une dramaturgie sociale, les plus âgés restant au village alors que les jeunes partent à l'avant avec une partie du troupeau. Ainsi deux grands moments structurent l'organisation sociale et les activités des Nuer, la saison sèche qui s'étend plus ou moins de janvier à avril-mai, et la saison humide de juillet à novembre (voir graphique :estimations températures et précipitations en pays Nuer, p 72). Certes, le bétail et la production de lait – un élément essentiel de leur alimentation, réservé aux plus jeunes et aux plus faibles en cas de pénurie – sont au centre de leurs préoccupations, mais les Nuer pratiquent

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