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Montaigne, Des Cannibales, Essais, 1580

Dissertation : Montaigne, Des Cannibales, Essais, 1580. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  18 Mars 2020  •  Dissertation  •  1 644 Mots (7 Pages)  •  1 104 Vues

Page 1 sur 7

Alexandre        1°4

Moya

Dissertation

Montaigne, Des Cannibales, Essais, 1580

Sujet : Montaigne dans Des Cannibales : « Ces nations me semblent donc ainsi barbares pour avoir reçu fort peu de façon de l’esprit humain et être encore fort voisines de leur naïveté originelle ».

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        La question de l’homme est posée depuis le XVIème siècle dans le genre de l’argumentation. Michel de Montaigne, écrivain français ayant vécu durant le même siècle, s’inscrit dans une sorte de paradigme entre ce genre et le mouvement humaniste, aussi en vogue à cette époque. L’humanisme est un courant littéraire qui place l’homme au cœur du savoir et qui a une grande ouverture d’esprit. Montaigne est donc le premier à placer les essais dans ce mouvement. Qualifiés comme l’œuvre de sa vie, les Essais vont tenter d’aborder le savoir et la mentalité humaine. L’humanisme est en effet très lié aux notions et valeurs scientifiques alors en plein essor et au début de leur considération. Dans les chapitres 31 et 32 des Essais, intitulés Des Cannibales et Des Coches, dont il est question, Montaigne s’interroge, réfléchit sur la condition humaine. Il expose et exprime un point de vue intemporel sur les mentalités européennes et américaines. En s’autodécrivant, il prend explicitement le parti des Amérindiens.

Mais en valorisant, chez les peuples indiens dont il prend la défense, la proximité avec la nature, Montaigne n’entre-t-il pas en contradiction avec l’humanisme, qui estime la culture et la civilisation au plus haut point ?

On étudiera donc en quoi les chapitres 31 et 32 des Essais peuvent-ils être contradictoires, premièrement en relativisant la notion de barbarie, deuxièmement en opposant la civilisation outre-Atlantique avec la nôtre et enfin en faisant l’éloge de la culture et de la vie amérindienne.

Dès le début de l’essai, Montaigne rentre dans une sorte de paradoxe dans ce qu’il conte. En effet, il entreprend un éloge qui inverse la hiérarchie de la voie commune et transforme les Européens en plus barbares que les Tupinambas. Le peuple amérindien dont il est ici question est un exemple pour montrer en généralité la pensée et la mentalité de ces hommes (cela facilite la compréhension). Ainsi, l’auteur s’attarde sur la notion de barbarie et la relativise. Il prend le parti des Indiens en décrivant et dénonçant les tortures pratiquées par les occidentaux. Et « quand ils virent le traitement qu’ils offraient à leurs prisonniers, et qu’ils étaient bien plus experts qu’eux en toute sorte de torture, ils se mirent à quitter leurs anciennes coutumes pour suivre celle-ci ». On remarque ici la simplicité de l’esprit de ces peuples (cette simplicité que nous allons retraiter plus tard, dans la suite de cette dissertation). Durant tout le chapitre, les Européens sont dépeints comme des antagonistes. En effet, la première grande idée de cet essai est que, l’Européen, dans son orgueil et sa cupidité, commet des atrocités impardonnables sans en prendre conscience.

Arrivés en Amérique, ils roulent aveuglément sur villes et villages, sans se rendre compte qu’ils déciment une population (en important des maladies, etc.) tout aussi humaine qu’eux, voire plus encore. C’est ce que l’auteur veut ici mettre en lumière et dénoncer. Les Espagnols pillent, tuent et torturent et le pire dans tout ça, c’est qu’ils ne se remettent pas en question et continuent de croire en ce préjugé qui est que l’Indien est sauvage, barbare et ne vaut pas la peine d’être considéré comme plus qu’un animal. Comme il le dit lui-même, « chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage ». Tout ce qui est étranger ou inconnu est directement perçu comme inférieur, médiocre et même dangereux. C’est dans cette optique que Montaigne casse en quelque sorte les idées reçues et inverse les rôles pour faire prendre conscience que le véritable barbare n’est pas celui que l’on croit. Il opère un changement, un renversement puisqu’il va à l’encontre des pensées. On retrouve cette hypothèse chez Claude Lévi-Strauss, un ethnologue, auteur et académicien éminent du XXème siècle. Il passa une majeure partie de sa vie à étudier et à comprendre dans le respect les peuples d’Amérique. Malgré les centaines d’années qui les séparent, tous deux en sont arrivés à la même conclusion. Lévi-Strauss a lui-même écrit dans son ouvrage Race et Histoire : « Le barbare, c’est d’abord celui qui croit à la barbarie ». Car dans l’absolu, qui sont les plus « barbares » entre les Tupinambas, ce peuple paisible et relativement pacifique qui ne cherche pas à s’étendre ou à conquérir et qui se contente de vivre dans la simplicité et sa beauté originelle et les conquistadors européens qui prennent possession des terres et des richesses tout en exterminant tout ce qui est susceptible de les gêner ?

C’est pour répondre à cette question que Montaigne va développer la deuxième grande idée de son œuvre, à savoir l’opposition de ces deux cultures et de ces deux consciences.

L’auteur, pour appuyer sa réflexion et sa confrontation, va réaliser un véritable éloge de la société en Amérique (au XVIème siècle bien entendu). Dans le chapitre Des Cannibales, il va longuement insister sur cette description méliorative et entretenir le « mythe du bon sauvage ». Plus on en apprend sur leur mode de vie, plus on est dubitatifs et même admiratifs. En effet, la description de leurs coutumes et mode de vie s’apparente à une utopie irréaliste : « pays très agréable, grande abondance de pissons, viandes et autres, … ». Ils n’ont « pas d’agriculture, de commerce, de métal ». Ils ne se font pas de soucis sur leur futur et ignorent la notion de propriété personnelle. Ils se considèrent tous comme « frères, pères ou enfants ». De plus, leurs valeurs et motivations sont complètement différentes des nôtres : ils font la guerre contre leurs voisins uniquement pour la gloire et la reconnaissance auprès des leurs. Là est souvent l’amalgame que font les occidentaux pour éviter de se prendre la tête : les Amérindiens ne mangent pas de la viande humaine pour se nourrir, « comme le faisaient autrefois les Scythes » (allusion à un peuple anthropophage européen : il défend ici les Indiens), mais pour montrer leur supériorité et leur bravoure. Ils avaient en effet bien assez de ressources pour subvenir à leurs besoins. Aussi, comme expliqué précédemment, les Amérindiens sont très simples dans leurs pensées et leur jugement est très influençable. Les conquistadors ont profité de cette naïveté pour s’emparer de leurs richesses tout en évangélisant les populations qui n’avaient pas ouvert les yeux et tenté de les confronter. Effectivement, si l’on se met à la place des Tupinambas, nous pouvons comprendre qu’ils aient pris les Européens comme des sortes de dieux qu’il faut écouter et imiter. L’auteur les compare aussi à des « fruits sauvages » lorsqu’il relativise ces termes. En effet, on peut considérer comme sauvage tout ce qui n’a pas été changé ou altéré par l’Homme et les peuples d’Amérique en font partie. Cette analogie méliorative montre que ce qui est sauvage est en quelque sorte pur et meilleur. Il qualifie ainsi les Européens comme « corrompus » et « abâtardis ».

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