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Les vœux forcés de Suzanne / Diderot

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Par   •  30 Avril 2022  •  Commentaire de texte  •  3 406 Mots (14 Pages)  •  260 Vues

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Littérature du 18è :

Les vœux forcés de Suzanne

INTRODUCTION :

La religieuse est un roman-mémoires achevés vers 1780 par Diderot et publié à titre posthume en 1796. Diderot cherche à dénoncer l’aliénation religieuse à travers les péripéties éprouvées par la figure pieuse de Suzanne.  En 1760, Diderot commence à composer un roman à partir d’une mystification afin de faire revenir le marquis de Croismare à Paris. Diderot et plusieurs de ses amis par le biais d’échanges épistolaires vont alors imaginer qu’une religieuse fait appel à l’auteur afin de l’aider à se relever de ses vœux. Il entremêle faits réels et expériences personnelles comme inspiration pour son roman. En effet, Suzanne est directement inspirée d’une religieuse de l’abbaye royale de Longchamp nommée Marguerite Delamarre, célèbre pour avoir écrit à la justice en 1758 demandant d’être libérée du cloître où ses parents l’avaient enfermée. De plus, Diderot s’inspire de son vécu en intégrant des éléments de la vie de sa sœur, morte folle dans un couvent (à nuancer car peu de preuves). L’extrait étudié aujourd’hui est une scène charnière du livre car il décrit le premier refus de Suzanne de rentrer dans les ordres, nourissant l’espoir de pouvoir échapper à un enfermement contraint. Le lecteur est témoin d’un véritable jeu de pouvoir entre Suzanne et l’autorité, à travers la prise de parole, seule arme à sa disposition. L’extrait débute avec un premier mouvement montrant le déroulement d’une cérémonie conventionnelle, puis un second mouvement marquant la prise du pouvoir par la reprise de la parole, avant de conclure avec le troisième mouvement qui porte sur la tentative de rébellion de Suzanne et sa condamnation.  

Joute pour le pouvoir passant par la parole. Scène charnière du livre.

Comment Diderot amorce une critique de la société ecclésiastique à travers la reprise de la parole par Suzanne et une description carcérale de la profession ?

 

[pic 1]

Partie 1 : « Tout le monde » à « et obéissance ? » : déroulement d’une cérémonie conventionnelle.

Diderot commence par introduire la scène de la cérémonie afin d’en montrer l’importance et les enjeux.

Début avec des tournures impersonnelles répétées (tout le monde, il y avait de jeunes personnes, celui qui présidait) créant un effet de masse anonyme, imposante. + Ils sont debout, montés sur des chaises : lignes verticales fortes montrant l’ascendance du public et des autres sur Suzanne à genoux : instaure dès le départ une pression et un poids.

Dès le départ : topos du seul contre tous.

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Description factuelle de comment se passe la cérémonie de profession : introduit la scène à venir.

Inversement dans le film : passage très très long du déroulement de la cérémonie avec toutes les étapes.

Premier paragraphe posant déjà une métaphore filée entre la cérémonie de profession et un procès juridique, l’Eglise et une prison : champ lexical de la prison (barreaux, attachées, grille) + « celui qui présidait » : utilisation du pronom démonstratif donnant l’idée que Suzanne est face à un juge omnipotent et innommable (surtout que « celui » est censé être anaphorique mais pas ici) qui « préside » devant le jury donc celui qui possède le pouvoir actuel. Plein de termes de l’univers juridique.  (DANS LE FILM : les appelées marchent à la chaine jusqu’au père, effet de condamné qu’on mène à la potence)

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« profond silence » : adjectif accentue que ce moment est solennel, sacralise le moment et pose l’importance de la parole dans le passage.

Premier paragraphe = une seule longue phrase divisée en trois propositions avec un crescendo : plus on avance dans le paragraphe plus la proposition est longue créant un nouvel effet de pesanteur et de solennité. + longueur de la phrase correspond à la longueur du moment et représente l’attente et la tension présente avant le début de la cérémonie tant redoutée.

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Début du discours direct : Usage du nom complet de Suzanne : effet solennel et officiel + rythme ternaire qui rend ce nom pesant par rapport à la légèreté du simple « Suzanne ». + nomination très officielle et complète renforçant l’opposition avec la masse anonyme et dépersonnalisée qui l’entoure.  

Promettez-vous : très important car le mensonge est un péché donc question cruciale + appelle à l’ethos avec l’usage du mot « vérité » : question cruciale qui cristallise la scène. DANS LE FILM :  « grand et redoutable serment », « le jour de votre jugement » 🡪 expose la gravité des paroles à prononcer.

Question encore une fois appartenant au registre juridique avec l’usage du nom complet et la formule topique plaçant Suzanne en place d’accusée.

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« je le promets » : on quitte la focalisation interne où l’on regardait la scène avec les yeux de Suzanne, on quitte la description initiatique pour entrer dans l’action avec le premier échange de parole qui vient dynamiser le tout. On entre enfin dans le tableau, comme si Suzanne rentrait de nouveau dans son corps pour sortir de la contemplation (écho à la seconde profession où Suzanne ne sort pas de la contemplation, est en dehors de son corps et ne se souvient de rien).

Premier « je » très important : affirmation d’une identité propre qu’on retrouve toujours en début de phrase, place principale. Effet de stychomities avec la phrase très courte pour montrer l’automatisation du discours et de la cérémonie.

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Seconde question : comme la première, question directe fermée qui ne suppose comme réponse que « oui » ou « non ». Pas de place à l’expression de l’allocutaire qui n’a donc pas de pouvoir dans sa réponse puisque la parole incarne dans ce passage une forme de pouvoir.

3 termes importants supposant la liberté de choix « plein gré, libre, volonté » mais apparaissant comme superficiels et dénués de leurs sens profonds à cause de la question fermée + écho à une cérémonie maritale : reprend les termes juridiques du mariage. Suzanne est dans un mariage avec Dieu mais non un mariage de passion, c’est un mariage froid.

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« je répondis « non » » : le je fort s’oppose à « celles ». Opposition entre une identité forte et personnelle et une masse compacte et impersonnelle avec le « ; » et la conjonction de coordination « mais » en charnière : double opposition syntaxique + opposition sémantique. 🡪 s’ajoute avec l’opposition entre les deux réponses NON VS OUI : antonyme carrément. Mais la construction de la phrase est en cadence majeure et du coup on entend que la voix de « celles ».

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