Le facteur humain
Fiche de lecture : Le facteur humain. Recherche parmi 302 000+ dissertationsPar TheGox • 28 Avril 2025 • Fiche de lecture • 2 548 Mots (11 Pages) • 129 Vues
Louis GRAGLIA Janvier 2000
Fiche de lecture N°1
"Le facteur humain"
De Christophe Dejours
L’auteur se propose, dans une première partie, d’aborder les problèmes théoriques à travers une analyse critique des présupposés de la recherche sur le facteur humain.
Une seconde partie développe les problèmes épistémologiques autours de la notion de facteur humain.
On peut tout d’abord distinguer deux orientations de sur le facteur humain :
Une première approche vise, dans une logique de sécurité, à connaître l’origine et les moyens de contrôle des défaillances humaines en situation de travail, tandis qu’un deuxième point de vue cherche à comprendre comment mobiliser, développer et gérer les ressources humaines, dans une optique de qualité.
Ces deux orientations de recherche sont fondées sur des présupposés théoriques différents concernant le modèle de l’Homme, le concept de technologie et le concept de travail :
- L’Homme, dans la première démarche (en terme de défaillance), est modulaire, c’est à dire régi par différents processus (physiologiques, psychologiques,…), analysables indépendamment les uns des autres.
La deuxième approche (en terme de ressource) considère en revanche un modèle holistique, selon lequel l’Homme est un acteur social et dont la conduite, soumise à une rationalité stratégique, s’interprète par rapport à l’unité que constitue le sujet.
- Dans la première approche ; la technologie, assimilée à la technique au sens américain, se réfère au matériel, à la connaissance des mécanismes qui permettent aux machines de fonctionner, tandis que la technique, dans la deuxième approche, fait référence à l’usage instrumenté du corps dans le travail, à la mise en œuvre des habiletés humaines.
- Les différentes conceptions du travail qui en découlent amènent à interpréter une défaillance comme une incompétence ou une insuffisance de prescription dans la première approche, comme le résultat d’une intention, d’une logique stratégique cohérente, selon le second point de vue.
Ces concepts étant ainsi définis, il s’agit maintenant de rendre compte des présupposés de la recherche sur le facteur humain en développant les différents sens attribués à la technologie, au rapport entre la technologie et le travail et à la modélisation, collective ou individuelle, de l’Homme.
Selon les différents axes de recherche sur le facteur humain, le concept de technologie revêt des sens différents.
On distingue plusieurs approches qui peuvent se caractériser à partir des interactions entre les trois pôles du triangle technologique : EGO-REEL-AUTRUI.
- Une première approche, centrée sur le système EGO-REEL, fondée sur le présupposé physicaliste, contourne le problème de l’hétéronomie de ces deux mondes en réduisant l’homme à un exécutant, dont les actes sont soumis aux lois immuables de la nature. Par conséquent, ce qui, dans le comportement humain, échappe aux lois de la nature, comme les croyances ou les désirs, doit être écarté de l’analyse (postulat éliminationniste).
Ce qui sort de la rationalité instrumentale (c’est à dire avec une fin objective, dans le monde matériel) doit être contré ou domestiqué.
- L’approche psychologique du facteur humain centre plutôt ses recherches sur les interactions EGO-AUTRUI en s’affranchissant ainsi de l’hétéronomie des deux mondes.
Selon le présupposé psychologiste, les contraintes de l’environnement physique de la situation de travail ne concourent pas à déterminer les conduites humaines qui évoluent avec le développement social et historique, ou avec les faits de culture, selon le présupposé culturaliste.
L’introduction de l’anthropologie des techniques permet de faire le lien entre les deux théories en postulant que les conflits et les rapports de pouvoir ont toujours un enjeu dans le réel : « le jugement ou la reconnaissance ne portent donc pas directement sur l’être du sujet mais sur son faire ».
Mauss définit la technique comme un acte traditionnel efficace : l’acte, en transformant le monde matériel et le sujet (développement des habiletés,…), constitue l’interaction EGO-REEL ; traditionnel se réfère à l’interaction EGO-AUTRUI, car l’acte doit se situer (en rupture ou en continuité) par rapport à la tradition pour devenir une technique ; et efficace représente l’interaction AUTRUI-REEL dans la mesure où l’acte doit passer par le jugement d’efficacité, proféré par autrui, pour s’intégrer et faire évoluer la tradition.
L’anthropologie des techniques propose donc un concept de technique où se rencontrent le monde objectif et le monde humain. « La technique est à la fois acte de transformation du monde et acte de transformation du sujet ».
Le concept de technique ainsi présenté met en évidence la complexité de rapport entre les concepts de technique et de travail.
L’ergonomie apporte un nouveau point de vue en introduisant le concept de réel du travail, c’est à dire ce qui résiste à la maîtrise technique et à la connaissance scientifique.
Dans cette perspective, le concept de travail est lié à celui d’échec, puisqu’il demande à l’opérateur d’ajuster les objectifs et la technique pour dépasser les échecs partiels auquel il est confronté en s’appuyant sur l’expérience vécue.
L’échec partiel est donc fondamentalement inclus dans le concepts d’efficacité et d’utilité.
Le travail peut alors se définir comme « une activité coordonnée, déployée pour faire face à ce qui, dans une tâche utilitaire, ne peut être obtenue par la stricte exécution de l’organisation prescrite ».
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