Bilan d'étape formation éducateur spécialisé (1ère année)

JOVET Ludovic

Formation Éducateur Spécialisé

2015-2018

BILAN D'ETAPE 1

        A ce moment de la formation, le terme de bilan m'apparaît clairement comme une nécessité, puisque je sens être arrivé dans cette phase « post-stage » à une étape cruciale de mon processus de professionnalisation.

En effet, cet entame de formation ne s'est pas faite sans peine, en ce sens que j'ai dû investir de ma personne et parfois même dépasser des difficultés pour parvenir aux objectifs que je me suis fixé au départ. A ce titre, j'ai essuyé un revers quant à la croyance en ma capacité de mémorisation qui s'est avérée moindre ou moins efficiente qu'auparavant. Ce que le contrôle de connaissances est venu cruellement pointer et confirmer quelque part, même si j'avais repéré cette lacune lors de mes révisions et avait alors tenté différentes méthodes pour palier cette déficience (fiches de cours, lecture à voie haute, enregistrement de la lecture des cours et réécoute, compléments d'information sur internet). Au delà et en plus de cet aspect des apprentissages théoriques (391h), les réalités triviales du quotidien en terme logistique et organisationnel m'ont éprouvé : une fatigue intellectuelle s'étant installé, j'ai du entreprendre une remise en forme (avec la reprise d'une pratique martiale) et une attention particulière à mon état physiologique (cure de vitamines et contrôle alimentaire) pour conserver une dynamique constructive dans mon engagement professionnel. Ceci étant, ces « obstacles » n'ont fait que me permettre une remise en question afin de réajuster mon organisation, la gestion de mon temps et la redéfinition de mes méthodes de travail et n'ont aucunement entachés mon implication, ma persévérance caractérielle, mon souci de ponctualité aussi bien en institut que sur site qualifiant.

        En ce qui concerne par ailleurs la question de mon engagement dans différents espaces, aussi bien personnel que professionnel ou citoyen, plusieurs éléments viennent étayer cette démarche volontaire. Notamment en regard de la formation par exemple :

• mon temps de cours en institut (6h) couplé au temps de trajet routier quotidien (3h), occupant une majeure partie de mes journées, j'ai entrepris de me saisir de chaque espace de temps de travail personnel (3h par jour dont 2h en « soirée-nuit », le week-end ou à la pause méridionale) dont le volume horaire estimé est de 169h
• Mon investissement et ma participation active à des journées caritatives (Téléthon) ou des manifestations (Journée contre le handicap, Journée de l'autisme) où je me suis porté volontaire sur mon temps libre
• Mon implication et mon application à toujours rendre le travail demandé, réalisé au mieux de mes capacités, sur la base de recherches et de réflexion en conséquence (constitution d'une base de données informatiques : rapports, analyses, statistiques, articles)
• Dans une optique plus citoyenne, je participe à apporter un soutien logistique et moral, un pied à terre, une écoute et une aide technique à un de nos camarades en difficulté financière et situationnelle momentanée

Toutefois cette implication citoyenne ou associative qui pourrait être plus grande, trouve ses limites avec des obligations familiales et mon investissement dans mon temps dédié aux apprentissages théoriques. Ce avec quoi je dois composer ou recomposer.

        En outre, la combinaison entre formation théorique et pratique sur le terrain (280h), « l'alternance intègrative », m'a permis de théoriser ma pratique et d'observer une évolution de certaines compétences que je pense avoir développer, à savoir :

• j'ai appris à utiliser l'observation participante ou non-participante volontairement (dont j'ai tiré un exemple lors de mon stage) dans le quotidien, au niveau des ateliers (espace de médiation^[1]), activités de jour, sorties extérieures et qui a été développé grâce à l'affinement de mon écoute active
• j'ai appris à instaurer et à maintenir une relation éducative à travers une posture professionnelle naissante fiable, contenante et structurante (entre souplesse et fermeté éducative) selon le principe de la « bonne distance professionnelle » afin de participer à la prise de repères des jeunes dans le dispositif sans sombrer dans un autoritarisme ou une attitude permissive
• j'ai étoffé mon sens de l'analyse d'une situation^[2] ou d'une méthode (à travers la prise de recul) en m'appuyant sur les visions pluridisciplinaires des collègues (éducateurs, psychologue,) en me référant parfois aux dossiers relatifs à la rétrospection de la vie des jeunes et en puisant dans les cours sur les sujets relatifs 
• j'ai approfondi et ai appris les rouages et la nécessité du travail en équipe pluridisciplinaire et par ce biais-même à cultiver la communication professionnelle : ce que l'exercice proposé en institut (exposé sur un métier du social) sous le principe de pluridisciplinarité m'a permis d'aborder au préalable
• j'ai pu m'essayer au travail d'investigation, de recueil de données « in situ » et hors institution pour mener des recherches afin de parfaire ma compréhension de la structure, de son partenariat inter-institutionnel, son réseau
• j'ai pu m'imprégner d'une polyvalence et d'une adaptabilité incontournable (consécratrice  aussi selon moi de légitimité) dans mon expérimentation du quotidien éducatif et de son caractère imprévisible

        Toute cette entame de formation, cette expérience en stage jumelée aux apports théoriques ont fortement bouleversé ma vision du métier d'éducateur spécialisé des débuts. En effet ayant pu bénéficier des interventions multiples sur différents domaines de différents professionnels et pour avoir été « au cœur de l'action éducative-même », aujourd'hui j'arrive à percevoir plus distinctement   cette pluralité tortueuse de complexité, où se niche l'essence-même du métier, qui sous la bannière de l'humilité révèle toute la richesse de la fonction-même de l'éducateur spécialisé. En ce sens et en reprenant les mots de Fernand Deligny, « l'éducateur [m'apparaît davantage] comme un créateur de circonstances » qui par sa bienveillance et une certaine créativité va accompagner une personne en difficulté à faire émerger de ses potentialités un projet, quel qu'il soit mais qui soit réalisable, au vu de l'analyse préalable et de la réalité des besoins formulés par la personne. C'est dans cette remobilisation psychique, cognitive, psychologique, professionnelle ... et à travers une relation de confiance que pourra se développer par étape, des situations vérificatrices visant à ramener la personne vers l'autonomie, la resocialisation, l'insertion professionnelle etc : en somme vers un « meilleur possible  ». Il m'apparaît, à l'instar de certains côtoyés sur mon lieu de stage, comme un « passeur » qui cultive et vise l'éclosion des ressources des personnes accompagnées pour que celles-ci soient en mesure à un moment, de changer d'elles-mêmes leur condition, leur situation. Difficilement perceptible ou quantifiable mais faisant de nos jours l'objet d'évaluations, son action se situant sur tellement de sphères, de domaines en rapport avec de l'humain (psychologique, psychique, cognitif, éducatif …) celle-ci s'habille d'un voile obscur, à travers lequel s'enchevêtrent et se nourrissent mutuellement des savoirs et des savoir-faire spécifiques en perpétuel évolution et réajustement. Pour finir, de façon un peu plus symbolique, je conçois l'éducateur spécialisé comme ce professionnel bienveillant, qui par sa posture empathique et analytique constitue pour la personne en difficulté, une figure d'autorité et de référence fiable, à l'instar d'une béquille sur laquelle elle peut par moments s'appuyer mais qui a pour but ultime d'amener la personne à ne plus avoir besoin d'y recourir pour passer d'un point A à un point B (Approche Lacanienne) et qu'elle se réapproprie « son espace corporel, psychique, social et relationnel » (Rouzel)

...