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La démocratie participative

Étude de cas : La démocratie participative. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  25 Novembre 2018  •  Étude de cas  •  3 652 Mots (15 Pages)  •  501 Vues

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Science politique séance 8 : la démocratie participative

1. Expliquez pourquoi l’auteur désigne les town meetings de la Nouvelle-Angleterre de « mirage démocratique ».

        Au XVIIIème siècle, aux États-Unis, la région de Nouvelle-Angleterre mit au point une forme particulière, sinon inédite, de gouvernement : les town meetings. Ces derniers consistaient en une assemblée d’habitants réunie dans chaque commune de la région, ayant pour but d’organiser la vie en société à l’échelle locale. Pour beaucoup, aujourd’hui encore, les town meetings constituent un symbole de démocratie, une preuve des aspirations progressistes des habitants de Nouvelle-Angleterre ; or pour Michael Zuckerman, cette idée est fondamentalement erronée.

        De fait, d’après ses recherches dans les archives du Massachusetts, l’auteur parvient à démontrer que si les town meetings ont permis à un nombre considérable d’hommes d’accéder au droit de vote quand bien même ils ne remplissaient pas les critères normalement requis (propriété foncière et résidence), cet élargissement de la participation électorale est une avancée bien illusoire, que l’auteur qualifie de « mirage démocratique ». Cette thèse repose sur deux constats : tout d’abord, les valeurs de la démocratie ne sont en rien à l’origine de la création des town meetings, dont la portée est beaucoup plus pragmatique ; mais non seulement les town meetings ne se revendiquent pas des principes démocratiques, mais ils y portent directement atteinte en rejetant le pluralisme et le gouvernement par la majorité.

        L’auteur commence donc par montrer à quel point les fondements du town meeting sont éloignés de l’idéal démocratique. Il faut en effet noter que les colons qui, au XVIIème siècle, s’installent dans le Nord-Est de l’Amérique, entretiennent une forme d’aversion face à « la tolérance institutionnelle que nécessite la démocratie » : l’inclusion des classes moyennes et populaires dans la politique leur semble contraire à la raison. C’est donc pour une raison bien moins idéologique que l’élitisme du vote est progressivement abandonné au profit d’une société plus démocratique, du moins en apparence. En effet, il s’agit simplement de répondre au besoin de paix et de stabilité des communautés locales, dont les autorités manquent de légitimité. En somme, comme l’explique Michael Zuckerman, « l’accès au droit de vote des colonies de la baie du Massachusetts n’est pas motivé par un idéal démocratique, mais par une idée communautaire ». Cela explique pourquoi les town meetings n’incluent pas la totalité de la population, mais seulement les habitants dont le consentement est nécessaire au maintien de l’ordre public : ainsi sont exclus les femmes, les hommes mineurs et les métayers, qui peuvent être contraints en privé du fait de leur situation de dépendance matérielle.

        A cause de cette conception désincarnée du fonctionnement politique, que l’auteur nomme « une démocratie malgré elle », cette dernière se voit mise en danger et menacée au point que Zuckerman est amené à douter de son existence en Nouvelle-Angleterre. En effet, les town meetings portent une double atteinte aux valeurs démocratiques. Tout d’abord, le pluralisme est rejeté, car chaque autorité locale a la capacité de contrôler l’accès à la communauté : ainsi, sont exclus ceux dont l’avis n’est pas conforme à l’opinion publique et plus généralement tous ceux qui sont différents de la norme sociale, dans le but de préserver l’esprit de consensus présent entre des habitants aux caractéristiques sociales semblables. Cela a pour conséquence un renforcement de l’homogénéité ethnique des communes de Nouvelle-Angleterre, qui concentrent en majorité des WASP (protestants anglo-saxons blancs). Il est donc notable que derrière l’illusion de démocratie offerte par les town meetings, se cache un autoritarisme de la part des dirigeants locaux, dont le but est de renforcer leur légitimité en éloignant toute potentielle source de conflit ou de dissension. Comme le souligne Zuckerman, les  town meetings ne sont pas « un forum pour l’expression d’intérêts concurrents », pourtant caractéristique de la démocratie, mais bien un lieu où tout le monde est sommé d’approuver les mesures proposées sans objection. C’est dans ce cadre que l’on peut établir la deuxième atteinte que les town meetings portent à la démocratie : en accord avec cet esprit de consensus, les assemblées communales prônent le vote à l’unanimité et renient le principe du gouvernement par la majorité. Pour les colons, adopter un acte à la majorité ne lui donnerait pas une légitimité suffisante pour le faire accepter de tous ; de plus,  il faudrait pour cela reconnaître et légaliser l’existence d’une minorité, ce qui est loin d’être le cas dans les sociétés communales très traditionnelles de Nouvelle-Angleterre. De ce fait, l’auteur montre que bien souvent, la valeur de l’ancienneté ou le caractère sacré de « l’harmonie et l’unanimité » priment sur la volonté de la majorité, avec l’assentiment de la Massachusetts General Court. Il est donc bien illusoire, face à de tels manquements, de parler de démocratie ; le seul élargissement de la participation électorale réalisé par les communes du Nord-Est américain ne saurait combler les lacunes inhérentes au fonctionnement des town meetings.

2. Quels étaient les objectifs pratiques de la tenue de ces town meetings et comment ont-ils été réalisés ?

        Michael Zuckerman explique dans son ouvrage que « l’objet primordial du town meeting n’est pas la création d’un espace neutre où viendraient s’opposer des intérêts [divergents] ». Dès lors, il semble légitime de s’interroger sur les réelles motivations de la création des town meetings et sur la façon dont ces motivations ont été appliquées dans la réalité.

        Comme nous l’avons vu précédemment, les town meetings sont fondés non sur la base d’un idéal démocratique, mais dans le but de renforcer la légitimité des autorités communales et ainsi d’éviter la montée de tensions dues à des insatisfactions et frustrations personnelles. L’objectif principal de la tenue des town meetings semble donc être celui du maintien de l’ordre dans les provinces de Nouvelle-Angleterre, d’autant plus que ces lieux disposent à l’époque d’institutions bien plus précaires que celles en vigueur dans la métropole anglaise. L’auteur précise en effet qu’« en traversant l’océan, les colons se sont coupés des autorités traditionnelles et institutionnelles, et se trouvent notamment sans recours possible aux institutions habilitées dans les usages à créer et faire respecter les lois ». Mais pourquoi, à la différence du système en vigueur en Angleterre, les colons ne mettent-ils pas en place des institutions à grande échelle, par exemple au niveau de la province? La réponse se trouve dans les évènements historiques de la fin du XVIIème siècle : en 1692, la Charte du Massachusetts, qui accordait à la province une grande autonomie vis-à-vis de la couronne britannique, est révoquée, ce qui la soumet à nouveau à l’autorité métropolitaine. De ce fait, les communes deviennent le seul endroit où les habitants de la province jouissent d’une relative liberté, « le dernier refuge de leur autonomie ». C’est donc tout naturellement à cette échelle locale que se créent les institutions visant à pacifier la région.

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