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La pluralité des gages mobiliers corporels

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Par   •  18 Mars 2018  •  Dissertation  •  2 650 Mots (11 Pages)  •  1 454 Vues

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Au lendemain de la réforme du droit des sûretés opérée par l'ordonnance du 23 mars 2006, plusieurs voix s'étaient élevées pour regretter « l'occasion manquée » de mettre fin à l'éparpillement des garanties mobilières. L’ordonnance du 23 mars 2006, portant réforme des sûretés a modifié le régime du gage de droit commun, notamment par deux innovations. D’une part elle a introduit le gage sans dépossession et d’autre part, la possibilité de conclure un pacte commissoire pour le gage de droit commun. Parallèlement, elle a introduit dans le Code de commerce, à l’article L. 527-1 et suivants un autre régime spécial de gage: le gage des stocks. Ce régime particulier qui est venu s’ajouter aux autres régimes existants, et à celui du gage de droit commun, vient alourdir ce phénomène de pluralité des gages mobiliers.

On utilise le terme « gage » pour désigner la chose gagée, voir le contrat. Le gage n’est que le droit réel sur la valeur du bien. L’ordonnance du 23 mars 2006 qui a réformé le droit des suretés a opéré une modification profonde du gage. Originairement, le gage portait uniquement sur les meubles corporels et il s’agissait d’une application d’un principe du droit romain: pour les choses incorporelles, point de gage. Cela résultait d’une nécessité: les créances n’étaient pas susceptibles de tradition réelle. Le Code Civil a cependant admis le gage de meubles incorporels et l’ancien article 2075 du code civil, a soumis ce gage de meuble incorporel à un régime similaire à celui de la cession de créance de l’article 1690 du Code civil. Le Code Civil a imposé la signification au débiteur ou une acceptation par lui d’un acte authentique. La jurisprudence a étendu ces solutions pour les polices d’assurance, par la suite il y a eu un développement important des biens incorporels. On a créé le fond de commerce afin de permettre son nantissement. Il y a une multiplication dans la loi des gages portant sur des biens incorporels. La pratique s’est efforcée de développer des gages excluant toute dépossession. L’ordonnance de 2006 s’est efforcée de remettre cet état du droit positif en ordre de marche et pour se faire il y a eu  un retour à la conception originaire du gage. Le gage porte nécessairement sur un bien corporel. Si le bien mobilier affecté en garantie est incorporel, il faut en vertu de l’article 2355 du Code civil parler de nantissement. 

Depuis 2006, le gage porte donc exclusivement sur des choses mobilières corporelles et son régime se voit tiraillé entre le droit commun et plusieurs régimes spécifiques. L’ordonnance de 2006 a totalement fait renaitre le gage de droit commun. Son régime est désormais tellement large et limpide que cette pluralité de gages spéciaux qui l’accompagne voit son intérêt remis en cause.

Comment l’ordonnance de 2006 vient-elle accentuer ce phénomène de  pluralité de gages mobiliers  ? Et comment amène-telle à contester l’utilité des gages spéciaux  ?

La pluralité des gages est aujourd’hui un gros problème du droit des sûretés mobilières. En effet, certains gages créés des doublons avec le droit commun et on se demande alors comment articuler le droit commun et le droit spécial ? De plus, cette pluralité est aujourd’hui dépourvue de sens puisqu’on a un droit commun du gage fort, qui se suffit à lui seul. Cette pluralité de gages apporte donc une complexité souvent pointée du doigt par la doctrine. Cette réforme dont on attendait beaucoup apporte donc son lot de désagréments. De plus, ce sentiment a été renforcé par la réforme du droit des sûretés de 2016.

Afin de répondre à la problématique posée et de constater les inconvénients qu’apportent cette pluralité des gages, nous verrons dans un premier temps que le droit commun du gage a été scindé en deux par l’ordonnance de 2006 (I). Dans un deuxième temps, nous verrons qu’il existe de nombreux gages spéciaux dont l’utilité est aujourd’hui contestable (II).

  1. Un droit commun du gage scindé en deux par l’ordonnance de 2006

        L’ordonnance de 2006 a eu un impact considérable sur les sûretés mobilières. Le gage a été le premier touché par cette réforme et notamment le droit commun du gage. Le droit commun du gage se trouve désormais lui-même subdivisé avec l’abandon du caractère réel (A) qui permet une option entre le gage avec dépossession et le gage sans dépossession (B).

  1. L’abandon du caractère réel

        L'innovation la plus remarquable de l'ordonnance du 23 mars 2006 ne se trouve pas dans ses précisions terminologiques, mais dans l'abandon du caractère réel du gage. Cette nouveauté constitue une véritable rupture dans la conception traditionnelle française. Certes, le gage repose toujours sur un bien mobilier. L'article 2333 du Code civil définit le gage comme « une convention par laquelle le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers corporels, présents ou futurs ». Mais l'article 2336 poursuit en énonçant que « Le gage est parfait par l'établissement d'un écrit contenant la désignation de la dette garantie, la quantité des biens donnés en gage ainsi que leur espèce ou leur nature ».

La formation d'une convention de gage ne nécessite plus dès lors, la remise au gagiste du bien objet de la sûreté. L'abandon de ce caractère réel apparaissait en effet comme une nécessité en droit français afin de préserver l'attrait du gage comme sûreté et favoriser l'activité économique en permettant aux différents acteurs d'obtenir le financement dont ils ont besoin sans se déposséder des biens servant d'assiette à la garantie de ce financement.

À quoi sert d'obtenir un financement permettant l'exercice d'une activité si celle-ci doit cesser aussitôt, faute de détenir les outils de production donnés en gage ? Le législateur l'avait d'ailleurs compris depuis longtemps puisqu'il avait multiplié les régimes spéciaux de gages sans dépossession.

L’abandon du caractère réel permet donc l’apparition du gage sans dépossession en droit commun, cependant celui-ci vient s’ajouter au gage avec dépossession. On a désormais deux gages de droit commun qui s’affrontent et qui vont devoir cohabiter.

  1. L’établissement de deux figures en droit commun du gage

 

        Depuis la réforme de 2006, le gage de droit commun se décline en une option: avec ou sans dépossession. Certes la notion retrouve une cohérence, cependant elle perd son unicité. Même si les fondamentaux sont les mêmes, les deux figures du droit commun du gage cultivent leurs différences.

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