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La motivation, la présomption d’innocence et l’intime conviction du juge.

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Par   •  30 Octobre 2016  •  Dissertation  •  5 500 Mots (22 Pages)  •  1 602 Vues

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La motivation, la présomption d’innocence et l’intime conviction du juge

        L’intime conviction a donc été distinguée de la conviction. La recherche d’une conviction a pour objet la preuve par la mise en œuvre d’une intelligence discursive. L’intime conviction se distingue de cette logique probatoire tout en l’utilisant comme support. Enfin, ce qui caractérise l’intime conviction est la nécessité de ménager cette marge de liberté par rapport au raisonnement sur la preuve afin de permettre au juge de trancher efficacement. Cette distinction a permis de déduire des limites directes à la formation de l’intime conviction mais aussi des limites indirectes. Les limites indirectes sont représentées sont représentées par les limites au principe de la liberté des preuve (limite de fond : caractère illicite de la preuve). L’EXCES de motivation peut constituer une limite directe à la formation de l’intime conviction car vouloir motiver tous les maillons de la chaine des indices reviendrait à ne laisser plus aucune place à la conscience du juge. Cette limite retentirait forcément sur l’intime conviction de façon directe.

        Si la motivation est souvent présentée comme une limite au système de l’intime conviction, il ne faut pas se méprendre sur la signification de cette affirmation. Il s’agit de préciser en quoi la motivation peut effectivement être considérée comme une véritable limite à l’intime conviction mais, à l’inverse, de démontrer comment elle peut au contraire contribuer à la révélation d’une intime conviction.

        Selon Mr Normand (« Le domaine du principe de motivation », LGDJ, Travaux de l’association Henri Capitant), il est possible de considérer que « garantie contre l’erreur du juge, la motivation est la seule à même de faire apparaitre les failles éventuelles de la construction intellectuelle qui a conduit à la décision ». Il convient alors de démontrer que le jugement selon l’intime conviction doit être concilié dans une certaine mesure avec le principe de l’obligation générale de motiver (I). A l’heure actuelle, on recherche toujours la mesure de cette motivation.

        Mais la motivation participe également au rapport qu’entretient l’intime conviction avec le doute et la présomption d’innocence (II). En effet, l’effort de motivation du juge au cours de l’appréciation des preuves facilite la gestion du doute dans la recherche d’une conviction. La distinction entre conviction et intime conviction permet de conclure à l’absence d’antinomie entre le jugement selon l’intime conviction et le principe de la présomption d’innocence.

I. Le contrôle de motivation et son utilité au regard de l’intime conviction

        Dans le contexte du principe de la liberté des preuves, le contrôle de motivation est minimal.

A. Le contenu du contrôle de motivation

        Le contrôle de motivation permet en fait de contrôler le raisonnement sur la preuve, c'est-à-dire l’appréciation en raison et en conscience et des éléments de preuve. Le contrôle de motivation constitue en définitive le contrôle de la partie objective de la conviction et révèle en même temps une limite qui est celle de la conscience. Le contrôle de motivation ne pourra jamais porté sur ce qui relève de la conscience du juge. Il sera donc toujours limité. En outre, ce qui caractérise l’obligation de motiver est la relativité de son domaine d’application.

  1. La place de la motivation dans le système juridique

        Le rôle de la motivation tel qu’il fut conçu sous la Révolution et même précédemment illustre l’incertitude de la généralité de son domaine d’application. Les constituants assignaient le double but suivant à la motivation : l’obligation de motiver constitue un frein à l’arbitraire dans le jugement mais ne doit pas éliminer la liberté dans le jugement. Par essence, l’obligation de motiver ne peut impliquer l’obligation de tout motiver.

        La consécration de l’exigence de motivation date de la période révolutionnaire. Au moment de la révolution, les cahiers de doléance réclamaient que tout arrêt contienne les motifs de la décision La loi des 16 et 24 août 1790 définit dans son article 15 les quatre parties d’un jugement civil ou criminel, en précisant que la troisième devra comporter les motiifs qui auront déterminé le juge.

        Le principe de motivation devient obligatoire par la loi du 28 avril 1810. Il est ensuite repris dans tous les codes comme aux articles  455 et 458 CPC, Code d’instruction criminelle et CPP (art. 485 et 593). On le trouve même à l’article L. 9 COJ.

        Cette obligation de motiver a valeur constitutionnelle. Son aménagement relève de la loi (Conseil constitutionnel, décision du 3 novembre 1977).

        Serge Guinchard , Droit processuel : « La valeur de l’obligation de motiver en droit processuel européen n’a été fixée que très récemment par la CEDH et n’a pas toujours été très forte, même si des décisions récentes en renforcent l’exigence et la portée lorsqu’un droit protégé par la convention est en cause. » Pourtant, la motivation a été dégagée de l’art 6 de la CESDH comme l’application autonome du procès équitable.

        La CEDH contrôle la motivation en tenant compte des circonstances particulières à chaque espèce de manière raisonnable. Elle a donc précisé petit à petit :

  • CEDH, 19 avril 1994, Van de Hurk c/ Pays-Bas : cette exigence de motivation ne signifie pas que le tribunal doive répondre d’une manière détaillée à chaque argument.
  • CEDH, 9 décembre 1994, Balani c/ Espagne: l’étendue de cette obligation « peut varier selon la nature de la décision et doit s’analyser à la lumière des circonstances de l’espèce. »
  • CEDH, 12 octobre 1994, Fouquet c/ France : l’obligation de motiver perd tout son sens si la motivation elle-même démontre que les juges n’ont pas lu les pièces essentielles du dossier
  • CEDH, 21 mars 2000, Dulaurans c/ France : le droit au juge est atteint dans sa substance même si un pourvoi en cassation est déclaré irrecevable comme moyen nouveau présenté pour la 1ère fois en cassation
  • CEDH, 30 novembre 1987 concernant la Belgique : la motivation ne peut revêtir un caractère lapidaire.
  • CEDH, 19 février 1998 concernant la France : la motivation ne peut pas être totalement absente
  • CEDH, 19 décembre 1997 « Helle contre Finlande » : la motivation par incorporation de motifs des 1ers juges est possible si les questions essentielles ont été réellement examinées et si la juridiction n’a pas purement et simplement entériné les conclusions de la juridiction inférieure
  • CEDH, 13 janvier 2009, Taxquet c/ Belgique : §43
  • CEDH, 16 novembre 2010, Taxquet c/ Belgique : confirme l’arrêt Taxquet I en nuançant le corps de son arrêt (§90 à §99).

Christian Guéry : C’est en fait la conjonction d’n acte d’accusation ne démontrant pas quels étaient les éléments à charge pouvant être retenus contre l’intéressé, et les questions ne se référant à aucune circonstance concrète, qui auraient pu permettre au requérant de comprendre le verdict. L’absence de motivation du verdict d’un jury populaire n’emporte pas en soi violation du droit de l’accusé à un procès équitable.

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