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La limitation contractuelle de la réparation du préjudice subi par le cocontractant de l’administration, en cas de résiliation unilatérale du contrat

Commentaire d'arrêt : La limitation contractuelle de la réparation du préjudice subi par le cocontractant de l’administration, en cas de résiliation unilatérale du contrat. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  9 Avril 2020  •  Commentaire d'arrêt  •  2 594 Mots (11 Pages)  •  444 Vues

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Commentaire d’arrêt CE 4 mai 2011

        En l’espèce, L’Etat, par un arrêté de 1969, a concédé à une Chambre de commerce et d’industrie l’établissement et l’exploitation d’un port de plaisance pour cinquante années. L’autorité concédante est devenue la Commune de Grau-du-Roi à partir de 2002 par application de l’article 6 de la loi du 22 juillet 1983. Celle-ci a dès lors résilié la concession pour reprendre en régie le port et a versé au cocontractant le solde des emprunts contractés pour l’acquisition des immobilisations de la concession – tel que convenu dans le contrat.

        Le cocontractant de l’administration a alors cherché à obtenir réparation des préjudices subis de par la résiliation unilatérale du contrat de concession – relatifs à la part non-amortie des investissements financés sur ses fonds propres – et de leurs frais d’expertise, devant la juridiction administrative. Le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande par un jugement du 21 juin 2007. Après renvoi en appel, la Cour administrative d’appel de Marseille a rejeté la demande tendant à l’annulation de ce jugement, par un arrêt du 1er octobre 2009 ; en considérant que si les stipulations contractuelles ne permettent pas d’exclure toute indemnisation ou de la rendre disproportionnée au préjudice subi, ce n’était pas le cas en l’espèce.

La Chambre de commerce et d’industrie a alors formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.

Il était alors question de savoir si la réparation du préjudice subi par le cocontractant de l’administration, en cas de résiliation unilatérale du contrat par celle-ci, ne peut pas être limitée contractuellement, quelle que soit sa qualité juridique.

Le Conseil d’Etat rejette le pourvoi, mais réalise une substitution de motif. Il précise que la possibilité de réduire le montant des indemnités dépend du statut du cocontractant de l’administration et considère ici que, si la qualification de personne publique du cocontractant empêche l’administration de prévoir contractuellement une indemnisation disproportionnée au préjudice subie, les appréciations souveraines de Cour administrative d’appel permettent de considérer que ce n’est pas le cas en l’espèce.

Il vient ainsi prolonger les ramifications du principe qu’il a posé dans son arrêt d’assemblé plénière du 2 mai 1958 – Distillerie de Magnac Laval – selon lequel l’administration bénéficie d’un pouvoir de résiliation unilatéral pour motif d’intérêt général sous réserve des droits à indemnité du concessionnaire.

Pour comprendre la décision dans son entièreté, il convient de voir que, dans cet arrêt, le Conseil d’Etat opère à une mise en balance des prérogatives exorbitantes de droit commun de l’administration et des droits de ses cocontractants (I) résultant par là-même à un déséquilibrage entre l’intérêt général et les intérêts privés en présence dans un contrat de concession du service public (II)

  1. Une mise en balance des prérogatives de l’administration et des droits de ses cocontractants

Par cette décision, le Conseil d’Etat rappelle que si l’administration bénéficie d’un droit de résiliation unilatérale du contrat administratif, c’est en vertu d’un droit à indemnité reconnu à son cocontractant (A) ; droit qui l’amène à consacrer la protection des deniers publics, lors de cette indemnisation (B)

  1. La corrélation entre droit de résiliation unilatérale de l’administration et droit à indemnité du cocontractant, rappelé

Dans cette décision, le Conseil d’Etat considère que « en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, l’autorité concédante peut toujours, pour un motif d’intérêt général, résilier un contrat de concession, sous réserve des droits à indemnité du concessionnaire ».

Le Conseil d’Etat vient ainsi rappeler le principe qu’il avait érigé (CE Ass. 2 mai 1958, Distillerie de Magnac-Laval) pour bien insister sur l’impossibilité d’exclure totalement l’indemnisation du cocontractant de l’administration lors d’une rupture unilatérale anticipée du contrat par cette dernière. Il insiste ainsi sur la véritable corrélation qui existe entre les prérogatives accordées à l’administration en matière contractuelle et le droit à indemnisation de son cocontractant.

Le droit de résiliation unilatérale est une des composantes des prérogatives accordées à l’administration en matière contractuelle. Ces prérogatives sont détenues par l’administration en tout état de cause : par principe, par construction, même si aucun texte ne les rappelle, et même si dans le contrat administratif les parties ont inséré des stipulations tendant à les écarter. C’est ce que signifie la notion de « règles générales applicables aux contrats administratifs ».

A ce droit de résiliation unilatérale et universelle correspond le droit à indemnité du cocontractant qui est le revers de ces prérogatives exorbitantes de droit commun et qui constitue un des versants du droit à l’équilibre financier du contrat.

Etant donné que la résiliation peut être demandée en tout état de cause, même sans faute, le cocontractant subi un préjudice – ne serait-ce que matériel, mais aussi moral de par l’entache à sa réputation – né de cette rupture anticipée du contrat. Ainsi, si la résiliation est légale, c’est « sous réserves des droits à indemnité du concessionnaire ».

Cette réparation en cas de résiliation unilatérale suppose que l’intégralité du préjudice subi par le cocontractant soit indemnisée. Cette réparation va donc porter sur la compensation de la perte subie (frais engagés pour mettre le contrat à exécution) et le manque à gagner du fait de la rupture anticipée (versement du bénéfice dont il a été privé), a minima, en théorie.

        En l’espèce, la Chambre de commerce et d’industrie réclame réparation de son préjudice matériel, subi à la suite de la résiliation du contrat, et correspondant à la réparation de ses frais engagés – notamment de la part non-amortie de ses investissements – non-compris dans l’indemnité déjà versée par la commune au titre des stipulations contractuelles.  Le Conseil d’Etat en profite pour préciser les règles surabondant cette réparation.

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