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Droit administratif : arrêt Conseil d'État du 16 juillet 2021

Commentaire d'arrêt : Droit administratif : arrêt Conseil d'État du 16 juillet 2021. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  24 Novembre 2022  •  Commentaire d'arrêt  •  2 808 Mots (12 Pages)  •  232 Vues

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D'un strict point de vue fonctionnel, la police administrative désigne une activité de service public dont le but est de maintenir l'ordre public. Néanmoins, cette mission de maintien de l’ordre public demeure toujours subordonnée à la liberté des citoyens, en effet, comme le proclame l’historien du XIXᵉ siècle, Jules Michelet, « la liberté est la règle et la restriction de police l'exception ». Cette dualité se voit au cœur de l’actualité notamment avec les arrêtés anti-mendicité des maires qui font quelque peu, l’objet de nombreuses polémiques.
Ceci peut s’illustrer par l’arrêt très récent du Conseil d'État du 16 juillet 2021. En l’espèce, l’association ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen à demander l’annulation des articles 1er, 2 et 4 de l’arrêté du 15 octobre 2015 du maire de Saint-Etienne sur des mesures d’anti-mendicité.
Dans une décision du 4 juillet 2019, la cour administrative d’appel de Lyon rejette la requête de l’association Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen. Par conséquent, l’appelant forme un pourvoi au Conseil d'État.
En effet, le demandeur fonde sa saisine du Conseil d'État au motif que les arrêtés du maire de Saint-Etienne constituent un abus de pouvoir puisque ses mesures ne comportent aucune limite spatio-temporelle.
Dès lors, il est pertinent de se poser la question suivante, au vu du maintien de l'ordre public, est-il juridiquement raisonnable de mettre en place des mesures d’anti-mendicité illimitées dans le temps et dans l'espace ?

Face à cela, le Conseil d'État a accordé la requête du demandeur sur le fondement que les mesures prises dans l’arrêté du maire de Saint-Etienne “sans en préciser la durée ni l'intensité” contiennent une atteinte disproportionnée au principe constitutionnel d’aller et venir librement, et cela, même si leurs objectifs sont de maintenir l’ordre public. Le Conseil d'État a donc rejeté le motif impérieux de circonstances locales particulières justifiant la mise en place de l’arrêté du maire de Saint-Etienne et plus précisément à cause d’une “augmentation de la délinquance et des incivilités dans son centre-ville". Cependant, le Conseil d'État a confirmé le rappel de la cour d’appel administrative sur les pouvoirs de police générale du maire pour maintenir l’ordre public prévu par l’article L. 2212 du code général des collectivités territoriales. Ainsi, en accordant la demande d’annulation de l’association Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen, le maire doit verser au fondement de l’article L.761-1 du code de justice administrative une somme de 6 000 euros à la partie gagnant afin de l’indemniser des frais occasionnés par la procédure juridictionnelle.

Au regard du caractère très récent de l’arrêt du Conseil d'État, nous pouvons en déduire que le sujet des arrêtés municipaux contre la mendicité est au cœur de l’actualité. Nous pouvons notamment parler de la stratégie nationale de prévention de la délinquance mise en place de 2013-2017 puis renouvelé dans la période de 2020-2024 qui lutte avec des moyens colossaux contre la propagation de l'incivilité tel que la mendicité, certains auteurs parlent même d’une hypertrophie du droit de la sécurité intérieure. Ceci soulève également la question de proportionnalité lorsque qui s'entrechoquent. Des auteurs tels que Patrice Chrétien, Nicolas Chifflot et Maxime Tourbe s’accordent à dire que la notion d’ordre public est trop large à tel point qu’elle se confond aisément avec d’autres principes tels que l’intérêt général, ce qui pourrait également expliquer le fait qu’elle se heurte souvent. Le Conseil d'État a rencontré pour la première fois ce problème juridique en 1933 avec l’arrêt Benjamin et syndicat d'initiative de Nevers, Lebon qui proclame que les “mesures édictées par le maire pour prévenir les troubles à l'ordre public, en application de ses pouvoirs de police administrative générale, doivent être strictement proportionnées à leur nécessité. “ Ou plus récemment avec la cour administrative de Douai de 2008 qui évoquait la mendicité comme “une atteinte à l’ordre public”.

De ce fait, il est intéressant de se pencher sur le pouvoir de police générale du maire rappelé par la Cour de cassation et notamment en ce qui concerne le maintien de l’ordre public. En effet, l’article 2212-2 du code des Code général des collectivités territoriales énonce que ”La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique." Mais il est important de rappeler que ses dispositions destinées au maire également, ne lui permet pas de mettre en place des mesures disproportionné et portant atteinte aux autres droit et libertés fondamentaux en vertu de l’ordre public. Et que cet excès de pouvoir ne peut se justifier par le motif impérieux de circonstances locales particulière. Il convient donc d’étudier le rappel effectif du Conseil d'État sur les pouvoirs de police du maire. (I) Ainsi, pour limiter ses mesures visant à maintenir l’ordre public, le Conseil d'État va opérer à un contrôle maximum afin de mettre en lumière le caractère disproportionné de l’arrêté du maire de Saint-Etienne, mais également l’atteinte que ce dernier porte à la liberté constitutionnelle d’aller et venir. Les moyens du Conseil d'État prononcé pour censurer les dispositions mise en place par le maire est un contrôle de proportionnalité favorisant la liberté d’aller et venir. Mais de nombreux auteurs tel qu'Alexandra Korsakoff et Johanna Benredouane s’accordent à dire que de manière générale, les mesures prises par les maires contre la mendicité sont considérées comme disproportionnés et portant atteinte au droit constitutionnel de fraternité. Ils proposent donc de faire usage d’un référé-liberté au droit constitutionnel de fraternité, ce qui pourrait ainsi éviter la saisine du Conseil d'État. (II)  

  1. Le rappel effectif du pouvoir de police générale du maire en matière de mendicité
    Si les compétences du pouvoir de police générale du maire en matière de mendicité sont assez larges, le Conseil d'État n’hésite pas à rappeler les limites de ce dernier (A) et cela même dans une situation comportant des circonstances locales particulières. En effet, la juridiction administrative suprême rejette catégoriquement le motif de circonstance locale particulière relevé par le maire de Saint-Etienne. (B)

  1. Les limites du pouvoir de police générale du maire rappelé par le Conseil d’Etat

Le pouvoir de police du maire vise à prévenir les éventuels troubles à l’ordre public, il a donc également à la charge de la police municipale. Au terme de l’article 2212-2 du code général des collectivités territoriales, les éléments de l’ordre public concernent le maintien de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques. Autant dire que la question des mendicités dans les rues est directement visée et de ce fait le maire peut fonder son arrêté sur une règle générale et mettre en place des sanctions en cas de violation. Cependant, comme il a été proclamé dans la décision du Tribunal de conflit du 8 avril 1935 intitulé Action Française, les décisions réglementaires d’un préfet ne peuvent constituer des termes trop généraux et absolu. On peut en déduire que ceci s’applique également au maire qui est subordonné au préfet. Autant dire que la question des mendicités dans les rues est directement visée et de ce fait le maire peut fonder son arrêté sur une règle générale et mettre en place des sanctions en cas de violation. On en déduit que le Conseil d'État rappel les limitations spatio-temporelles du pouvoir de police générale du maire. Cette décision du Conseil d'État est assez fidèle à la jurisprudence sanctionnant les interdictions trop générales et absolues puisque dès les années 1999, la cour d’appel administrative du 26 avril 1999, a estimé excessif du fait de son caractère trop générales les mesures de l’arrêté du maire de Tarbes contre la mendicité, le juge administratif a donc annulé ses mesures. Ainsi le Conseil d'État du 16 juillet 2021 rappels bien que les mesures du maire doivent impérativement constituer une nécessité, sans quoi ils seront annulés. Face à cela, le maire de Saint-Etienne justifie le caractère impérieux et nécessaire de son arrêté sur une hausse avérée de la délinquance dans sa ville.

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