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Commentaire d'arrêt civ 1ère 13 décembre 1989

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Par   •  13 Novembre 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  2 826 Mots (12 Pages)  •  2 283 Vues

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Commentaire d’arrêt : Civ 1ère, 13 décembre 1989

Le Doyen Gérard Cornu énonce que « le corps humain n’est pas un chose ; c’est la personne même. Il s’agit de l’être et non de l’avoir. » Partant de ce fait, si le corps humain n’est pas une chose et qu’il est hors du commerce, par conséquent il est impossible qu’il soit l’objet licite d’un quelconque contrat.

L’association Alma Mater a pour objet de faciliter la mise en relation des couples souhaitant un enfant dont la femme est stérile et les mères porteuses volontaires à qu’il est proposé d’être inséminée artificiellement et mettre au monde l’enfant. Ce dernier sera déclaré sur les registres de l’Etat civil sans indication du nom de la mère reconnu par le père. Puis l’épouse ou la concubine l’adoptera. Cette association intervient tout au long du processus puisqu’elle fait procéder à l’insémination, surveille la grossesse et l’accouchement. Elle s’occupe de faire diligenter la procédure d’adoption puis verse à la mère porteuse la somme de 60,000 francs remise par le couple.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a estimé que cette association avait un objet illicite contraire aux lois et aux bonnes mœurs et en a donc prononcé la nullité sur le fondement de l’article 3 de la loi du 1er juillet 1901. Alma mater se pourvoi en cassation au motif que la mise en relation dans un but humanitaire non lucratif d’un couple demandeur dont la femme est stérile et d’une mère porteuse consentante d’être inséminée, puis de porter l’enfant et enfin de le donner en contrepartie d’une indemnisation donnée par le couple, n’est ni illicite, ni contraire aux bonnes mœurs.

Une association ayant pour objet la mise en relation de personnes dans le but de mettre à disposition le corps d’une femme pour procréer artificiellement moyennant une rémunération est-elle licite ?

La cour de cassation répond par la négative en rejetant le pourvoi de l’association au motif que l’objet même de cette dernière est de favoriser la conclusion et l’exécution de convention portant sur la mise à disposition des demandeurs des fonctions reproductrices de la mère et sur l’enfant et sont donc nulles comme le dispose l’article 1128. De plus les conventions contreviennent au principe d’ordre public de l’indisponibilité de l’état des personnes puisque l’enfant qui en résultera aura un état qui ne correspondra pas à sa filiation réelle au moyen d’une renonciation et d’une cession des droits reconnus par la loi à la future mère. Enfin, l’activité de l’association qui créer délibérément une situation d’abandon, aboutit à détourner l’institution de l’adoption de son véritable objet qui est de donner une famille à un enfant qui en est dépourvu. La cour de cassation considère donc que l’association est nulle en raison de l’illicéité de son objet sur le fondement de l’article 3 de la loi du 1er juillet 1901.

L’illicéité de l’objet de l’association contrevient donc à deux grands principes juridiques et moraux (I) ce qui résultera à l’avènement du principe qui montre l’illicéité de l’objet des conventions de mères porteuses (II)

I/L’illicéité de l’objet de l’association contrevenant à deux grands principes juridiques et moraux

Dans un premier temps, il s’agira d’étudier l’objet illicite de l’association contraire aux bonnes mœurs et aux lois (A) puis dans un second temps le fait que les conventions de cette association contreviennent au principe de l’indisponibilité de l’état des personnes. (B)

A/Le contexte juridique de l’arrêt : l’objet illicite de l’association contraire aux bonnes mœurs et aux lois.

Tout d’abord, dans le code civil de 1804 et cela jusqu’à la reforme d’octobre 2016, l’objet est l’une des quatre conditions de fond de validité du contrat. Il a désormais « disparu » pour laisser place à un contenu licite et certain. L’arrêt datant du 13 décembre 1989 il s’agira de se concentrer sur l’objet avant la réforme. La signification du mot objet à deux sens. En effet, l’objet du contrat est l’objectif poursuivi par les parties. Quant à l’objet de l’obligation, cela est sur quoi porte l’obligation de chaque partie. Cet objet doit donc exister, être déterminable et bien sûr être licite comme le dispose l’article 1128 ancien du code civil « Il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui peuvent faire l’objet de convention. ».  C’est le premier argument utilisé par la cour d’appel d’Aix-en-Provence dans son arrêt du 29 avril 1988 : le fait de mettre en relation des couples avec des mères porteuses pour obtenir un enfant moyennant une rémunération rend l’objet de l’association nul. La cour d’appel et puis la cour de cassation se base sur l’article 3 de loi du 1er juillet 1901 qui dispose que « toute association fondée sur une cause ou en vue d’un objet illicite, contraire aux lois et aux bonnes mœurs, est nulle et nul effet. » qui confirme que l’objet illicite contrevenant aux principes juridiques et moraux rend nul l’association Alma Mater et ses conventions. Le fait que l’association favorise bien la conclusion et l’exécution de ces conventions est confirmée aussi par la cour de cassation. Cependant, la notion de bonnes mœurs est difficile à définir puisque celle-ci évolue avec la société et se façonne en fonction de la personne. Elle donne les valeurs morales d’une société à un moment donné. L’article 6 du code civil dispose que « l’on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes mœurs. »  La cour de cassation statue en faveur du fait que d’utiliser le corps humain dans une convention est contraire aux bonnes mœurs en rejetant le pourvoi d’Alma Mater. Cette décision pourrait être questionnée sur le fait de savoir si c’est la place du juge de droit de décider de cela.

Par ailleurs, le principe de l’indisponibilité de l’état des personnes vient confirmer d’autant plus cette décision.

B/L’objet des conventions de mères porteuses portant atteinte au principe de l’indisponibilité de l’état des personnes

Pour commencer, il faut rappeler les dispositions de l’article 1128 ancien qui pose le principe qu’il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l’objet de convention. Or le corps humain n’en fait pas parti, il est hors du commerce donc il ne peut pas être l’objet d’une obligation prévu par un contrat. Si cela est le cas, cela contreviendrait au principe de l’indisponibilité du corps humain. Cela est un principe d’ordre public auquel on ne peut déroger comme le dispose l’article 6 du code civil et la Cour de cassation s’en sert comme argument pour rejeter la demande de l’association. Alma mater ne respecte donc pas ce principe puisqu’elle fait moyenner l’utilisation du corps humain à travers une convention en mettant à disposition les fonctions reproductrices de la mère. Malgré le fait qu’elle mette en avant l’argument un but humanitaire non lucratif, la convention reste nulle puisqu’elle porte sur le corps humain en lui-même. L’objet de l’association et les conventions qui en résulte sont donc illicite. La cour de cassation fait donc bonne application de l’article 3 de la loi du 1er juillet 1901 au travers du 1128. Cette interdiction d’utilisation du corps humain dans une convention pour une autre personne sera plus tard retranscrite en 1994 dans l’article 16-7 du code civil « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle. »

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