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Commentaire - Val d'Europe

Commentaire d'arrêt : Commentaire - Val d'Europe. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Avril 2020  •  Commentaire d'arrêt  •  2 542 Mots (11 Pages)  •  1 025 Vues

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Le droit au recours juridictionnel, consacré par l’arrêt « Dame Lamotte » du 17 février 1950 a permis d’ouvrir la voie de droit du contentieux pour excès de pouvoir, où le juge est amené à se prononcer sur la légalité d’un acte administratif. Le contentieux de l’excès de pouvoir répond à la seule question de savoir si l’acte en question est légal ou non: c’est un contentieux objectif. L’administré peut aussi agir dans un recours de plein contentieux, où le juge dispose de pouvoirs plus variés que celui de l’annulation de l’acte, comme la réécriture ou la modification des conséquences de l’acte. Dans la jurisprudence administrative, il y a un débat sur le point de savoir si il faut faire prévaloir des considérations de légalité ou de sécurité juridique à l’égard des contrats administratifs. Le Conseil d’Etat a modifié cet équilibre dans le sens d’une prévalence de la stabilité contractuelle, réduisant le domaine du contentieux de l’excès de pouvoir en matière contractuelle au profit de celui des recours en plein contentieux.

Dans l’arrêt « Département du Tarn-et-Garonne » rendu le 4 avril 2014, le Conseil d’Etat a fermé le recours pour excès de pouvoir contre les actes détachables, estimant que si les tiers souhaitent contester un contrat, ceux-ci devaient agir par la voie du recours de plein contentieux. Cependant, des exceptions subsistent et dans certains cas, les actes détachables peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Le Conseil d’Etat s’est prononcé en ce sens dans l’arrêt « Cayzeele » rendu le 19 juillet 1996: le juge avait alors affirmé pour la première fois que les dispositions soulevées par le tiers au contrat avaient un caractère réglementaire et pouvaient donc être contestées devant le juge pour excès de pouvoir. En effet, si en principe le contrat est un acte plurilatéral et ne peut pas faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, la clause réglementaire elle, a un caractère unilatéral auprès des tiers.

Vingt ans plus tard, dans un arrêt rendu le 9 février 2018 « Communauté d’agglomération Val d’Europe agglomération », le Conseil d’Etat a précisé les contours du recours pour excès de pouvoir par un tiers au contrat contre les clauses réglementaires de celui-ci.

En l’espèce, l’Etat avait passé une convention pour la concession de la construction, de l’entretien et de l’exploitation des autoroutes avec une société privée. Un arrêté préfectoral du 12 juillet 2012 avait déclaré d’utilité publique la réalisation du barreau de liaison entre une certaine autoroute et une route nationale. Plus tard, un avenant approuvé par un décret du 21 août 2015 avait été conclu, faisant apparaitre des annexes dans le cahier des charges.

Le président de la communauté d’agglomération Val d’Europe a alors demandé au premier ministre de faire abroger les annexes introduites par l’avenant, affirmant qu’elles étaient illégales car ne prévoyant pas la réalisation du barreau de liaison. Face au silence du premier ministre, le président de la communauté d’agglomération a alors saisi le juge d’un recours pour excès de pouvoir contre la décision implicite de rejet de sa demande d’abrogation.

La voie du recours pour excès de pouvoir est-elle ouverte à l’encontre des annexes litigieuses? 

Premièrement, Le Conseil d’Etat rappelle que les tiers disposent d’une voie de recours de pleine juridiction pour contester la validité d’un contrat. Il ajoute que la voie de recours pour excès de pouvoir leur est aussi ouverte, afin qu’ils puissent contester la validité des clauses réglementaires d’un contrat administratif, si celles-ci portent une atteinte directe et certaine à leurs intérêts. De cette manière, les tiers peuvent contester l’annulation du refus d’abroger de telles clauses. Le juge administratif précise qu’il appartient à toute personne ayant un intérêt de contester par la voie de l’excès de pouvoir une décision autorisant l’exécution de travaux autoroutiers.

Ensuite, le Conseil d’Etat affirme que les clauses réglementaires sont celles qui ont pour objet l’organisation ou le fonctionnement d’un service public. Concernant les conventions de concessions autoroutières, elles sont celles qui définissent l’objet de la concession et les règles de desserte, ainsi que celles qui définissent les conditions d’utilisation des ouvrages et fixent les tarifs des péages applicables sur les réseaux. Il ajoute que les stipulations relatives au régime financer de la concession ou à la réalisation des ouvrages ont un caractère purement contractuel. 
Le Conseil d’Etat confronte par la suite l’objet du recours, et affirme que les stipulations contestées dans le cahier des charges sont relatives à la réalisation d’ouvrages et n’ont donc pas un caractère réglementaire. De ce fait, la demande d’annulation pour excès de pouvoir de celles-ci est irrecevable. Le Conseil d’Etat rejette la requête du président de la communauté d’agglomération Val d’Europe, y compris ses conclusions à fin d’injonction.

Nous verrons que la nouveauté de cet arrêt tient à l’apport d’une définition de la clause réglementaire (I) finalement insuffisante pour simplifier le régime du contentieux administratif (II).

I/ L’apport d’une définition de la clause réglementaire

Dans son troisième considérant, le Conseil d’Etat apporte une définition précise de la clause réglementaire établie en fonction du service public (B), qu’il n’avait auparavant, jamais produite (A).

A. Une définition largement attendue

Dans son troisième considérant, le Conseil d’Etat précise premièrement, que « revêtent un caractère réglementaire, les clauses d’un contrat qui ont, par elles-mêmes, pour objet l’organisation ou le fonctionnement d’un service public » . Le juge administratif donne ici une définition générale de la clause réglementaire, qui était jusqu’à ce jour inconnue. En effet, le Conseil d’Etat avait ouvert aux tiers le recours pour excès de pouvoir contre une clause réglementaire dans l’arrêt « Cayzeele » du 19 juillet 1996, mais aucune précision n’avait été donné sur ce que le juge administratif entendait par « clause réglementaire ». En effet, une clause de contrat est par nature contractuelle. Cependant, si elle s’impose aux tiers, elle peut alors parfois revêtir un caractère réglementaire. Sur ce point, la jurisprudence restait silencieuse. Dans notre arrêt, le juge administratif vient donc combler un vide juridique qui lui avait été longtemps

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