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CE Ass. 9 novembre 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée

Commentaire d'arrêt : CE Ass. 9 novembre 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  12 Février 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  2 103 Mots (9 Pages)  •  6 334 Vues

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CE Ass. 9 novembre 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée

L’arrêt du Conseil d’Etat du 9 mars 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée, est relatif à la légalité de l’installation d’une crèche au sein d’un bâtiment public.

En l’espèce, le 3 septembre 2012, le président de la Fédération de la libre pensée de Vendée demanda au président du conseil général de la Vendée de ne pas procéder à l’installation de tout élément de culte, notamment d’une crèche de Noël, dans les locaux du conseil général, durant la période des fêtes de la fin de l’année 2012. Ce-dernier n’a pas répondu à sa demande faisant naitre une décision implicite de rejet et a installé un crèche dans le hall de l’hôtel du département.

Dès lors, le président de la Fédération a saisi le tribunal administratif de Nantes d’un recours pour excès de pouvoir afin d’obtenir l’annulation de la décision implicite.

Par une décision du 14 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes fit droit à la demande de la fédération.

Le département de Vendée a interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Nantes. Par un arrêt du 13 octobre 2015, cette-dernière a annulé la décision du tribunal administratif.

La Fédération forme un pourvoi en cassation contre cet arrêt devant le Conseil d’Etat alléguant la violation du principe constitutionnel de laïcité.

Dès lors, l’installation d’une crèche de Noël au sein d’un bâtiment public est-elle contraire au principe de neutralité tel que formalisé par la loi du 9 décembre 1905 relatif à la séparation des Eglises et de l’Etat ?

Le juge administratif fit droit à la requête de la Fédération en annulant la décision de la cour administrative d’appel de Nantes. Après avoir rappelé la portée du principe de laïcité et de la loi du 9 décembre 1905, ainsi que le fait que l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 s’oppose à l’installation, par les personnes publiques, de signes ou d’emblèmes qui manifestent la reconnaissance d’un culte ou marquent une préférence religieuse, la Haute juridiction relève qu’une crèche de Noël peut revêtir une « pluralité de significations ». En effet, le juge administratif note que, si un tel objet présente un caractère religieux, celui-ci est aussi un « élément des décorations et illustrations qui accompagnent traditionnellement les fêtes de fin d’année, sans signification religieuse particulière » et admet ainsi sous certaines conditions l’installation d’une crèche au sein d’un bâtiment public.

Ainsi, le Conseil d’Etat procède à une réaffirmation tempérée de la soumission du service public au principe de laïcité (I) et délimite la portée de ce principe au moyen d’un faisceau d’indices (II).

I) La réaffirmation tempérée de la soumission du service public au principe de laïcité

Le juge administratif rappelle la valeur et la portée du principe de laïcité (A) tout en opérant une appréciation souple par la consécration de tempéraments (B).

A. Le principe de laïcité, pilier du régime des services publics 

La décision s’ouvre au considérant 3 par une définition générale de la neutralité religieuse de l’Etat. C'est, en effet, directement après avoir cité l'article 1er de la Constitution, qui consacre la laïcité de la République, l'égalité devant la loi et le respect de toutes les croyances, que le Conseil d'Etat rappelle la portée des articles 1er et 28 de la loi de 1905 qui soulignent l’importance de la garantie du libre exercice des cultes tout en imposant des limitations.

Dès lors, la loi de 1905 consacrant la séparation de l’Eglise et de l’Etat a pour objectif d’assurer la neutralité des personnes publiques à l’égard des cultes en limitant l’installation de signes religieux au sein d’un emplacement public. Dans cette décision, le Conseil d’Etat en profite pour rappeler la valeur de ce principe et sa portée qui s’impose à l’égard des emplacements publics mais également aux agents du service public qui ne doivent pas manifester leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques. Dans l’arrêt Cour EDH 26 nov. 2015, Ebrahimian c/ France, la requérante, assistante sociale dans un centre hospitalier, s’était vu refuser le renouvellement de son CDD, des patients s’étant plaints du port du voile. La Cour européenne des droits de l’Homme a validé la décision de l’administration : le principe de laïcité est fondateur de l’Etat français et peut imposer aux agents des services publics des contraintes affectant la liberté de religion. De plus, ce principe s’impose à l’ensemble des agents services publics « y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes privés ». En témoigne l’arrêt Cass. soc. 19 mars 2013, CPAM de Saint-Denis par lequel la chambre social s’est prononcée sur l’application du principe de neutralité à un organisme privé chargé d’une mission de service public. Dès lors, la Haute juridiction jugea le licenciement de la salarié voilée comme étant régulier, tout agent du service public étant tenu de respecter le principe de neutralité.

Dès lors, la fédération requérante se fonde sur l’article 1er de la Constitution et l’article 28 de la loi de 1905 pour contester l’installation de la crèche au sein du hall de la mairie comme portant atteinte au principe de neutralité s’imposant au service public. En effet, l’installation d’une crèche serait contraire au principe de neutralité car elle manifesterai l’exhibition d’un culte religieux au sein d’un emplacement public.

B. Une appréciation souple du principe de laïcité par des tempéraments 

Le Conseil d’Etat aux considérants 4 et 5 précise qu’une crèche peut revenir une « pluralité de significations ». Il pose donc une exception au principe de laïcité au considérant 5 en estimant qu’une telle installation est possible si elle présente un caractère culturel, artistique ou festif. Il estime en effet que la crèche relève d’une tradition française sans signification religieuse particulière, attachée aux fêtes de fin d’année. Ces crèches constituant une source d’attraction touristique, les réduire à un rituel religieux contraire au principe de laïcité serait donc réducteur.

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