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Commentaire CE, Ass., 13 novembre 2013, M.Dahan

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Par   •  14 Octobre 2017  •  Commentaire d'arrêt  •  2 748 Mots (11 Pages)  •  4 134 Vues

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LE CONTRÔLE DU JUGE

CE, Ass., 13 novembre 2013, M.Dahan

«Les juges de la nation ne sont que la bouche qui prononce les paroles de la loi», cette célèbre citation du penseur politique Montesquieu, limite très clairement le rôle du juge.

Dans un arrêt d’Assemblée du 13 novembre 2013, le Conseil d’État décide désormais d’exercer un contrôle normal des sanctions disciplinaires appliquées aux agents publics.

En l’espèce, le 14 septembre 2009, M. Paul Dahan, ministre plénipotentiaire, a été nommé ambassadeur, représentant permanent de la France au Conseil de l'Europe à Strasbourg. À ce titre, il a fait l'objet, comme tous les chefs de poste, d'une procédure d'évaluation qui s'est achevée en août 2010 et dont les conclusions mentionnaient des « insuffisances dans le management du poste » et des « attitudes déplacées vis-à-vis de l'autre sexe ». Une procédure disciplinaire a été engagée qui a abouti par le décret du Président de la République du 3 février 2011, mis à la retraite d’office, à l'âge de 62 ans, et par un arrêté du 8 mars 2011 du ministre des affaires étrangères et européennes, radié du corps des ministres plénipotentiaires en raison de son comportement avec le personnel féminin à compter du 4 mars 2011. Ce dernier avait, en effet, « dans ses relations professionnelles avec le personnel féminin de la représentation permanente, l'habitude d'émettre de manière fréquente, y compris en public, des remarques et allusions à connotation sexuelle ». De plus, il adressait également et « régulièrement à ce personnel des consignes pour l'exercice des fonctions, empreintes de la même connotation, qui, par leur caractère déplacé ou blessant, relevaient de l'abus d'autorité ». Il avait aussi « fait preuve d'acharnement à l'encontre d'une subordonnée recrutée par contrat en tenant, de façon répétée, des propos humiliants à son sujet, en sa présence et devant des tiers, ainsi qu'en dégradant ses conditions de travail, agissements qui ont porté atteinte à la dignité de l'intéressée et altéré sa santé ».

Toutes ces décisions ont été attaquées par M. Dahan. Par un arrêt du 17 juillet 2013, les conclusions du requérant dirigées contre son évaluation et contre la décision mettant fin à ses fonctions et nommant son successeur ont été rejetées. L’ancien ambassadeur demanda donc au Conseil d’État d’annuler pour excès de pouvoir les décisions lui infligeant ces sanctions disciplinaires et l'annulation pour excès de pouvoir la décision de rendre publics la sanction litigieuse et ses motifs, révélée par leur publication sur le site intranet du ministère.

Selon le requérant ; premièrement il y aurait violation du principe d'impartialité, en raison du rôle prépondérant joué par le directeur général de l'administration, accusé à la fois d'être à l'origine des poursuites, de diriger la procédure et de présider le conseil de discipline. Deuxièmement, il y aurait violation de la règle non bis in idem, au motif que la sanction est fondée sur les mêmes faits que la décision du 30 septembre 2010 qui mettait fin à ses fonctions. Troisièmement, il y aurait illégalité de l'évaluation « à 360° », la sanction n'ayant pas été prise sur le fondement ou pour l'application de cette évaluation. Il y a également une inexactitude matérielle des faits et un détournement de pouvoir. Quatrièmement, le conseil de discipline n'aurait pas régulièrement délibéré sur la question de savoir si la sanction devait être rendue publique. Cinquièmement, d'autres ambassadeurs auraient commis des actes plus graves sans être autant sanctionnés. Et enfin sixièmement, il y aurait erreur de qualification sur la faute et de l'excessive gravité de la sanction. La sanction apparaît selon l'ambassadeur comme manifestement disproportionnée.

Il s'agissait donc de savoir si ; Le directeur général de l'administration et de la modernisation de ce ministère était-il compétent pour prendre au nom de ministre, l'ensemble de ces décisions infligeant à l'ambassadeur des sanctions disciplinaires ? La demande du requérant est-elle recevable ? Le requérant a t'il un intérêt, capacité à agir ? Le requérant a-t-il agit dans les délais ? Le juge était-il compétent pour statuer ? L'action est-elle recevable ? La radiation était-elle légale ? Ce comportement justifiait-il, pour autant, une mise à la retraite d'office ?

Par un jugement rendu le 13 novembre 2013 en Assemblée plénière, le Conseil d’État rejette ses demandes aux motifs que l’autorité investie du pouvoir disciplinaire n’a pas inexactement qualifié les faits reprochés. Ceux-ci constituent des fautes de nature à justifier une sanction. Par ailleurs, eu égard à la nature des faits dont l’ambassadeur n’a à aucun moment mesuré la gravité, eu égard à ses responsabilités imminentes et au fait que cet ambassadeur a porté sérieusement atteinte à la dignité de la fonction qui lui était confiée, l’autorité investie du pouvoir disciplinaire n’a pas, en l’espèce, pris une sanction disciplinaire qui serait disproportionnée. Ainsi, le Conseil d’État va exercer un contrôle normal sur les sanctions infligées à cet ambassadeur.

A l’occasion d’un litige, le Conseil d’État a abandonné une jurisprudence en demandant pour l'ensemble des juridictions administratives à effectuer un contrôle dit « normal » entre la gravité de la faute reprochée à l’agent et la sanction finalement infligée.

Le Conseil d’État a donc étendu le degré de contrôle du juge de l’excès de pouvoir en matière de sanction mais a néanmoins longtemps refusé de faire évoluer cette situation et n’a pas souhaité se substituer à l’administration dans le choix de la sanction.

I] LE PASSAGE D'UN CONTROLE RESTREINT A UN CONTROLE NORMAL DES SANCTIONS

L’extension du contrôle du juge de l’excès de pouvoir en matière de sanctions inscrivent la décision dans un courant jurisprudentiel étendu (A) qui permet au juge d'exercer un contrôle accru (B).

A. EXTENSION DU DEGRE DE CONTROLE DU JUGE RELATIVES AUX SANCTIONS ADMINISTRATIVES

A l'origine, le juge était capable de substituer sa propre décision à celle de l’administration ; c'était un juge du

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