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Un citoyen face à la peine de mort

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Par   •  2 Juin 2018  •  Discours  •  2 445 Mots (10 Pages)  •  703 Vues

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UN CITOYEN FACE A LA PEINE DE MORT

D’entrée je voudrais rappeler qu’il ne s’agit pas ici d’engager un nouveau débat sur la peine de mort, sujet éminemment délicat, polémique et diviseur. Ce débat, pour ou contre la peine de mort, ne présente d’ailleurs aucun intérêt particulier dans le contexte béninois car lors de l’instruction de l’affaire Talon, il a été affirmé à l’opinion internationale que le Bénin, de facto, a aboli la peine de mort en prenant le 25 août 2011 une loi (Loi N°2011-11) autorisant l’adhésion de notre pays au deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux droits civils et politiques adopté à New York le 15 décembre 1989. L’article 1er de ce protocole stipule que : « aucune personne relevant de la juridiction d’un Etat partie au présent Protocole ne sera exécutée » et que « chaque Etat partie prendra toutes les mesures voulues pour abolir la peine de mort dans le ressort de sa juridiction ».

Par conséquent, je vais donc seulement me préoccuper de faire un rappel historique de cette pratique, l’évolution du mouvement abolitionniste en Europe et particulièrement en France. Je conclurai par une justification de mon engagement personnel pour la cause abolitionniste.  

La peine de mort peut être simplement définie comme une sanction prévue par la loi consistant à mettre fin à la vie d’une personne coupable d'une faute qualifiée de « crime capital ». Cette faute qui varie d’un pays à un autre, peut être civile (assassinat, vol, viol de mineur), politique (haute trahison, attentat à la sûreté de l’Etat), économique (crime économique, vente de stupéfiants) et j’en passe. Il faut noter que la sentence est généralement prononcée par un tribunal à l'issue d’un procès. Lorsque l’exécution du présumé coupable intervient hors de ce cadre légal, on la qualifie d'exécution sommaire, d'acte de vengeance ou encore de justice privée (vindicte populaire).

D’entrée on est confronté à deux notions de violence : la violence privée (celle du citoyen) qui est désapprouvée et  réprimée et la violence collective (celle de l’Etat) qui est acceptée et tolérée. Ce qui est en cause et qui a suscité en tout temps le mouvement abolitionniste, c’est la violence d’Etat. La société aurait-elle confiée à l’Etat d’exercer une violence brutale et inhumaine en son nom ?

A l’origine, la peine de mort était une sévère punition infligée à une personne qui enfreignait les règles de vie de sa communauté. Son application avait un rôle essentiellement dissuasif et permettait aussi de mettre le coupable hors d'état de nuire à une époque où le système carcéral (procès, juge, prison, etc.) n’existait pas encore.

En remontant le temps, on découvre qu’en Mésopotamie, le texte le plus célèbre, le Code d'Hammurabi, applique la peine de mort selon la loi du Talion. Ainsi, un architecte ayant construit une maison qui s’écroule un jour, causant la mort de ses occupants, est puni de mort. Si c'est le fils du propriétaire qui est tué, c'est le fils de l'architecte qui est exécuté. Si c'est un esclave du propriétaire qui est tué, l'architecte doit lui fournir un nouvel esclave.
On voit déjà à cette époque que la vie n’avait pas la même valeur selon les groupes sociaux : l'esclave n'étant qu'une simple marchandise dont le simple remplacement suffisait pour réparer le préjudice.

Dans l’antiquité, Platon voit dans la peine de mort un moyen de purification. Dans « Les Lois », il juge nécessaire l'exécution de l'animal ou la destruction de l'objet qui aurait causé accidentellement la mort d'un Homme et considère que l'acte d'homicide n'est pas fait par le criminel lui-même, mais par une maladie de l'âme qu'il faut rééduquer. Si cette rééducation ne donne rien, alors le criminel sera finalement condamné à mort.

Pour Aristote en revanche, dont la notion de justice a inspiré le droit pénal occidental jusqu'au XVIIe siècle, l’homme est entièrement responsable de ses actes et sera condamné à la peine de mort en compensation des gros crimes (assassinats par exemple) commis.

Dans la Rome antique, la peine de mort vise trois objectifs : protéger la société, dédommager la victime et dissuader les criminels.

L’église, sous l’Empire Byzantin et durant le Moyen Age, qui a pris de l’importance dans la société et surtout auprès des rois et princes était plus ou moins réticente à l’application de la peine capitale. Elle lui préférait la mutilation qui rendait la vie du coupable pénible voire impossible. On peut aisément comprendre cette position puisque l’un des dix commandements prescrit « tu ne tueras point ». De plus, le fait que ce soit la justice des hommes qui statue plutôt que le droit divin, seul habilité à reprendre ce qu’il a donné, constitue un sujet critique pour l’église dont la position n’a d’ailleurs pas trop varié sur des sujets similaires tels que l’avortement et l’euthanasie.  

Le roi Clovis avait, à cette même époque, codifié une large série de crimes. Par la loi salique, le prix wergeld (prix du sang) fut créé, fixant la somme à payer pour une vie ôtée afin d'empêcher les vengeances privées et de garantir la paix. Ainsi le coupable avait l'obligation de payer à la victime ou à sa famille une certaine somme, et ces dernières avaient l'obligation de l'accepter et d'en rester là. Seuls certains crimes comme la violence contre le roi requéraient la peine de mort. Cela s'explique par le fait que le souverain n'avait pas de prix, car il n'était pas simplement un homme, mais le représentant de Dieu sur Terre.

C'est à partir du Siècle des Lumières (XVIIIe siècle)  que la place de l’Homme au sein de la société n’est plus définie selon une règle divine mais comme un contrat social établi à la naissance entre le citoyen et la société. Dès lors, la peine capitale est considérée comme utile à la société pour son effet dissuasif mais aussi comme un moyen de protection de la société contre les criminels. Diderot, une des grandes figures de cette époque professait que « Le malfaisant est un homme qu'il faut détruire et non punir ».

Dès l’instant où l’objectif est de détruire et non de punir, de dissuader tous ceux qui seraient tentés de les imiter, les solutions les plus cruelles et les plus atroces ont été imaginées et mises en œuvre. Les exécutions étaient des « spectacles » publics macabres à travers lesquels des moyens barbares étaient utilisés pour célébrer une punition exemplaire, une expiation ou pour transmettre un message social ou politique.

On peut citer :

  • le crucifiement, pratiqué dans la Rome antique (Jésus) ;
  • le découpage consistant à sectionner les membres avec un instrument plus ou moins tranchant ou le dépeçage vivant, pratiqué surtout en Chine sous le nom de Lingchi jusqu'au début du 20e siècle ;
  • les méthodes diverses utilisant des animaux : écartèlement par des chevaux, dévorement par des animaux sauvages affamés, morsures de serpent et écrasement par un éléphant ;
  • le fracassèrent du crâne, qui fut utilisé par les Indiens d'Amazonie, les noirs d'Afrique équatoriale et les Polynésiens ;
  • l'enfouissement vivant ou l'éventration ;
  • le bûcher, l’enfermement dans un four, le versement de métal en fusion sur ou dans le corps des suppliciés ou l’huile bouillante (pour les faux monnayeurs) ;
  • la flagellation qui pouvait être mortelle à partir du 40e coup, lorsqu'elle était appliquée à l'aide du knout en Russie tsariste ;
  • la précipitation à partir d'un lieu élevé ;
  • la noyade, utilisée pour des exécutions de masse comme pendant la révolution française ;
  • la strangulation ;
  • la lapidation, etc.

Pour justifier la peine de mort, trois arguments fondamentaux sont souvent avancés : la société doit se défendre contre ceux qui la menacent, seule la mort du coupable peut réparer le crime, l’exemple des exécutions publiques permet de dissuader tous ceux qui pourraient être tentés de commettre des crimes.

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