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La séparation des pouvoirs et la primauté du droit

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Par   •  2 Décembre 2022  •  Dissertation  •  2 221 Mots (9 Pages)  •  243 Vues

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La séparation des pouvoirs et la primauté du droit

        Lors de la mise en examen d’Agnès de Buzyn, l’ancienne ministre de la Santé, l’avocat M.  Christian Charrière-Bournazel se dit inquiet quant à l’emprise croissante du pouvoir judiciaire sur le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Il dit notamment dans sa tribune : « Pour quelles raisons les ministres, ne seraient-ils pas capables de se juger entre eux, quitte à ce que dans la formation de jugement siège un magistrat ? ».

La séparation des pouvoirs est donc un sujet éminent du droit public depuis John Lock à la fin du XVIIe siècle, premier théoricien de l’idée. Cette théorie est en rupture avec la conception monarchique du pouvoir. Ainsi, la séparation des pouvoirs consiste à ne pas donner toutes les fonctions d’un Etat à une même entité. Elle plaide pour que chaque pouvoir soit exercé par des organes distincts, indépendants des autres dans leur mode de désignation et de fonctionnement. La théorie permet de distinguer le pouvoir exécutif, judiciaire et législatif confiés respectivement au gouvernement, aux juridictions et au Parlement. Montesquieu est quant à lui le premier à évoquer ce principe dans l’Esprit des Lois en 1748 en France. Il évoque l’existence de procédures de contrôle et de contrepoids. A travers ce principe, Montesquieu appuie sur le fait que le pouvoir doit arrêter le pouvoir pour garantir la pérennité du système de séparation des pouvoirs. Cette doctrine est notamment valable pour le système Présidentiel américain et porte le nom de « checks and balances ». Ainsi, les constituants américains ont prévu un strict partage des compétences entre les organes fédéraux et les Etats fédérés. Néanmoins, la théorie de la séparation des pouvoirs n’est pas appliquée au même degré dans tous les régimes politiques la choisissant. Si les Etats-Unis ont choisi une séparation stricte, le régime semi-présidentiel français se caractérise par une séparation plus souple pour ne pas provoquer une paralysie institutionnelle. La séparation des pouvoirs est le corollaire indispensable de la protection des droits naturels et de la primauté du droit. Cette dernière notion est le principe voulant que personne ne peut se soustraire aux lois. La primauté du droit dans la séparation des pouvoirs veut que l’autorité gouvernementale soit exercée uniquement dans le cadre que la loi a préalablement défini. Ainsi pour en garantir la primauté du droit en France, ce principe est inscrit dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 où il est énoncé : « Toute Société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution. ». Tout comme la séparation des pouvoirs, la primauté du droit se place à l’encontre de l’anarchie et de la dictature.

Ici, nous nous intéresserons donc au rapport entre la primauté du droit et la séparation des pouvoirs notamment la façon dont ces deux principes s’entretiennent dans une relation circulaire. A travers le sujet mis à l’étude, nous prendrons appui sur le régime démocratique parlementaire anglais, le régime présidentiel américain et le régime semi-présidentiel français. Néanmoins, nous laisserons de côté les distinctions techniques telles que la séparation souple ou séparation stricte propre à chacun des régimes car ces dernières n’influent pas grandement l’étendu de l’impact de la primauté du droit dans la doctrine.

Il apparaît alors légitime de se demander en quoi la primauté du droit est une notion constitutive et essentielle de la théorie de la séparation des pouvoirs qu’il faut néanmoins encadrer pour assurer sa propre protection et la pérennité du système démocratique ?

Ainsi le pouvoir législatif est le seul ayant une puissance d’agir (I) dans la théorie de la séparation des pouvoirs, lui conférant ainsi une grande puissance qu’il faut encadrer au sein même du principe de séparation pour assurer la pérennité des libertés et du Droit (II).

  1. La primauté du pouvoir législatif dans la théorie de la séparation des pouvoirs

La primauté du droit dans la doctrine de la séparation des pouvoirs se traduit par une force législative ayant un monopole de création sur la loi comme témoin de la souveraineté de la nation (A). De plus, le pouvoir exécutif et judiciaire sont subordonnés à la Loi réalisée par le pouvoir législatif (B).

  1. Le pouvoir législatif : monopole de la création de la loi

Dans la doctrine de la séparation des pouvoirs, le Souverain est la nation des citoyens dans son universalité. Cette souveraineté a pour manifestation le pouvoir législatif qui se caractérise par une assemblée de représentants que l’on nomme aujourd’hui dans le régime semi-présidentiel français : l’Assemblée nationale.  Ce pouvoir législatif est dans la doctrine de Montesquieu le seul pouvoir capable de faire acte de volonté première c’est-à-dire le seul qui a un pouvoir de création, celui de créer la Loi. Ainsi le droit et la loi depuis 1789 et donc corollairement le pouvoir législatif sont faits en vertu d’une puissance d’initiative qui ne se manifeste qu’en eux. Le pouvoir législatif étant le seul organe représentant la nation souveraine, il ne peut être que le seul à disposer de ce privilège. Raymond Carré de Malberg évoque notamment ce concept dans son ouvrage Confrontation de la Théorie de la Formation du droit par degrés avec les idées et les institutions consacrées par le droit positif français relativement à sa formation publiée en 1933. Il y développe notamment la pensée selon laquelle la loi, celle adoptée, est l’expression de la volonté générale de la nation car ce dernier garantit le maintien des libertés civiles et politiques : « Par l’assemblée représentative, c’est la volonté générale et souveraine qui prend corps et qui s’affirme ; et la loi adoptée par cette assemblée sera, dès lors, définie elle-même comme « l’expression de la volonté générale ». La loi donne donc le caractère souverain au pouvoir législatif. Ici, la primauté du droit est directement mise en relation avec la théorie de la séparation des pouvoirs dans la mesure où le droit consacre le pouvoir législatif comme le seul est unique pouvoir ayant la possibilité de création de la loi au vu du fait que celui-ci émane de la nation souveraine.

La primauté du droit, après avoir consacré le pouvoir législatif, subordonne le pouvoir judiciaire et exécutif.

  1. Un pouvoir judiciaire et exécutif subordonné à la loi

Du fait que le monopole de création de la loi appartient au pouvoir législatif, en découle un pouvoir judiciaire et exécutif subordonnés voir aliénés à la loi. En effet, les autres autorités sont au service de la nation souveraine mais n’ont pas de caractère représentatif. Par cette caractéristique, leur pouvoir de création leur est refusé, ce qui implique que leur puissance est déterminée par la loi. En effet, notamment en France, toutes les autres autorités ont besoin d’un texte préalable ou d’une loi émanant du Parlement pour accomplir un acte. A nouveau, Raymond Carre de Malberg précise cette notion dans Confrontation de la Théorie de la Formation du droit par degrés avec les idées et les institutions consacrées par le droit positif français relativement à sa formation. Ainsi, dans la doctrine de la séparation des pouvoirs, il met en lumière que le pouvoir exécutif ne peut exercer qu’en vertu de la loi tandis que le juge est réduit à l’application de la loi. Le juge est ce qu’on peut appeler « la bouche du roi » si on reprend l’expression de Montesquieu dans Esprit des lois au chapitre VI. Le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire ne sont que dépositaires du pouvoir législatif souverain qui peut notamment les limiter ou les aliéner. Ces derniers sont l’interface ou l’intermédiaire entre les sujets et les représentants de la nation souveraine expliquant à nouveau cette subordination au pouvoir législatif. De plus, même si l’exécutif et le judiciaire ne sont pas complétement dirigés par le Parlement, ces derniers disposent parfois d’une force d’initiative mais seulement parce que le pouvoir législatif leur en autorise. Rousseau nomme notamment cette relation le « Contrat social », l’accord entre le pouvoir exécutif, législatif et les sujets qui limite au mieux les penchants inopinément absolutistes ou monarchiques. En somme, la primauté du droit en tant que pouvoir de la nation tend à hiérarchiser les différents pouvoirs dans la théorie.

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