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La dernière maladie

Commentaire d'arrêt : La dernière maladie. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  24 Mai 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  2 515 Mots (11 Pages)  •  439 Vues

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INTRODUCTION

L'article 479 du D.O.C consacre la théorie de la vente faite par le malade pendant sa dernière maladie, mais il n'en définit ni le sens ni les conditions. Cette absence a donné lieu à une jurisprudence complexe et parfois confuse comme en témoigne l'arrêt rendu par la chambre civile de Cour de cassation en date du 24 décembre 2012.

En l'espèce, M. KHAYRI Abdelaziz, en état de dernière maladie- le défunt a souffert d'un cancer pulmonaire avec une métastase cérébrale-, a cédé les deux tiers de son titre foncier, par un acte de vente conclu en date du 16 aout 2007, M. KHAYRI est décédé le 24 octobre 2007. L'inégalité des obligations a conduit les héritiers du vendeur M. KHAYRI Abdelaziz à saisir le Tribunal de Première Instance d'une demande de nullité du contrat de vente.  

La demande de nullité est accueillie favorablement par le Tribunal de première instance. Un appel est interjeté par la défenderesse. La Cour d'appel de Casablanca confirme le jugement du Tribunal de première instance par un arrêt du 30 mars 2011. Un pourvoi a été formé devant la Cour de cassation.

L'acheteuse forme un pourvoi en cassation. La demanderesse au pourvoi soutient d'une part, que  la maladie dont le vendeur a souffert n'a pas altéré ses facultés mentales, son discernement et sa conscience, ainsi qu'elle a prouvé l'absence d'une aliénation mentale par une attestation établie par des adouls; elle soutient, d'autre part,  que le défunt n'a pas eu une tumeur cérébrale qu'en date du 08 décembre 2007 c'est-à-dire après la conclusion du contrat de vente; et enfin, elle soutient que le cancer du poumon n'est pas considéré comme une dernière maladie puisqu'il n'altère pas les facultés mentales et n'entraine pas une incapacité physique empêchant le malade de pourvoir seul à ses intérêts.    

Les juges de la Cour de cassation se sont probablement posés le problème de droit suivant: Est-ce que la dernière maladie constitue une cause de nullité même si les facultés mentales et la capacité physique du défunt ne sont pas altérées conformément à l'attestation établie par les adouls?

La Cour de cassation répond par l'affirmative. Elle énonce, en réponse au premier moyen, dans un attendu que l’on peut qualifier de principe « le fond de l'affaire est relatif à  la dernière maladie, cela veut dire que  la discussion ou la réponse à des exceptions qui n'auront aucun effet sur la l'affaire ou le jugement ne sont pas exigés»; en réponse au second moyen elle énonce que: « l'attestation établie par les les adouls ne concerne que l'état de santé apparent et son effet ne s'étend pas aux maladies cachées, dont la constatation relève de la compétence des médecins spécialistes»; et enfin, elle énonce, en réponse à la deuxième branche du troisième moyen, que:  « le décès du malade a eu lieu deux mois après la conclusion du contrat, donc c'est la maladie qui a abouti au décès du malade». La Cour de cassation rejette par conséquent le pourvoi dès lors que la Cour d'appel de Casablanca a relevé que le contrat de vente a été conclu par le malade pendant sa dernière maladie deux mois avant son décès.

Le conclusif est lapidaire, il faut donc chercher à reconstituer le raisonnement juridique qui a conduit les juges de la Cour de cassation que la vente a été faite pendant la dernière maladie (I) avant de mettre l'accent sur les effets de la vente faite par un malade pendant sa dernière maladie (II).

  1. La dernière maladie: Un flou quant au sens et au moyen de preuve

La Cour de cassation a censuré le raisomment de la défenderesse quant au sens de la dernière maladie (A). Elle considère en effet que les certificats médicaux prévalent sur l'attestation établie par les adouls (B)

  1. Une solution censurée quant au sens de la dernière maladie:

La Cour de cassation articule entièrement sa solution autour de la dernière maladie: « le fond de l'affaire concerne la dernière maladie, cela n'exige pas la discussion ou la réponse à des exceptions qui n'auront aucun effet sur la l'affaire ou le jugement »; Il ne fait donc aucun doute que l’on est, pour la chambre civile, en présence d’une dernière maladie.

La dernière maladie est une notion éminemment de droit musulman, se sont effectivement les jurisconsultes musulmans qui se sont attelés à préciser le concept[1].  

La dernière maladie est consacrée par l'article 479 du D.O.C qui renvoie quant à son régime juridique aux articles 344 et 345 du même code. Or, si l'article 479 du D.O.C consacre la dernière maladie, il n'en définit nullement le sens.  

La doctrine a fixé trois conditions pour qu'une maladie soit considérée comme dernière maladie. Selon la première condition, la maladie doit entrainer une incapacité physique empêchant le malade à pourvoir seul à ses intérêts: Le malade ne peut plus vaquer  à ses tâches quotidiennes, professionnelles ou domestiques; selon la seconde, la maladie doit être d'une certaine gravité telle qu'elle se termine souvent par la mort; et enfin, le décès systématique de celui qui en est atteint: La maladie aboutit fatalement au décès du malade.[2] 

Une question sur la possibilité  de se dispenser de la première condition - pourvoir à ses intérêts- se pose. Le professeur ESSANHOURI répond par l'affirmative[3].

On pouvait cependant se demander si la vente a été véritablement faite en dernière maladie. C’est l’argument invoqué par la demanderesse dans son pourvoi : « le cancer de poumon n'est pas considéré comme dernière maladie parce qu'il n'altère pas les facultés mentales du malade et ne l'empêche pas de pourvoir seule à ses intérêts ».

Le mot cancer continue d'être un mot effroyable, tabou, synonyme de mort. Il est perçu comme une maladie grave, mortelle dans la plupart des cas, puisque le succès thérapeutique est imprévisible malgré les avancées de la médecine[4].

Le cancer conduit à la mort jour après jour surtout qu'il est susceptible de faire des métastases: Le cancer initial est susceptible d'être propagé à d'autres organes.[5]

La Cour de cassation a rendu sont arrêt en se basant dans sur le compte rendu délivré par le radiologue KNOWLEDGE en date du 18 décembre 2007 qui atteste que le défunt était atteint d'un cancer de poumon et qu'il a développé des métastases cérébrale et osseuse.

L'arrêt commenté stipule que le caractère incurable ainsi que le décès systématique suffisent pour retenir la dernière maladie, l'incapacité du malade de pourvoir seul à ses intérêts n'est pas exigée.

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