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Commentaire d'arrêt : cour de cassation, 1ère chambre civile, 27 juin 1995

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Par   •  24 Février 2019  •  Dissertation  •  2 119 Mots (9 Pages)  •  893 Vues

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L’information précontractuelle

Commentaire d’arrêt : Cour de cassation, 1ère chambre civile, 27 juin 1995

      L’arrêt présenté est un arrêt de rejet de la cour de cassation rendu en sa 1ère chambre civile le 27 juin 1995 et portant sur le devoir de conseil inhérent aux établissements de crédit à l’égard des emprunteurs.
     En l’espèce, Un couple marié conclut un contrat avec un constructeur immobilier afin de faire construire une maison individuelle le 29 février 1988. Pour réaliser leur projet, les époux contractent trois prêts différents auprès de trois établissements de crédit (CFF, UCB et Colog). En août 1988, les époux assignent en justice le constructeur immobilier et les trois établissements de crédit.
La première décision est rendue par un arrêt du tribunal de Riom le 23 mai 1991. Le tribunal déclare que les contrats sont valables. Cependant, il admet que la non-exécution des obligations contractuelles pouvait entrainer le versement de dommages et intérêts. Le couple marié interjette appel de la décision. La Cour d’appel rend sa décision le 11 juin 1992. Elle déclare le constructeur immobilier ainsi que les trois établissements de crédit responsables du préjudice subi par les époux et les condamne à payer solidairement une somme de 150 000 francs. Les établissements de crédit CFF et UCB forment un pourvoi en cassation.
     Pour les demandeurs, en constatant à la fois que tous les renseignements obligatoires, en vertu de l’article 5 de la loi du 13 juillet 1979, avaient été portés à la connaissance du couple mais que cependant, les établissements de crédit avaient commis une faute en ne mettant pas suffisamment en garde les emprunteurs sur le risque de l’emprunt, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses constatations.
     Dans quel cadre les organismes de crédit sont-ils contraints à un devoir d’information à l’égard des emprunteurs ?
     La cour de cassation répond que les obligations données par la loi du 13 juillet 1979 ne dispensent pas les organismes de crédit à fournir un devoir de conseil aux emprunteurs. D’autant plus si le professionnel constate que les charges inhérentes au prêt sont supérieures à la capacité de remboursement des emprunteurs. De plus, la cour de cassation souligne qu’un arrêt avait mis en lumière l’impossibilité des époux, connue des organismes de crédit, de supporter le remboursement du crédit au vue de leurs revenus. La cour de cassation remarque aussi que les organismes n’ont à aucun moment prouvé ou même prétendu avoir mis en garde les époux sur l’importance du crédit qu’ils allaient contracter. La cour de cassation confirme donc la décision de la cour d’appel en constatant que les organismes de prêt avaient manqué à leur devoir de conseil et donc avaient engagé leur responsabilité.
     Afin d’étudier la question de l’information précontractuelle, il s’agira de d’abord s’intéresser à la fourniture de l’information (I) puis au régime de l’information (II)

  1.    La fourniture de l’information

Dans le cadre contractuel, l’information est un point clé. En effet, pour pouvoir se prévaloir d’un consentement éclairé, il est nécessaire de détenir une information totale sur les informations déterminantes pour la formation du contrat. C’est-à-dire les informations qui amènent les parties à contracter. En principe, si l’obtention de ces informations ce fait de façon amicale, le droit français tend à imposer un cadre protecteur pour les parties à propos de l’accès à l’information.

  1. Le principe de l’obtention amicale de l’information

      En principe, l’accès à l’information se fait sur une base amicale. Il en va de la responsabilité de chaque contractant de s’informer quant au contenu du contrat et à la personne du co-contractant ainsi que sur la prestation. Si un co-contractant refuse de répondre à une question que l’on pose, ce refus doit être pris en compte par l’autre partie. Avec ce principe, une partie qui accepte de contracter est une partie qui estime avoir réunie suffisamment d’information. Si à posteriori de la formation du contrat, l’une des parties se plaint de n’avoir pas été en possession de toutes les informations, celle-ci sera considérée comme négligente ou imprudente, et donc fautive, car elle n’a pas recherché suffisamment d’information avant de contracter. On peut d’ailleurs voir ce principe de responsabilité en cas d’imprudence ou de négligence dans l’arrêt de la troisième chambre civile de la cour de cassation du 9 octobre 2012. Dans cet arrêt, un couple marié ayant acheté une maison à un autre couple se plaint de tir de mines à proximité de la maison. Le couple accuse les vendeurs de réticence dolosive car ceux-ci ne les avaient pas prévenus oralement de cette situation. Cependant, la cour de cassation estime que le couple d’acheteur était en mesure de connaitre  la présence de ces tirs de mines aux vues de la réputation de la commune, du fait que le couple avait effectué plusieurs visites de la maison, ainsi que du fait que la route qui menait à la maison laissait voir cette carrière. Dans ce cas, ce sont les contractants qui estiment avoir eu un défaut d’information qui sont jugés fautif car la cour de cassation estime que c‘était de leur devoir de s’informer. C’est le principe « CAVEAT EMPTOR » (« que l’acheteur prenne garde » qui domine depuis le code civil de 1804. La phase préalable à la formation du contrat constitue donc une phase de recherche de l’information  pour les contractants. Cependant, si ce principe reste dominant, la France a eu tendance à prendre en compte l’inégalité qui résultait de la nature même de certains co-contractants. En effet, même en faisant un travail de recherche d’information, certains contractants sont dans l’impossibilité de parvenir à un résultat du fait du déséquilibre inhérent à la personnalité du co-contractant. De plus, une information pertinente pour un contractant peut être une information complexe à comprendre ce qui peut poser un problème d’intelligibilité.

  1. L’obligation d’information du nouveau droit commun

      Pour ces raisons, il arrive que le droit français s’écarte du cadre amiable afin d’obliger une partie à donner une information légale à l’autre. Cette obligation est intervenue en premier lieu à l’égard de certains contrats spéciaux. Dans certains contrats spéciaux on a vu apparaitre l’obligation de fournir une information précontractuelle prévue par des textes spéciaux liés à la spécificité du contrat. On fait varier l’intensité de l’obligation d’information en fonction du type de contrat et des risques qu’il fait encourir aux co-contractants. Le degré d’obligation le plus fort est le devoir de conseil qui consiste à donner de l’intelligibilité à l’information. La personne débitrice du devoir de conseil ne peut pas s’en tenir à des informations factuelles mais se doit d’entrer en contact avec le co-contractant afin de lui proposer la prestation la plus adaptée à sa situation. Ce devoir de conseil résulte le plus souvent d’une compétence technique que l’on attribue à l’une des parties. Ce devoir peut aller jusqu’à obliger au débiteur du devoir d’information de s’abstenir de contracter s’il estime qu’il ne dispose pas suffisamment d’information sur son co-contractant. C’est un moyen de protéger le co-contractant d’une situation qui pourrait être dommageable pour son intérêt. Dans l’arrêt présenté, les organismes de crédit, en tant que professionnels du crédit, sont des débiteurs de ce devoir d’information. Ils sont dans l’obligation de conseiller les clients, en tenant compte de leur situation financière, sur l’option la plus protectrice de leurs intérêts. Dans l’arrêt du 27 juin 1995, la cour de cassation reconnait d’ailleurs comme fautives les établissements de crédit qui se sont tenus à un simple devoir d’information sans reconnaitre qu’en l’espèce ils étaient tenus à un devoir de conseil. Aujourd’hui, le droit commun s’est emparé du devoir d’information dans l’article 1112-1 nouveau du code civil qui résulte de la réforme du droit des contrats de 2016 dispose que « celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. ». Cette disposition s’applique donc aux professionnels et aux particuliers puisqu’elle est commune à tous les contrats. Cependant, elle ne contredit pas le principe CAVEAT EMPTOR car l’article pose des conditions. En effet, il faut que l’information en cause soit déterminante et donc qu’elle soit de nature à déclencher le consentement. Il faut aussi que le débiteur de l’information connaisse l’information. De plus il faut que le créancier de l’information soit dans une situation où légitimement il ignore l’information ou il fait confiance au co-contractant.

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