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Une Raffinerie la nuit, texte de J.Lacarrière

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Par   •  5 Janvier 2023  •  Commentaire de texte  •  1 740 Mots (7 Pages)  •  152 Vues

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Romain                Une Raffinerie, la nuit(p77)

Kappenstein

1°1

Une Raffinerie, la nuit est un poème en prose de Jaques Lacarrière (1925-2005) issu de son recueil Ne lâchons pas la proie du soleil pour l’ombre des écrans. A travers ce recueil Jaques Lacarrière nous propose une « invitation à mieux regarder, écouter, sentir et observer le monde qui nous entoure. » (préface p.20). Il veut ainsi nous faire ouvrir les yeux sur ce que le monde « offre de plus décourageant et de moins poétique : aéroports, raffineries, supermarchés, grues, tankers. » (préface p.20). Jacques Lacarrière jette alors un nouveau regard sur une modernité souvent perçue laide grâce à de courtes réflexions poétiques. Dans le poème Une Raffinerie, la nuit Jacques Lacarrière décrit le site d’une raffinerie successivement comme un lieu féerique puis un lieu moderne effrayant. Il serait dès lors intéressant de se demander en quoi le poème Une Raffinerie, la nuit illustre ce projet poétique de description et de sublimation du monde moderne.

La raffinerie est tout d’abord présentée de loin comme un lieu de songe qui ouvre les possibilités à l’imagination du lecteur et du poète.

Elle est en effet présentée comme un lieu d’escapade imaginaire par le biais de nombreuses images. Le poète y voit un lieu de fête comme en témoigne l’emploi marqué du champ lexical de la cérémonie avec notamment le groupe nominale « une réception grandiose » (l.7), les noms communs « fête » (l.7) et « festival » (l.26) ou encore le verbe « célébrait »(l.26) . Il insiste sur l’aspect particulièrement festif de la raffinerie grâce à une gradation : « fête » puis « réception grandiose » puis « festival des essences » qui souligne l’alchimie à laquelle s’adonne le poète qui sublime un lieu considéré comme laid.

Il complète cette impression festive par une invitation à un voyage féérique porté par des métaphores : La « ville orientale » (l.1) et ses « minarets illuminés »(l.2) évoquent Les Milles et une Nuits tandis que le « navire en fête » (l.2) est une invitation à voyager sur un océan de « vagues arrêtées »  ( l 3) qui subliment la beauté d’un moment  hors du temps. La raffinerie est enfin apparentée à une « ruche d’abeilles phosphorescentes » dans une métaphore filée  qui évoque l’agitation du lieu ( l 4 ; le « miel » l 34)

Ce thème récurrent d’un lieu de songe, d’un rêve, d’une féérie est associé au champ lexical de la luminosité. Ainsi, les « feux follets » ( l 13), la teneur « phosphorescentes » ( l4)  du lieu ou la paronomase « flamme et l’oriflamme » ( l28) évoquent la luminosité surnaturelle qui s’échappe de ce lieu et renforce l’impression de magie, de mirage qui en découle. Il y a d’ailleurs un rapprochement entre la raffinerie et un château de conte de fées car elle est dotée d’une « herse » et « d’un oriflamme des torchères », qui en font un château des temps modernes.

Le poète propose au lecteur un voyage onirique grâce à des images qui lui permettent de s’échapper de la réalité. Il sublime ainsi la raffinerie qu’il nous fait découvrir sous des angles insoupçonnés. Seul le recul poétique associé à « une certaine distance » ( l 6 et 12 ) nous permet de découvrir autrement ce haut lieu du monde moderne. 

« Mais mirage et magies s’effacent dès que rouvrant les yeux ont s’approche du lieu de la fête. » (l. 14-15). Et au fur et à mesure qu’il se rapproche, le poète discerne de mieux en mieux les contours de la raffinerie qu’il dépeint alors comme mystérieuse et labyrinthique.

Le poète présente tout d’abord la raffinerie comme un être vivant et étrange qui pourrait rappeler un dragon. Il renforce l’impression d’un bruit incessant et inquiétant grâce aux les énumérations de verbes d’action : « halète, souffle, chuinte et siffle au milieu de fumerolles et de fumées » ( l 23- 25) dont  des assonances en -s- et en -f- permettent d’entendre ce sifflement autant effrayant qu’intriguant qui évoque un dragon.

La raffinerie y est aussi dépeinte comme un lieu mystérieux. Le poète utilise l’image péjorative du « marécage miocène » pour suggérer que c’est un lieu menaçant. Elle est aussi apparentée à d’autres milieux naturel. La « futaie des colonnes »  ( l 17-18   )   ou le « dense entrelacs de tubulures et de tuyaux »  ( l 17-17)  font référence à la forêt, sa futaie et ses racines. La forêt est traditionnellement un haut-lieu des mythologies et des symboles comme chez les romains avec les nymphes, les satires, dans le cycle de Niebelungen chez Wagner... C’est cette forêt des temps modernes que le poète cherche alors à décrypter.

Il met en avant la complexité à y parvenir et présente la rafinerie comme un lieu labyrinthique où le poète se perd. Il introduit dès lors une certaine modernité dans son poème en employant l’anglicisme « puzzle », qui vient de puzzled (déconcerté). Il joue ainsi sur le double sens du mot qui désigne autant un jeu de reconstitution à partir de multiples pièces que le  son sens anglais de déstabilisant. Le vertige qui s’empare du poète au moment de reconstituer le puzzle est souligné par l’utilisation répété du pluriel dans des énumérations d’objets hétéroclites: « puzzle de fours, de bacs, de sphère, de stations de pompages, d’unités de stockage »(l.20-22)  après avoir évoqué dans une précédente énumération l’  « essaim d’échangeurs, de condenseurs, de réservoirs. »(l.18-19).

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